18 - Du design ouvert aux fabrications coopératives

Cet article est la reprise d’un texte publié par we_magazine (http://www.we-magazine.net/) sous le titre The emergence of open design and open manufacturing. Traduit de l’anglais par Valérie Peugeot

Les lecteurs de cet ouvrage sont sans doute familiers avec cette nouvelle forme de création de valeur en plein essor qu’en anglais nous nommons peer production, et que l’on peut traduire au mieux par production coopérative. Yochaï Benkler a été le premier à la définir comme un mode de production dans lequel des bénévoles, mais aussi lorsque le projet réussit des créateurs et programmeurs salariés, créent des « contenus (ouverts) » ou des « logiciels (libres) », dont l’accès et l’usage sont ouverts à tous. Caractéristiques de la production coopérative, le « producteur » « produit » – deux termes trompeurs dans ce contexte – un bien commun qui peut être utilisé et modifié par d’autres, qui en retour le reversent au pot commun sous une forme améliorée. Ces producteurs peuvent être des auteurs ou programmeurs, aussi bien volontaires que salariés, voire souvent les deux. Le plus souvent ils s’inscrivent dans une écologie des communs, travaillant autant avec des communautés qu’avec des entreprises, ces dernières étant susceptibles de créer des spin-offs à partir de ces mêmes biens communs ; exemple typique, GNU-Linux et ses dérivés ont généré une activité économique de 36 milliards de dollars.

Il est assez tentant de limiter ce phénomène au monde de la production « immatérielle ». Cependant nous aimerions démontrer dans cet article que la même méthode de production qui aujourd’hui domine le monde du logiciel open source et des contenus en accès libre sur internet (souvent autoproduits), influence désormais en profondeur notre manière de concevoir, de designer, voire même de fabriquer des objets.

Avant d’entrer dans la description de ce phénomène en émergence, quelques définitions et explications sur la pertinence de la production coopérative s’imposent.

Internet, infrastructure de la production coopérative

Avant l’arrivée d’internet, aujourd’hui utilisé par plus d’un milliard d’êtres humains, il existait déjà trois manières de concevoir la production. La première correspond au modèle aujourd’hui quasiment disparu du système étatique, incarné par le régime soviétique, dans lequel les ressources productives appartenaient à l’État, ce dernier organisant tant la production que l’allocation des ressources via une planification centralisée. Le second est bien entendu le capitalisme de marché, dans lequel les moyens de productions sont privés, les entreprises organisées sur un mode hiérarchique, et les ressources allouées en fonction des signaux qui émanent des prix du marché. Si le profit attendu est suffisamment intéressant, les entreprises alloueront les ressources et embaucheront les équipes nécessaires. La troisième forme, marginale, est la production sous forme d’entreprises de statut coopératif, au sein de laquelle les salariés et ses autres membres sont propriétaires collectivement du capital, et disposent d’un processus de décision interne plus démocratique. Néanmoins ces entreprises coopératives se retrouvent sur le marché comme n’importe quelle autre entreprise et sont donc soumises aux mêmes dynamiques externes. Dans le contexte qui est le nôtre, je considère dans la suite de l’article que ces entreprises de statut coopératif ne constituent pas un mode de production autonome, mais plutôt une variante du marché.

Au contraire la production peer to peer, ou coopérative, constitue une nouvelle forme de production à part entière, construite autour de ce que j’appelle de la création de valeur sans autorisation et autogérée.

Cette production se divise en trois étapes différentes :

— Du côté des intrants, nous trouvons des contributeurs bénévoles, qui n’ont pas à demander une quelconque permission pour participer et utilisent des matériaux ouverts et libres, dégagés de tout droit d’auteur et donc librement améliorables et modifiables. Lorsque de tels matériaux bruts, libres et ouverts, ne sont pas disponibles, la production coopérative demeure possible grâce à de nouvelles créations ouvertes ;

— Les processus quant à eux s’appuient sur une conception inclusive, que permettent des seuils de participation peu élevés, des tâches modulaires librement éligibles plutôt que des emplois fonctionnels, et une validation partagée de la qualité des alternatives (ce que j’intitule « la gouvernance des pairs ») ;

— Quant aux outputs, ce mode de production crée un bien commun, en mobilisant une licence qui sécurise un accès pour tous à la valeur qui en résulte, là encore sans permission. Cette production en bien commun va à son tour recréer une nouvelle couche de matériau ouvert et libre qui peut être mobilisée pour une nouvelle itération.

Des déclinaisons parcellaires de ce modèle sont envisageables. Ainsi des contributeurs peuvent être rémunérés, voire travailler pour des entreprises hiérarchisées, tout en plaçant le résultat de leur travail en bien commun, ce qui le rend disponible pour de futures améliorations coopératives. En réalité, c’est là le modèle dominant pour GNU-Linux et de nombreux projets de logiciels libres et ouverts, les trois-quarts environ des développeurs étant par ailleurs salariés d’entreprises.

Ce modèle de production fonctionne grâce à la réunion d’un certain nombre de conditions techniques autour de la production immatérielle. Pour commencer, les travailleurs de la connaissance d’aujourd’hui, à la différence des travailleurs à l’usine, sont propriétaires ou pour le moins contrôlent leurs propres moyens de production, à savoir leur cerveau, leur ordinateur, et l’accès à ce gigantesque réseau social que constitue l’internet. Ce faisant, ils se retrouvent en capacité de contribuer à ce mode de production sur une base volontaire. Par ailleurs, parce que les contenus et les logiciels peuvent être reproduits numériquement à un coût marginal infime une fois la première production effectuée, ils peuvent, grâce à la copie numérique, devenir universellement accessibles. Dès lors ces ressources ne sont plus rares et se retrouvent naturellement en dehors de la loi de l’offre et de la demande constitutive du marché. Toujours grâce à l’internet, il est désormais possible à l’échelle mondiale, de coordonner à bas coût une multitude d’individus et de petits groupes, en se passant d’un commandement centralisé et de hiérarchies de contrôle.

Il n’est pas difficile de comprendre en quoi un tel modèle de production est hautement efficace. Les modes de production précapitalistes étaient essentiellement coercitifs (esclavage, servage…) et appelaient impérativement un énorme appareil de contrôle. Que ce soit en termes de motivation ou d’innovation, ces processus construits sur la peur étaient particulièrement nuisibles, semant un fatalisme généralisé dans ces civilisations. Le capitalisme au contraire, en s’appuyant sur l’intérêt personnel et un échange de valeur, stimule une motivation positive, autour du retour attendu. Cependant, dès que ce retour sur investissement n’est pas effectif, la motivation disparaît. L’innovation dans un système tiré par le profit ne peut être que relative ; elle est stimulée par le besoin de dépasser les concurrents, mais chancelle dès qu’une situation monopolistique s’installe. Au bout du compte, les acteurs du marché ne prennent en compte que leur propre intérêt et sont structurellement incapables d’intégrer des facteurs externes. Autrement dit l’objectif du marché n’est ni l’innovation en tant que telle, ni la réalisation du meilleur produit possible. De fait dans les grandes entreprises, on constate qu’une énergie phénoménale est affectée à la réalisation de produits qui sont en dessous de leur optimum. Ainsi en va-t-il des logiciels propriétaires ou à code fermé pour lesquels il est interdit d’améliorer le produit !

Le contraste avec les dynamiques qui sont à l’œuvre dans la production coopérative est total. Celle-ci s’appuie sur des individus passionnés ; les communautés ouvertes sont perpétuellement à la recherche de la qualité absolue et de l’innovation radicale, et non pas seulement relatives. L’objectif du navigateur Firefox par exemple, est de disposer du meilleur navigateur possible sur la base d’un processus d’amélioration permanent ; et parce qu’il s’agit d’un logiciel non propriétaire, qui que ce soit peut l’enrichir en y ajoutant toute une variété de plugs-in.

Cependant, dans la pratique, la plupart des productions coopératives se marient à une écologie d’affaires. Il n’est pas très difficile de comprendre pourquoi. Les communautés ont besoin de financer des infrastructures élémentaires, même à des coûts minimum. De plus, même si les communautés se perpétuent tant que de nouveaux membres la rejoignent au fur et à mesure que d’autres la quittent, la contribution gracieuse à un projet de bien commun n’est pas durable à long terme. Dans la pratique, la plupart des projets coopératifs suivent la règle des « 1-10-99 » : 1 % des membres constitue le noyau de personnes véritablement impliqués. Si ce 1 % n’arrive pas à trouver les financements de son travail, le projet risque de ne pas survivre. Au bout du compte, ces personnes doivent être en capacité de faire l’aller-retour entre bien commun et marché, pour que leur engagement puisse être durable.

Des individus qui coopèrent aux communs peuvent être payés pour leur travail lorsqu’ils développent la première itération de connaissance ou de logiciel pour répondre au besoin d’une entreprise privée, alors même que le résultat de leur travail sera reversé en bien commun. Enfin, même si le bien commun initial est d’accès livre et ouvert, de nombreux services à valeur ajoutée peuvent néanmoins être commercialisés sur le marché. De cette manière, c’est une véritable écologie coopérative qui se met en place. Ainsi dans le champ de l’open source, on trouve typiquement des entreprises qui ont une double stratégie de licence. Non seulement elles commercialisent les produits dérivés du logiciel comme les formations, le consulting, l’intégration, etc., mais encore elles commercialisent une version enrichie du logiciel à usage professionnel, indisponible pour les clients qui ne payent pas. La règle dans ce cas est que 10 % des clients payent pour la mise à disposition du bien commun aux 90 % autres. Un tel modèle repose également sur ce qu’on appelle des pratiques de « partage de bénéfices », dans lesquelles des entreprises open source contribuent à l’infrastructure générale de la coopération qui sera utilisée par les différentes communautés concernées.

Maintenant que nous savons que le monde du logiciel libre a réussi à créer une économie viable composée d’entreprises open source, se pose une autre question essentielle : ce modèle peut-il être transposé, tel quel ou moyennant des adaptations, à la production de biens matériels ?

L’élargissement de la production coopérative au monde matériel

Pour comprendre ces dynamiques et les différences existant entre monde matériel et immatériel, les règles suivantes doivent être prises en compte :

— Pour tout projet immatériel, tant qu’une infrastructure générale de coopération existe et que des intrants libres et ouverts sont disponibles ou susceptibles d’être créés, alors les travailleurs de la connaissance sont en mesure d’œuvrer ensemble à un projet commun.

— Cependant, pour produire des biens physiques, le besoin en injection de capital appelle nécessairement des coûts, qui eux-mêmes impliquent une logique de récupération de cet investissement. En effet, ces biens sont par définition des biens rivaux, ce qui veut dire qu’une fois en possession d’un individu, ils deviennent difficiles à partager ; et une fois utilisés, ils doivent être reconstitués.

En raison de ces différences essentielles, on comprend aisément pourquoi les mêmes processus ne peuvent pas s’appliquer de la même manière à la production de biens matériels et immatériels.

Pour autant, et c’est là un point essentiel, toute chose qui a besoin d’être produite a d’abord besoin d’être conçue. Et la conception d’un objet physique, qu’il s’agisse d’une voiture, d’un toit solaire ou d’un panneau de contrôle électrique, est toujours un processus immatériel appuyé sur des logiciels et dépendant de la « collaboration de cerveaux ». Aussi la première idée qui vient à l’esprit est la possible collaboration entre des communautés de design ouvert d’un côté et des « usines » de production de l’autre. De fait, c’est ce qui est en train d’arriver et d’émerger à une échelle mondiale. Sur le wiki de la P2P Foundation, j’ai documenté cette question dans la rubrique dédiée intitulée Open Design [1]. Vous y trouverez également un répertoire complet de projets de ce type dans la rubrique dédiée au hacking d’objets [2]. Eric von Hippel, dans son livre de référence Democratizing innovation [3] a documenté des nombreux exemples de telles coopérations, dans différents secteurs du monde industriel, en particulier dans le monde des sports extrêmes, où le plus souvent des bricoleurs bénévoles combinent leurs compétences à celles d’ateliers de production industriels.

Néanmoins il nous faut reconnaître que pour arriver à cela, nous sommes confrontés à des difficultés de taille. Pour commencer, les rétroactions entre conception et production sont beaucoup plus nombreuses, puisque les produits matériels doivent être testés dans le monde physique. De plus les outils mobilisés sont différents : des outils de design 3D comme CAD/Cam doivent être disponibles, la vidéo doit être utilisée pour montrer les détails pratiques de l’utilisation de l’objet, et la collaboration distante en temps réel doit être intense. Mais difficile ne signifie pas impossible !

L’autre grande différence tient au capital requis pour une mise en place et une production physiques. Les communautés de design ouvert sont obligées de nouer des liens étroits avec les acteurs du marché. À quoi sert de concevoir une voiture open source si personne n’est disposé à la produire ?

Mais j’espère que les lecteurs vont intuitivement comprendre la portée et la signification de cette approche, pour les mêmes raisons qui font la force du logiciel libre et de la connaissance ouverte : les produits physiques peuvent être ainsi améliorés par tout un chacun, pas uniquement par des employés salariés, et ces contributeurs externes n’ont aucune raison de concevoir des produits en dessous de leur optimum, c’est-à-dire moins bons que ce qu’ils pourraient être.

Néanmoins, pour que cette transformation puisse se mettre en place, il est indispensable de concevoir la production matérielle de façon bien plus modulaire qu’elle ne l’est actuellement. C’est l’approche qu’a choisie Bug Labs par exemple, en proposant un terminal électronique qui se compose de modules, chaque « client » pouvant choisir ceux qu’il ou elle veut assembler. Aussi, plutôt que d’imaginer une communauté de designers travaillant avec une entreprise donnée, comme cela se pratique dans de nombreux projets de co-design et de co-création, imaginons plutôt une communauté mondiale de bricoleurs, mais également une communauté mondiale de lieux de production physique, susceptibles de télécharger les plans et les concepts de design et de les produire de façon locale.

Pour pouvoir réussir une telle mutation dans notre conception de la fabrication d’objets, nous avons besoin de redessiner l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. Et aussi improbable que cela puisse paraître, c’est déjà en train de se mettre en place.

Souvenez-vous que la production coopérative exige que les producteurs puissent se regrouper autour de projets communs. Dans le monde physique, cela implique d’arriver à une telle miniaturisation et distribution des capitaux matériels et financiers que les producteurs soient également susceptibles de se regrouper et de dire « allons-y, produisons ceci, voici mon petit morceau de capital ».

La diffusion de la fabrication ouverte

La fabrication est soumise aux mêmes processus de miniaturisation que ceux qu’ont connus les ordinateurs. Observons les tendances suivantes :

L’usinage commandé par mail permet de concevoir son propre produit et de se le faire livrer à domicile par une entreprise. L’usine de salon permet non seulement de concevoir sur son ordinateur, mais aussi de réaliser soi-même son propre produit, une opération rendue possible par le développement d’imprimantes 3D, grâce auxquelles des objets en plastique peuvent être produits à un coût en baisse permanente. L’industrie elle-même utilise de plus en plus des techniques de fabrication chaque fois plus rapides et flexibles, ce qui implique une approche radicalement différente de la machine elle-même : celle-ci n’est plus hyper spécialisée, à fort investissement capitalistique, et donc centralisée ; il s’agit plutôt de machines à vocation universelle susceptibles de s’adapter rapidement et à moindre coût à de nouveaux besoins et des nouvelles méthodes. Au fur et à mesure que de telles machines verront leur taille comme leur prix se réduire et qu’elles seront plus largement diffusées, leur disponibilité pour une production locale augmentera de façon radicale. La fabrication personnalisée, telle qu’on la voit se développer au sein de la communauté des Fab Labs [4] et autour de la RepRap [5], constitue actuellement la forme la plus aboutie d’une telle méthode.

Ces tendances font l’objet d’un suivi par la P2P Foundation et les observations sont publiées sur son site web [6].

Finançons en mode coopératif la nouvelle production

On constate que le même type d’innovation se met en place autour du capital financier. Après la crise de la dette, on voit émerger un mouvement favorable à un accès distribué aux moyens de financement. Le prêt socialisé, qui permet aux individus de se prêter de l’argent les uns aux autres, constitue bien entendu l’une des manifestations de ce mouvement. La renaissance des monnaies complémentaires, appuyées sur du crédit mutualisé, en constitue une autre. Le crédit est alors généré par les participants eux-mêmes, sans dépendre de la relative rareté de la monnaie « officielle », et en s’affranchissant des banques centrales. Ces monnaies complémentaires permettent aussi de maintenir les flux financiers au sein des communautés locales.

Au final, nous nous retrouvons avec le tableau suivant : des outils de production moins chers couplés à des financements coopératifs et de l’argent coopératif nous permettent de concevoir une production matérielle au plus près du besoin. Cette relocalisation potentielle n’est pas régressive pour autant, puisqu’elle inclut un haut niveau de technicité, et ne génère pas de l’isolement, puisqu’elle dépend dans un même temps d’un bricolage mondialisé et de communautés de design ouvert qui travaillent à l’échelle planétaire.

Nous commençons à dégager ainsi une vue d’ensemble. Nous disposons déjà d’une infrastructure technologique et médiatique coopérative. Des modèles d’organisations autour de la connaissance, du logiciel et du design basés sur une collaboration ouverte se mettent en place. L’accès à des machines distribuées ne cesse d’augmenter, nous permettant de concevoir des productions localisées de ces designs ouverts. Les exigences en capital sont bien moins fortes, et lorsque des besoins financiers s’imposent pour le retour sur investissement de la production matérielle, nous pouvons accéder à des capitaux distribués à travers le crédit mutualisé et le prêt socialisé. Aucune de ces tendances n’est encore pleinement réalité. Et bien qu’elles puissent théoriquement ne pas se confirmer, les preuves de leur évolution dans ces directions s’accumulent. Je vous invite à constater par vous-même ces développements dans nos rubriques consacrées à la « Fabrication Ouverte » [7] et à l’« Argent Ouvert » [8].

L’énergie distribuée

De quoi d’autre avons-nous besoin ? Et bien il n’est pas difficile de deviner quelle est la pièce manquante, c’est bien entendu un réseau énergétique coopératif !

Les justifications en faveur d’une énergie distribuée sont assez évidentes : en fournissant aux gens les outils pour générer de l’énergie renouvelable, on crée les conditions de leur indépendance à l’égard de services centralisés et on fournit les moyens de soutenir une production plus localisée, ce qui nous parait un point essentiel dans le contexte de cet article. Le surplus d’énergie peut être donné, échangé ou vendu, produisant ainsi un bénéfice secondaire pour ceux d’entre nous qui utilisent manifestement moins d’énergie et qui recevront ainsi un revenu de la part de ceux qui en consomment plus.

Les questions énergétiques et écologiques sont suivies par la P2P Foundation dans la rubrique écologie. [9]

En conclusion

J’espère que les lecteurs de ce panorama disposent à présent des éléments nécessaires pour comprendre comment dessiner un monde coopératif. Celui-ci serait constitué de connaissances ouvertes, de communautés de logiciel et de design dont les membres seraient connectés à des entités productrices (entreprises ou sociétés de statut coopératif), susceptibles de financer leurs membres directement, mais également capables de soutenir les infrastructures de coopération des biens communs dont ils dépendent, pratiquant ainsi le « partage de bénéfices » de manière à ce que ces derniers puissent revenir vers les communautés de design ouvert. Les entités de production seraient plus en capacité de produire localement, en ayant recours au réseau énergétique distribué et en utilisant la monnaie coopérative pour les échanges de biens rivaux, pendant que les biens immatériels et culturels seraient échangés librement et partagés par l’ensemble de l’humanité.

Tout ceci n’est pas une utopie, mais constitue les conditions mêmes de la survie de notre planète. En effet, notre comportement est inconséquent sur deux points essentiels :

— Nous croyons que la nature est infinie, ce qui est faux, et dès lors nous vivons dans l’illusion d’une pseudo-abondance qui conduit à la destruction de la planète ;

— Nous pensons qu’une rareté artificielle doit être appliquée aux biens intellectuels et culturels, restreignant ainsi le partage des innovations.

Si nous arrivons à dépasser ces deux erreurs, en reconnaissant tout à la fois la réelle rareté des biens matériels et la réelle abondance des biens immatériels, nous verrons émerger une nouvelle civilisation durable, bâtie sur les principes de la coopération.

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Michel Bauwens est un auteur prolifique, un chercheur et un conférencier sur les domaines de l’innovation ouverte. Il est fondateur de la Foundation for Peer-to-Peer Alternatives (http://p2pfoundation.net/) et du Commons Strategies Group.

Il a été analyste et responsable de la gestion des connaissances pour United States Information Agency, British Petroleum ou Belgacom. Il a créé Wave, la première revue européenne consacrée à l’internet, et réalisé avec Frank Theys le documentaire télé Technocalyps

Michel Bauwens vit actuellement en Thaïlande, participant au développement du Asian Foresight Institute, et enseignant dans diverses universités (Payap University, CMU, et Dhurakij Pandit University’s International College).

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[1] http://p2pfoundation.net/Category:Design

[2] http://p2pfoundation.net/Product_Hacking

[3] Democratizing innovation, Eric Von Hippel, The MIT Press, avril 2005, 216p. (ISBN : 978-0262002745)

[4] La notion de Fab lab (contraction de fabrication et laboratory) désigne tout type d’atelier composé de machines-outils pilotées par ordinateur et nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) et pouvant fabriquer rapidement et à la demande des biens de nature variée (vêtements, livres, objets décoratifs, etc.). (http://fr.wikipedia.org/wiki/Fab_lab)

[5] RepRap est une imprimante de bureau 3D libre capable d’imprimer des objets en plastique. Comme la plupart des pièces de la RepRap sont en plastique et que la RepRap peut les imprimer, RepRap peut être considérée comme autoréplicable (http://reprap.org/wiki/RepRap_en_fr...)

[6] http://p2pfoundation.net/Category:M...

[7] http://p2pfoundation.net/Category:M...

[8] http://p2pfoundation.net/Category:Money

[9] http://p2pfoundation.net/Category:E...

Posté le 2 mai 2011

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