Les droits liés à la communication ont joué un rôle essentiel dans l’établissement du concept de droits humains universels née au milieu du 20e siècle, ainsi que dans son affirmation dans la Charte des Nations Unies et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH). Toutefois, on attribue généralement à Jean d’Arcy d’avoir été le premier à défendre explicitement le « droit à la communication ». En 1969, alors qu’il occupait le poste de Directeur de la Radio et des Services Visuels du Bureau d’Information Publique de l’ONU, il écrivit :

« Le jour viendra où (la DUDH) devra prendre en compte un droit plus large que le droit de l’homme à l’information, établi pour la première fois il y a 21 ans dans l’Article 19. Il s’agit du droit de l’homme à communiquer, et c’est l’angle sous lequel il faudra considérer le futur développement des communications si on veut vraiment le comprendre. » [2]

Plates-formes intergouvernementales : NOMIC, UNESCO, et Commission MacBride<br />

La question fut propulsée sur le devant de la scène géopolitique peu de temps après, et l’idée d’un « droit à communiquer » se retrouva rapidement au centre d’une controverse diplomatique internationale qui dura plusieurs années - une discussion sur ce qui allait devenir le Nouvel Ordre Mondial de l’Information et de la Communication, ou NOMIC.

Alors que le rôle des médias et de la communication s’affirmait, de nombreux pays commencèrent à s’inquiéter sérieusement de l’impact de ces derniers sur l’identité nationale, l’intégrité culturelle et la souveraineté politique et économique. Le NOMIC, emmené par le Mouvement des Non-Alignés (MNA) des pays de l’ONU, s’est plus particulièrement intéressé à :

- la doctrine de la « libre circulation » de l’information, qui renforçait la domination de l’Occident sur les médias et le contenu des nouvelles ;

- la concentration croissante dans le secteur des médias et de la communication, qui se traduisait par l’achat par des étrangers des médias dans les pays les plus petits et les plus pauvres ;

- l’importance croissante des techniques de production et de diffusion médiatiques contrôlées par l’occident, qui tenait les autres pays à l’écart.

La bataille se déroula tout d’abord à l’UNESCO, le seul organisme de l’ONU habilité pour débattre de manière cohérente de l’ensemble des questions soulevées, et elle dura dix ans. À partir de 1973, le MNA commença à mettre en place une stratégie beaucoup plus sophistiquée pour un Nouvel Ordre Mondial de l’Information. Au cours de l’Assemblée Générale de l’UNESCO de 1976, le large fossé entre le MNA et les pays occidentaux (dont les États-Unis et le Royaume-Uni) apparut de manière claire. On évita de justesse une épreuve de force par la création d’une Commission Internationale pour l’Étude des Problèmes de Communication, généralement appelée Commission MacBride, du nom de son président, Seán MacBride.

Le rapport de la Commission MacBride à l’Assemblée Générale de 1980, « Voix Multiples, Un Seul Monde », reflétait un processus politique virulent, éludait de nombreuses questions et contenait de multiples mises en garde. Il était malgré tout complet (bien que la question de l’égalité entre les sexes n’ait pas été suffisamment fouillée) et large, et il proposait des recommandations concrètes, dont :

« Les besoins en communication dans une société démocratique doivent être satisfaits par l’extension des droits spécifiques comme le droit d’être informé, le droit ¬d’informer, le droit au respect de la vie privée, le droit à participer à la communication publique - tous des composants d’un nouveau concept : droit à la communication. Afin de développer ce qui pourrait être appelé une nouvelle ère de droits sociaux, nous suggérons que toutes les implications du droit à communiquer soient explorées plus avant. » [3]

Pour la première fois, le NOMIC disposait d’un cadre général, d’une justification détaillée, d’un ensemble de propositions, et d’un concept fédérateur - le droit à la communication.

Les conclusions de la Commission furent finalement approuvées - un moment déterminant pour le NOMIC, mais qui fut de courte durée. Les chances d’aboutir à un accord étaient minces ; au lieu de rapprocher les parties, le processus mit plutôt à jour leurs différences et raffermit leurs positions, notamment celles des gouvernements occidentaux embourbés dans la géopolitique de la Guerre Froide.

Les États-Unis menèrent une « contre-offensive » sur l’UNESCO, avec le soutien appuyé du secteur privé des médias et des lobbies. Ils accusaient principalement les pays les moins développés d’essayer d’imposer un contrôle gouvernemental des médias, et ainsi de supprimer la liberté de la presse - bien que le NOMIC ne manquât jamais une occasion de soutenir la liberté de la presse. Les États-Unis (en 1984) et le Royaume-Uni (en 1985) se retirèrent finalement de l’UNESCO, en partie à cause du NOMIC.

Alors que la « société de l’information » nouvellement politisée se développait, le NOMIC déclinait sous sa forme originale. Il réussit néanmoins à se maintenir au programme de l’UNESCO jusqu’en 1987, malgré une action limitée. Il disparut définitivement avec l’adoption de la « Nouvelle Stratégie de Communication » de 1989, alors que Federico Mayor était Directeur Général de l’UNESCO. Pourtant, les désaccords qui animaient le NOMIC persistèrent, et à certains égards se renforcèrent. Les sujets de discorde refirent surface dans de nouveaux appels - cette fois non gouvernementaux - en faveur des « droits de la communication ».

Au-delà du NOMIC : les engagements de la société civile

Pour beaucoup, la principale leçon à tirer du NOMIC fut que l’évolution vers la création de nouveaux ordres mondiaux devait passer par la démocratisation des médias et de la communication, plutôt que par des initiatives soutenues par les États ou les professionnels du secteur. En pratique, il fallait un changement radical d’attitude en direction de la société civile, qui jusqu’alors avait été largement exclue. Les organisations et personnes qui avaient été impliquées - principalement des organisations de journalistes et quelques universitaires - continuèrent de débattre sous la forme de la Table Ronde MacBride, qui se réunit chaque année de 1989 à 1999 et permit à de nouveaux acteurs de la société civile de participer à la discussion.

Un nombre croissant d’ONG, dont certaines n’avaient pas du tout pris part aux débats antérieurs, voire les ignoraient (et parfois même ne se connaissaient pas entre elles), commencèrent aussi à s’interroger sur l’évolution des médias, du savoir et de la communication. Parmi celles-ci se trouvaient des associations de médias communautaires, des organisations religieuses, des syndicats internationaux, des ONG du tout jeune Internet et des groupes de défense créés en réponse à différents problèmes (comme la surveillance d’internet, la concentration des médias aux mains des mêmes propriétaires, la censure commerciale, les excès en matière de copyright et de brevets), qui venaient s’ajouter aux inquiétudes plus classiques sur la censure et le contrôle par le gouvernement. L’importance croissante des techniques numériques et la naissance d’Internet apportèrent aussi de nouveaux arguments en faveur de la démocratisation, alors que les contradictions sociales existantes se manifestaient au travers de ce que l’on a appelé les « fractures numériques ». De nouveaux lieux de débat virent le jour, où les plaidoyers anciens et récents pouvaient se retrouver.

Le discours de la société civile s’est construit autour des pratiques sur le terrain et du travail de conviction dans les instances nationales et régionales de débat, même si les initiatives qu’elle portait n’avaient pas encore le label des droits de la communication. Toutefois, une histoire du mouvement pour les droits de la communication « d’en bas » mentionnerait probablement plusieurs domaines d’activisme : le mouvement des télécentres, les communautés Free/Libre/Open Source Software (FLOSS), les centres de médias indépendants, les organisations de femmes dans le domaine de la communication, les défenseurs du contenu local et des langues locales, les fournisseurs de service internet à but non lucratif - tous profitant du nouveau pouvoir que leur accordaient les nouveaux outils et techniques de mise en réseau. Ces organisations - financées par des institutions de donateurs et des universitaires bienveillants - évoluèrent indépendamment et affûtèrent leurs critiques sur les nouvelles hiérarchies de l’information et de la communication.

Au début des années quatre-vingt-dix, de nombreuses coalitions et initiatives, parmi lesquelles la Charte Populaire de la Communication et la Plateforme pour la démocratisation de la communication, virent le jour en réaction à un contexte plus varié dans lequel s’inscrivaient nombre de ces inquiétudes. De nombreuses conférences et réunions regroupant des tendances très variées furent organisées pour rassembler toutes les forces en présence et échanger des points de vue au niveau international.

Progressivement, une nouvelle force émergea de la société civile, mais cette fois à partir d’une perspective différente et bénéficiant d’une expérience historique et d’une pratique acquise sur le terrain [4]. Beaucoup des acteurs se retrouvèrent en octobre 2001 dans la Campagne pour les Droits de la Communication dans la Société de l’Information, ou Campagne CRIS [5], dès la mise en place d’un autre lieu de débat sur la gouvernance mondiale - le Sommet Mondial sur la Société de l’Information (SMSI).

Le « droit à la communication » et les « droits de la communication »

Les expressions « droit à la communication » et « droits de la communication » ne sont pas synonymes, et leur histoire, leurs principes et leurs stratégies sont liés à leur usage par différents groupes.

Comme nous l’avons vu, l’expression « droit à communiquer » ou «  droit à la communication » a été associée à la (mauvaise) interprétation du NOMIC, répandue par ses opposants. Même aujourd’hui, dans le cadre du SMSI, certains soutiennent que les tentatives pour promouvoir «  un droit à communiquer  » ne sont en fait que des efforts à peine voilés pour ressusciter le NOMIC [6]. Pour ces contradicteurs, une conception des « droits de la communication » distincte d’un « droit à la communication » est plus difficile à critiquer étant donné qu’elle ne prend pas en considération les implications du NOMIC.
Au niveau politique, il y a aussi eu des appels en faveur de la création d’un nouveau droit dépendant du droit international. Il reposerait sur le cadre juridique international existant, et établirait le « droit de la communication » comme un droit non équivoque de tous les peuples. Cette position reconnaît clairement que de nombreux droits humains existants en sont des éléments clés, mais un « droit à communiquer » explicite les soutiendrait à la fois au niveau conceptuel et dans la pratique. Toutefois, les spécificités de ce droit, sa formulation précise, la forme légale sous laquelle il serait intégré, etc., n’ont pas été complètement déterminées.

Par ailleurs, le terme « droits de la communication », au pluriel, fait implicitement référence aux droits existants liés à la communication. L’accent se déplace subtilement vers la concrétisation des droits de la communication existants sur le terrain, et non sur l’établissement d’un nouvel accord mondial.

L’appel en faveur de la concrétisation des droits de la communication, et la réaffirmation que chacun a - ou devrait avoir - le droit à communiquer, sont entièrement complémentaires. Le « droit à la communication » peut être utilisé comme un cri de ralliement informel pour le plaidoyer, mais il peut aussi être utilisé dans un sens juridique formel, dans lequel il trouverait sa place au côté d’autres droits fondamentaux garantis par le droit international. Les « droits de la communication » renvoient immédiatement à un ensemble de droits humains existants, qui sont niés à de nombreux peuples, et qui ne peuvent prendre leur sens complet que lorsqu’ils sont considérés globalement comme un groupe étroitement lié.

La Campagne CRIS constitue l’alliance de la société civile la plus organisée qui cherche à promouvoir le concept et la pratique des Droits de la communication. Mais au-delà de cette formation, de nombreuses autres ont adopté le terme dans diverses plates-formes.

Un « droit à la communication » reçut un soutien appuyé à différents niveaux pendant le processus du SMSI de la part d’acteurs influents. La question a acquis une certaine importance même si des efforts pour la discréditer, et la crainte de la controverse, expliquent probablement son exclusion du texte final [7]. Le Secrétaire Général de l’ONU, Kofi Annan déclara que « des millions de personnes dans les pays les plus pauvres sont toujours exclues du droit à la communication, considéré de plus en plus comme un droit humain fondamental »[8]. Et la Commission Européenne fit remarquer que « Le Sommet devrait renforcer le droit à la communication et d’accéder à l’information et au savoir » [9].

D’autres ONG importantes, non membres de la Campagne CRIS, ont aussi soutenu le droit à la communication. Article 19, dans sa vue d’ensemble du droit à communiquer, le décrit comme : « un terme général, englobant un ensemble de droits existants apparentés. Ceci signifie que toute manifestation du droit à la communication doit avoir lieu dans le cadre des droits existants. » [10]

Droits de la communication, ou liberté d’expression

La «  liberté d’expression » figure parmi les fondements sacro-saints de tous les droits humains. Elle est mentionnée dans de nombreux Traités et Conventions internationaux, et garantie sous différentes formes dans presque toutes les constitutions et législations nationales. La référence la plus fréquemment citée est l’Article 19 de la DUDH :
« Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit.  »

La liberté d’expression est-elle suffisante?

Les défenseurs des droits de la communication doivent expliquer pourquoi il faudrait aller au-delà de la « liberté d’expression ». En outre, étant donné que dans la pratique, un tel droit fondamental est toujours refusé à de nombreuses personnes, ne faudrait-il pas concentrer nos efforts sur la liberté d’expression pour tous? Est-ce que s’assurer du respect de la liberté d’expression suffirait pour assurer les droits de la communication?

La liberté d’expression tire sa légitimité d’un idéal dans lequel un groupe d’individus communique, chacun ayant un droit égal de concevoir, transmettre et recevoir des idées de la part des autres, et donc de parvenir rationnellement à des décisions d’intérêt mutuel. Le problème, c’est que nous ne vivons pas comme un groupe de personnes ayant toutes les mêmes pouvoirs. Nous vivons dans une société avec des niveaux d’accès au pouvoir extrêmement variés, une société dans laquelle la plus grande partie de la communication entre les personnes est fortement médiatisée et filtrée - par les médias de masse, les gouvernements, les entreprises commerciales, les groupes d’intérêt particuliers et de nombreux autres acteurs, tous rivalisant pour attirer notre attention, cherchant à influencer et contrôler le contenu et la circulation des communications. Insister uniquement sur la liberté d’expression n’indique rien sur le processus par lequel les moyens d’expression de la société - journaux, télévision, radio, films, musique et matériel éducatif - sont contrôlés, ni dans l’intérêt de qui ils agissent.

Dans ce contexte, la liberté d’expression - dans le sens où des lois empêchent une intervention directe de l’État et défendent la liberté de parole - est impuissante face à la domination par les voix les plus fortes, c’est-à-dire celles qui peuvent influencer le plus les moyens de communication au sein de la société, qu’il s’agisse du gouvernement, des propriétaires de journaux et de médias, ou de groupes d’intérêt puissants.
Comment la « liberté de recevoir et transmettre des informations » peut-elle alors se manifester si une personne peut à peine lire ou écrire, ou ne peut pas parler la langue officielle du pays? Quelle est la réalité de la liberté de « chercher et recevoir des informations » si les gouvernements et les entreprises ne sont pas obligés de les fournir? Ou bien si vous n’avez pas les moyens de payer des documents pédagogiques, ou d’accéder à des supports essentiels de communication, comme le téléphone ou (de plus en plus) Internet? Ou encore si vous savez que vos moyens de communication sont ¬espionnés? Ce sont là les manifestations d’un accès inégal au pouvoir, les symptômes d’un monde dans lequel la communication devient seulement possible par le biais de médias et de mécanismes complexes et contestés.

Ainsi, les défenseurs de la liberté d’expression se trouvent confrontés à la nécessité de transposer le concept d’un monde où vivent des individus égaux vers une société complexe et multiple avec une communication fortement médiatisée et des formes de pouvoir variées et diverses. Aborder cette situation exige un ensemble supplémentaire de concepts et d’instruments, qui sont au cœur du discours sur les « droits de la communication ».

Donner un cadre aux « droits de la communication »

On peut considérer les Droits à la Communication comme le fait d’offrir les conditions nécessaires au plein exercice de la liberté d’expression dans une société complexe et médiatisée dans laquelle le pouvoir et le contrôle des ressources sont distribués de manière très inégale. Si la liberté d’expression se trouve en effet au cœur des Droits de la Communication, ceux-ci visent au-delà à créer un environnement dans lequel la liberté d’expression pourrait être pleinement exercée au niveau de la société.

Les Droits de la Communication reposent sur l’action de communiquer, la réalisation d’une interaction entre personnes. Ils assurent que la liberté d’interagir avec d’autres consiste finalement à générer un cycle de communication, dont peuvent résulter l’apprentissage, la compréhension et la coopération. Une première approximation de l’objectif des droits de la communication peut donc se résumer de la manière suivante : assurer la création d’un cycle d’interaction réfléchi, créatif et respectueux entre les personnes et les groupes de la société, qui en pratique découle du droit de chacun à avoir de manière égale ses idées exprimées, entendues, écoutées, considérées et satisfaites.

Droits habilitants

Les Droits de la Communication reposent sur des aspects d’autres droits humains essentiels - des droits « d’accompagnement » ou « habilitants » - contenus dans la Charte Internationale des Droits de l’Homme et d’autres traités et documents juridiques. Il s’agit du :

- Droit de participer à sa propre culture, et d’utiliser sa propre langue maternelle, y compris pour les minorités ethniques, religieuses ou linguistiques ;

- Droit à l’information sur la gouvernance et les sujets d’intérêt public (liberté d’information) ;

- Droit à la protection des intérêts moraux et matériels des auteurs ;

- Droit au respect de l’honneur et de la réputation de chacun, et à la protection contre les attaques ;

- Droit au respect de la vie privée ;

- Droit de rassemblement et d’association pacifique ;

- Droit à une éducation primaire gratuite et à l’introduction progressive d’une éducation secondaire gratuite.

Un aspect de chacun de ces droits se retrouve de plus en plus dans le processus de communication au sein de la société (l’intitulé de chaque droit pourrait être suivi par « en relation avec les médias et la communication ») et on pourrait considérer les droits de la communication comme des droits « de niveau supérieur ». Toutefois, on y ajoute des dimensions plus spécifiques et parfois supplémentaires.

Par exemple : le droit à des médias divers et indépendants et à l’accès aux médias a été reconnu dans plusieurs lieux de débat aussi divers que la Cour Européenne des Droits de l’Homme, la Cour Suprême du Sri Lanka, la Cour Fédérale Constitutionnelle d’Allemagne, l’UNESCO et dans des Résolutions du Conseil de l’Union Européenne
La promotion des droits de la communication tente de lever des barrières sociales, historiques, économiques et psychologiques, pour favoriser la création d’un environnement de respect mutuel, et pour donner à chacun les capacités de communiquer et d’interagir.

La Valeur Ajoutée des droits de la communication
Cette interprétation des droits de la communication comporte un certain nombre d’implications.

Tout d’abord, l’ensemble des droits de la communication représente plus que la somme de leurs composants. Les droits de la communication regroupent des aspects pertinents issus d’un ensemble de droits habilitants, et ils ne peuvent se réaliser qu’à travers ceux-ci. Toutefois, les droits de la communication peuvent aussi être considérés comme des méta-droits, ce qui donne un sens nouveau et supplémentaire à ces droits habilitants.

Deuxièmement, la concrétisation des droits de la communication se traduit dans la pratique par la création d’un climat de respect mutuel et de tolérance pas uniquement entre les individus qui détiennent ces droits, mais aussi entre les différentes communautés et cultures, groupes ethniques et nationalités. Demander le respect des droits de la communication soutient et renforce en même temps la notion et la valeur de la diversité.

Troisièmement, les droits de la communication sous-entendent sans conteste des processus et la dynamique de la société. De par leur nature, les droits de la communication remettent en question le fait de savoir si les structures sociales limitent et favorisent de manière différente l’aptitude de différents individus et groupes à communiquer efficacement au sein des sociétés. Le concept des droits de la communication nous oblige à appliquer de manière beaucoup plus complète l’esprit de la « liberté d’expression » pour lever les contraintes subies par des pans entiers de la société, et encourager l’accès et les aptitudes de ceux qui sont exclus.

Droits de la communication : pourquoi maintenant?

Pourquoi les « droits de la communication » en tant que concept sont-ils plus pertinents aujourd’hui que par le passé? Comment, actuellement, se justifie un mouvement essayant de mettre en application et d’approfondir nos droits de la communication?
La pertinence des droits de la communication s’est particulièrement affirmée au cours des dernières décennies, à cause d’un certain nombre de facteurs et de tendances observés au niveau mondial dans la sphère de l’information et de la communication, dont :

- La prédominance des grands médias et la concentration des médias

- Les effets négatifs des systèmes médiatiques sur l’identité/les identités et la culture/les cultures

- L’émergence des régimes de copyright et l’érosion du domaine public des connaissances mondiales

- Les limitations des initiatives inspirées par le marché dans les télécommunications et les TIC

- L’érosion des droits civiques dans l’environnement numérique, particulièrement après le 11 septembre (par exemple, la mise en place de contraintes fortes, à l’échelle globale et dans tous les domaines, pour accentuer la surveillance électronique).

Le concept des droits de la communication nous permet d’analyser et de comprendre toutes ces inquiétudes, et de concevoir des solutions globales.

Ensemble, ces dynamiques influencent grandement chaque étape du processus de communication dans la société. Ces tendances dessinent les contours d’une communication sociétale et désignent ses bénéficiaires par le processus de contrôle sur la création et la propriété des connaissances. Des processus monopolisés par les médias de diffusion et de communication, qui les utilisent pour atteindre des objectifs politiques, économiques et sociaux.

Dans l’immédiat, on peut craindre que chaque étape du cycle ne finisse par être liée aux besoins du capital et du marché. Le danger ultime est que le cycle du processus de communication sociétale soit interrompu, que le processus d’apprentissage social s’affaiblisse, et finalement que le processus de créativité soit transformé et réduit à une production à court terme et non durable de profits destinés une petite minorité. La société se rendra alors compte qu’elle aura presque perdu sa capacité de créativité, de partage inclusif et équitable du savoir, de participation démocratique dans les structures politiques, d’expression culturelle et identitaire diversifiée, et même sa capacité d’apprendre des générations passées et futures.

Les « droits de la communication » en tant que concepts et pratiques, ont le souffle et la profondeur qui permettent d’analyser et de comprendre ces dangers, tout autant que de concevoir des solutions pour y répondre.

6 mars 2006

couverture du livre enjeux de mots Ce texte est extrait du livre Enjeux de mots : regards multiculturels sur les sociétés de l’information. Ce livre, coordonné par Alain Ambrosi, Valérie Peugeot et Daniel Pimienta a été publié le 5 novembre 2005 par C & F Éditions.

Le texte est sous licence Creative Commons paternité, pas d’utilisation commerciale.

La connaissance doit être offerte en libre-accès... Mais auteurs et éditeurs ont besoin d’une économie pour poursuive leur travail. Si vos moyens vous le permettent, n’hésitez pas à commander le livre en ligne (39 €)

Vendredi 23 mars2007 à 14.00 à l’UMLV-IFIS

Mots clés : conduite de projet – réseaux – technologies – travail collaboratif

Intervenants :Aurélie Nicolas, Anthony Delvigne, Guillaume Fabre,Benjamin Clavreul

Discutants :
- Christophe Freihuber, Développeur chez Pixmania, Créateur de la plateforme collaborative www.cyber-espace.net ;
- Arnaud Fontanes, Consultant senior, Associé chez Ethikonsulting, Spécialisé dans l’assistance à maîtrise d’ouvrage SIRH, dans la conduite du changement et l’animation d’équipe ;
- Patricia Rougeaux, chargée de mission TIC - Mairie de croissy /seine.

Si vous souhaitez y participer, envoyez vos coordonnées (nom, prénom, e-mail) à communication_mitic@yahoo.fr

Pour plus d’information, n’hésitez pas à consulter notre blog : http://mitic2006collter.over-blog.com/