Vecam http://www.vecam.org/ Réflexion et action pour l'internet citoyen fr SPIP - www.spip.net Vecam http://vecam.org/local/cache-vignettes/L144xH41/siteon0-dd267.png http://www.vecam.org/ 41 144 La facilitation d'un forum de discussion dédié à une catastrophe naturelle http://vecam.org/article1175.html http://vecam.org/article1175.html 2010-03-23T15:55:23Z text/html fr Claire Brossaud Appropriation des outils vecam-F Revue-reseau-TIC i-jumelage Introduction Cet article présente un processus de facilitation au sein d'un forum de discussion portant sur une catastrophe naturelle qui s'est déroulée à Bourg-en-Bresse les 15, 16 et 17 avril 2005. Au cours de ces trois jours, pluies et neige en abondance touchent fortement l'Est de la France, le long d'une ligne allant des Vosges à la Haute-Loire : routes coupées, hébergements d'urgence d'automobiliste, 50 000 foyers privés d'électricité en Rhône-Alpes et Franche Comté. Le dimanche 16 avril au (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique124.html" rel="directory">Les figures de la facilitation de la coopération avec les TIC</a> / <a href="http://vecam.org/mot40.html" rel="tag">Appropriation des outils</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot68.html" rel="tag">Revue-reseau-TIC</a>, <a href="http://vecam.org/mot75.html" rel="tag">i-jumelage</a> <div class='rss_texte'><h3 class="spip"> Introduction</h3> <p>Cet article présente un processus de facilitation au sein d'un forum de discussion portant sur une catastrophe naturelle qui s'est déroulée à Bourg-en-Bresse les 15, 16 et 17 avril 2005 [<a href='#nb1' class='spip_note' rel='footnote' title='Cet article s'appuie sur une recherche-action réalisée par un laboratoire de (...)' id='nh1'>1</a>]. Au cours de ces trois jours, pluies et neige en abondance touchent fortement l'Est de la France, le long d'une ligne allant des Vosges à la Haute-Loire : routes coupées, hébergements d'urgence d'automobiliste, 50 000 foyers privés d'électricité en Rhône-Alpes et Franche Comté. Le dimanche 16 avril au matin, 84 résidents d'une maison de retraite située dans le quartier des Baudières sont évacués. Trente familles d'un immeuble sont également relogées et 38 propriétés sont touchées directement par les inondations. La décrue intervient dès le 17 avril. À l'occasion de cette catastrophe, notre équipe d'étude installe un forum de discussion sur un site Internet baptisé Technorisque pour savoir comment ceux qui sont concernés par l'événement s'approprient les technologies de l'information et de la communication en pareille situation.</p> <p>Le site a existé de l'automne 2003 à novembre 2008. La mise en place de ce forum a permis de constater que la catastrophe fut « apprivoisée » par les habitants de Bourg-en-Bresse grâce à trois figures emblématiques de la facilitation, que nous allons décrire successivement. Le rôle du « facilitateur-modérateur », tout d'abord, porte sur les conditions d'existence opérationnelles du forum de discussion que nous avons mises en place. Nous verrons ensuite que la facilitation s'appuie également sur une reconnaissance de la complexité du phénomène « catastrophe naturelle », ce qui nous conduira à dégager la figure d'un « facilitateur-passeur ». Nous nous situons ici au niveau du contenu des échanges sur le site. Enfin, la facilitation se révélera, à travers le modèle du « facilitateur-animateur », comme une façon d'organiser et d'orienter la discussion selon des tâches et des rôles dévolus à chacun des participants. L'aspect fonctionnel des interactions sera alors davantage pris en compte.</p> <h3 class="spip">La figure du « facilitateur-modérateur » : stimuler la participation des acteurs</h3> <p>La fonction de modération, à dissocier de celle de webmestre, peut être assimilée à la facilitation lorsqu'elle consiste à s'occuper des conditions d'accès matérielles de la communication - les aspects physiques et techniques de la transmission des messages sur un forum de discussion par exemple – et qu'elle fait appel à une médiation humaine.</p> <p>Jusqu'à ce que nous allions à Bourg-en-Bresse en avril 2005, le site Technorisque était un site d'information comme beaucoup d'autres. Il donnait accès à l'ensemble de l'étude et possédait des rubriques dédiées à d'autres événements qui s'étaient déroulés plusieurs années auparavant. L'installation par nous-mêmes, auteurs, du forum de discussion a créé les conditions préalables à l'échange entre les participants : en « fabriquant » l'outil, nous avons donné aux usagers la possibilité de s'en emparer pour communiquer. Mais, si la possibilité d'accès à l'outil technique est indispensable, elle ne garantit pas pour autant son appropriation. D'autres facteurs sont intervenus en effet dans la participation des membres de la petite communauté.</p> <p>D'une part, le site a fonctionné de manière synchrone avec les événements à Bourg-en-Bresse. L'actualité et le lien avec des événements qui concernent directement les personnes est un facteur d'entraînement. La réactivité du modérateur s'est avérée un élément déterminant de la facilitation. Et, sur un sujet comme les catastrophes naturelles, la participation des acteurs est d'autant plus importante que l'outil technique permet cette réactivité [<a href='#nb2' class='spip_note' rel='footnote' title='C'est d'ailleurs pourquoi, dans des situations extrêmes comme celle-ci, la (...)' id='nh2'>2</a>].</p> <p>D'autre part, les conditions d'accès technique (et non plus seulement physique) au forum ont influé aussi sur le processus de facilitation. Le travail du modérateur consista à sélectionner et à préparer les supports de l'interaction, à faire comprendre les ressorts techniques et organisationnels de la technologie employée, à créer un confort avec les outils utilisés, puis à en assurer enfin la promotion. Nos messages ont consisté principalement à cadrer ou à recadrer la discussion autour du sujet des intempéries, à encourager le dialogue, à préciser les implications des partenaires interpellés dans la discussion (celui de la mairie de Bourg-en-Bresse et le nôtre en particulier) et à donner des conseils pratiques en informatique (une personne nous a notamment demandé comment insérer des photos en ligne).Quant au fait d'interpeller l'opinion sur l'existence du forum, cela a pu se faire dès le 18 avril grâce à des démarches de notre équipe auprès des journaux et radios de Bourg-en-Bresse et à l'accrochage de petites affichettes dans des endroits stratégiques de la ville (immeubles touchés par les inondations, commerçants, lieux publics, etc.). Une fois l'accès à l'outil effectué, la navigation, l'arborescence, la qualité de l'interface, les procédures d'inscriptions ont représenté également des éléments essentiels du processus de facilitation.</p> <p>La facilitation, lorsqu'elle est outillée par un support numérique, est soumise à une contrainte forte qui est liée à la nature du dispositif technique. Les travaux récents sur les communautés en ligne ont montré qu'un site ou un forum résiste d'autant mieux à l'usure qu'il dispose d'une modération continue et régulière. Il en va de même pour l'expérimentation relatée ici.</p> <h3 class="spip">La figure du « facilitateur-passeur » : aider à définir un espace réflexif pour les acteurs</h3> <p>L'accès au forum de discussion a pris le relais des médias traditionnels auprès d'une population invisible, qui ne s'était pas encore exprimée dans la ville. La première vocation du forum a donc consisté à permettre cette expression. Quelqu'un est même venu pour « se lâcher » selon les termes d'un participant au forum ; un autre a cru au complot dans l'imputation des causes aux intempéries ; il faut que la parole se libère ! précise encore l'un d'entre eux. Nous retrouvons ici la vocation des cellules de prises en charge psychologique dans les situations de crise, qui permettent d'apprivoiser le drame et d'exprimer sa douleur et sa colère. À Bourg-en-Bresse, l'intensité de la détresse est certes moins présente que pour d'autres catastrophes naturelles plus tragiques, mais elle reste néanmoins significative. Le fait de s'exprimer librement, de façon plus ou moins exutoire, est nécessaire mais non suffisant pour être assimilé totalement à la facilitation.</p> <p>La progression de la discussion atteste en effet que les internautes peuvent dépasser peu à peu leur statut de victime à condition de devenir des producteurs de savoir. Les participants ont cherché à accueillir des assistances techniques liées à la modération mais aussi et surtout des collaborations et des demandes d'information sur des thèmes concernant la catastrophe. Deux individus ont été très enclins à assumer cette posture, mais l'un d'entre eux, un ancien ingénieur dont les parents étaient férus d'histoire locale, possédait vraiment une connaissance de la catastrophe dans sa « physicalité » et sa localité : il connaissait par exemple le rôle précis des vannages dans la circulation des eaux fluviales, les taux de pluviométrie récents, les zones historiquement inondées, etc. Il était capable d'identifier des acteurs ou des éléments hétérogènes du sinistre en les mettant en relation les uns avec les autres. Il distillait ainsi ses connaissances à chaque fois qu'une incompréhension se présentait sur la catastrophe. « Facilitateur-passeur », il décodait les enjeux portés par la complexité des inondations tout en anticipant les tensions et les désaccords potentiels autour de l'événement. Il était agile pour faire le lien entre des points de vue éventuellement antagonistes et pour aider à définir un espace réflexif entre les différents acteurs concernés par le risque et sa prévention.</p> <p>Ce facilitateur-là est un « passeur en généralité ». Ainsi, le débat s'est enrichi de procédés argumentatifs que l'on retrouve dans la plupart des systèmes de délibération publique. L'événement, de par sa prise en charge collective, est devenu moins marqué par la détresse, le ressenti et la subjectivité.</p> <h3 class="spip">Le « facilitateur-animateur » : organisation du cadre social de la rencontre</h3> <p>La facilitation s'est donnée à voir enfin dans les rôles tenus par les participants sur le forum. Ainsi, la facilitation est apparue plus aisée si l'un des membres du groupe endossait le rôle d'animateur. Au sein du forum, on a pu voir par exemple comment chaque partenaire impliqué dans la catastrophe, présent ou absent de la discussion (sinistrés, experts, institutions, etc.), a été apostrophé. On a pu également regarder comment ceux qui assument cette fonction d'animateur, principalement les deux personnes qui étaient aussi des « passeurs », détectent les problèmes et les globalisent. Les participants au forum se plaignaient par exemple de l'irresponsabilité du maire de Bourg-en-Bresse dans le système d'alarme des pompiers au plus fort de la crue. « L'animateur » a surfé sur Internet pour trouver les obligations du premier magistrat de la ville, qui était en outre une bonne connaissance :<i> J'ai cherché sur Internet, comme j'ai le temps, je suis chez moi. Et donc j'ai envoyé cette information qui collait bien à la réalité. Les gens se plaignaient qu'ils n'avaient pas été prévenus, le maire n'avait pas fait ceci-cela… Le maire a pour obligation de prévenir le syndic. Il ne faut pas tout mettre sur le dos du Maire, il ne peut pas aller sonner à toutes les portes hein. Et bien là, j'ai envoyé les obligations du Maire</i> (extrait d'entretien). « Le facilitateur-animateur » a défini ainsi qui participe à l'histoire racontée sur le forum, ainsi que les lieux virtuels et/ou réels où elle se déroule.</p> <p>Le « facilitateur-animateur » gère et programme aussi les temps de la rencontre en définissant éventuellement les lieux, horaires et fréquences des échanges. Sur le forum du site Technorisque, le plus actif de la discussion fut le seul à poster un message signalant qu'il serait absent pendant quinze jours. Le « facilitateur-animateur » orchestre enfin la discussion en étant à l'écoute, en clarifiant les points de vue et la place de chacun (un participant fut défini après coup par celui qui s'est improvisé « animateur » comme étant un parasite sur le forum de discussion) et en montrant une relative neutralité dans ses prises de position. C'est aussi celui qui a responsabilisé le groupe par rapport à l'atteinte de ses objectifs et qui s'est assuré que le collectif continuait de travailler sur la bonne voie. L'équipe support de l'étude a tenu par moment ce rôle d'animation.</p> <p>D'une manière générale, l'animateur accompagne l'échange en étant souvent interpellé comme le « référent » ou le « garant » de la discussion. Il gère les incompréhensions ou les conflits, il aide à la relance des échanges et représente bien un interlocuteur privilégié aux yeux des autres participants. Il se soucie enfin souvent de laisser une trace des débats sur un support de communication.</p> <h3 class="spip"> Conclusion</h3> <p>Au terme de cet article, la facilitation, lorsqu'elle est outillée numériquement, apparaît sous l'angle de trois figures principale. Le « facilitateur-modérateur » est celui qui permet aux échanges de se dérouler et de se réguler au plan technique. Il met en place le dispositif technologique, le situe dans un cadre organisationnel et formule les règles de son bon fonctionnement. Le « facilitateur-passeur » organise quant à lui le contenu des échanges. Il joue un rôle d'expert sur un sujet donné en le situant systématique dans un environnement (social, économique, technologique, etc.) complexe. Il sait mettre en relation les différents éléments d'un système, et ils les portent à la connaissance des autres. Enfin, le « facilitateur-animateur » est celui qui permet aux échanges de fonctionner au sein d'une dynamique de groupe. Il organise non plus le cadre technique de la rencontre mais sa régulation sociale dans un collectif. Il est le garant des objectifs visés par les échanges et il donne à ce collectif les moyens d'y parvenir.</p> <p>Dans tous les cas, le processus de facilitation apparaît comme une façon de faire advenir des échanges sociaux outillés par la technique dans une perspective collaborative ou participative.</p></div> <hr /> <div class='rss_notes'><p>[<a href='#nh1' id='nb1' class='spip_note' title='Notes 1' rev='footnote'>1</a>] Cet article s'appuie sur une recherche-action réalisée par un laboratoire de recherche du CNRS pour le compte du Ministère de l'environnement et du développement durable en 2005. Claire Brossaud (coord.), Alain Milon (dir.), Virginie Tournay, Marion Feigenbaum, « Production et circulation de quelques usages numériques en situation de catastrophes naturelles : <a href="http://www.technorisque.net »/" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>http://www.technorisque.net »</a>, GRASS-CNRS, Ministère de l'environnement et du développement durable, 2005. Voir aussi Claire Brossaud, « Usages des TIC et rapports à l'incertitude en situation de catastrophes naturelles », Développement durable et territoires, Dossier 11 : Catastrophes et Territoires, mis en ligne le 06 novembre 2008. URL : <a href="http://developpementdurable.revues.org/index6772.html" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>http://developpementdurable.revues....</a>.</p> <p>[<a href='#nh2' id='nb2' class='spip_note' title='Notes 2' rev='footnote'>2</a>] C'est d'ailleurs pourquoi, dans des situations extrêmes comme celle-ci, la radio ou la radio-fréquence est souvent utilisée par les autorités, car elle représente un média très réactif.</p></div> Facilitation http://vecam.org/article1176.html http://vecam.org/article1176.html 2010-03-23T15:55:19Z text/html fr Andrew Feenberg et Cindy Xin Appropriation des outils vecam-F Revue-reseau-TIC i-jumelage Article original en anglais La facilitation est l'art du leadership dans la communication de groupe. Un facilitateur est une personne qui remplit ce rôle de leadership. Dans les milieux en ligne, ces termes sont souvent employés de manière interchangeable avec « modération » et « modérateur ». La facilitation, tant à distance qu'en présentiel, vise à promouvoir un climat social agréable et un échange de perspectives animé. Le facilitateur en ligne ressemble à son équivalent en présentiel à bien des (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique124.html" rel="directory">Les figures de la facilitation de la coopération avec les TIC</a> / <a href="http://vecam.org/mot40.html" rel="tag">Appropriation des outils</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot68.html" rel="tag">Revue-reseau-TIC</a>, <a href="http://vecam.org/mot75.html" rel="tag">i-jumelage</a> <div class='rss_chapo'><p><a href="http://vecam.org/article1185.html" class=''>Article original en anglais</a></p></div> <div class='rss_texte'><p>La facilitation est l'art du leadership dans la communication de groupe. Un facilitateur est une personne qui remplit ce rôle de leadership. Dans les milieux en ligne, ces termes sont souvent employés de manière interchangeable avec « modération » et « modérateur ».</p> <p>La facilitation, tant à distance qu'en présentiel, vise à promouvoir un climat social agréable et un échange de perspectives animé. Le facilitateur en ligne ressemble à son équivalent en présentiel à bien des égards. Voici comment est décrite la facilitation dans une description classique (Hiltz et Turoff, 1978, p. 23-24) :</p> <p>« <i> Pour qu'une conférence informatisée soit réussie, le modérateur doit travailler très fort pour remplir à la fois les rôles d'« hôte social » et de « président/e d'assemblée ». En tant qu'hôte social, il/elle est tenu-e de transmettre des invitations chaleureuses, d'envoyer des messages privés d'encouragement complimentant ou, au moins, commentant les contributions des participants, ou de suggérer des contributions selon leurs qualifications. En tant que président/e d'assemblée, il/elle doit préparer un ordre du jour initial alléchant, résumer ou clarifier fréquemment ce qui se passe, essayer d'exprimer le consensus émergent ou demander un vote formel ; sentir et annoncer quand il est temps de passer à un nouveau sujet. Sans ce genre de rôle actif de modérateur, une conférence ne peut prendre son envol. </i> »</p> <h3 class="spip"> Les classifications des activités de facilitation</h3> <p>Une approche classique consiste à classer les activités de facilitation en quatre catégories : pédagogique, social, gestionnaire et technique. Le rôle pédagogique concerne l'apport de connaissances et d'idées spécialisées par l'enseignant, l'utilisation de questions et suggestions pour encourager les réponses des élèves et pour centrer les discussions sur des concepts essentiels. En outre, en servant de modèle par un son propre comportement, l'enseignant prépare les étudiants à diriger eux-mêmes des activités pédagogiques.</p> <p>Un enseignement en ligne réussi nécessite un environnement social agréable. Le rôle social de l'enseignant consiste à promouvoir les relations humaines, à valoriser et à reconnaître les contributions des étudiants, à offrir aux étudiants les possibilités de développer un sentiment de cohésion de groupe, à maintenir l'unité de groupe, et à aider les étudiants à travailler ensemble pour une cause commune.</p> <p>Le rôle gestionnaire concerne les activités d'organisation, de procédure et d'administration. Ce rôle consiste à établir les objectifs, les calendriers, les règles de procédure et les normes de décision.</p> <p>Le rôle technique concerne la responsabilité d'assurer le confort et l'aisance des participants lors de l'utilisation du système de réseau et du logiciel de conférence. Ce rôle nécessite que le facilitateur maîtrise la technologie.</p> <p>Une question importante lors de discussions sur la pédagogie en ligne concerne ce que l'on a appelé la « présence didactique » La présence didactique se définit comme la capacité des participants, en particulier des enseignants, à concevoir des expériences éducatives, à fournir un enseignement direct, et à faciliter la discussion. Dans ce contexte, la facilitation consiste à identifier les points d'accord et de désaccord, à rechercher le consensus, à reconnaître les contributions des étudiants et à poser des questions, à approfondir et à résumer les discussions, à instituer une nétiquette, et à identifier et à gérer les idées reçues.</p> <p>Comme la plupart des nombreuses publications scientifiques sur le sujet, ces approches décrivent la facilitation en ligne dans des termes correspondant aux activités en présentiel. Toutefois, les correspondances ne sont pas exactes. Les différences subtiles entre la facilitation en ligne et en présentiel sont dues aux différences entre les moyens de communication dans les deux milieux.</p> <p>Une approche de la facilitation par la communication [<a href='#nb1' class='spip_note' rel='footnote' title='Note de traduction : L'expression utilisée dans le texte original est : “ (...)' id='nh1'>1</a>] insiste plutôt sur les différences entre les activités en ligne et en présentiel. Elle met en lumière les activités spécifiques de la facilitation en ligne. Celles-ci peuvent être distinguées dans un but d'analyse des autres activités des facilitateurs, telles que la gestion sociale des relations personnelles dans le groupe, le soutien technique pour les participants éprouvant des difficultés, et les pratiques pédagogiques telles que poser des questions et expliquer des concepts. L'attention portée à ces différences permet d'accéder à une compréhension plus complète du milieu en ligne et des exigences particulières qu'il fait peser sur les facilitateurs. (Pour une liste complète des fonctions de communication, consultez le tableau ci-joint.)</p> <h3 class="spip">Établir un modèle de communication</h3> <p>En présentiel, le défi pour le facilitateur est d'assurer à chacun une chance de parler en gérant habilement le tour de parole. Le tour de parole n'est pas un problème dans les forums en ligne asynchrones. Au lieu de cela, le facilitateur en ligne est principalement occupé à compenser l'absence des repères tacites habituels qui permettent aux partenaires de discussion de se comprendre et de se reconnaître mutuellement face à face. La tâche première et fondamentale du facilitateur en ligne est de construire la réalité sociale de la rencontre électronique en choisissant un modèle de communication pour le groupe. Dès que nous entrons dans une pièce, nous nous orientons plus ou moins consciemment en fonction des indices tacites que nous remarquons dans le cadre du processus de communication que nous sommes sur le point de rejoindre. Ces indices contextuels établissent un modèle de communication partagée, d'où découlent des rôles, des normes et des attentes.</p> <p>Puisqu'aucun signe tacite visible dans l'environnement n'établit un modèle de communication en ligne, les facilitateurs doivent généralement faire un choix explicite pour le groupe qu'ils dirigent, en réduisant l'étrangeté du milieu à travers la définition d'un contexte familier avec un système de rôles et de règles qui imite la vie de tous les jours. Le facilitateur doit préciser les normes de comportement en ligne au début de la vie du groupe.</p> <p>Ces fonctions de contextualisation sont importantes pour soulager l'anxiété que quelques-uns des participants vivent dans un milieu de communication qui n'est pas défini à l'avance par des indices tacites. Lorsqu'un modèle de communication est mis en place, le facilitateur doit jouer le rôle spécifique de leadership qu'il implique, soit le président d'assemblée, l'hôte, l'enseignant, ou l'amuseur. Ce rôle consistera en partie à surveiller la conformité avec le modèle de communication et à rassurer les participants quant au caractère approprié de leurs contributions à la discussion, ou si elles ne sont pas appropriées, à les guider doucement vers une meilleure compréhension du modèle. Pour maintenir la conversation sur les rails, le facilitateur doit aussi offrir à l'occasion des « méta-commentaires » explicites qui abordent les problèmes de communication rencontrés par le groupe dans son ensemble. Maintenir les motivations à participer</p> <p>Les motivations à participer à un forum en ligne sont souvent extrinsèques, comme les exigences d'un emploi ou la notation des élèves. Cependant, la cohésion sociale d'un forum en ligne dépend des motivations qui émergent au cours de l'interaction. A cet égard, les forums en ligne ressemblent aux rencontres et aux classes en présentiel qu'ils imitent. La préoccupation pour les notes est généralement insuffisante pour maintenir une discussion intéressante en classe, et la facilitation est nécessaire pour maintenir la motivation à participer aux cours en ligne. Les élèves apportent une certaine curiosité et un désir de briller en classe. La facilitation utilise ces motivations. L'enseignant éveille la curiosité des élèves et le suspense garde les étudiants attentifs jusqu'à ce qu'elle soit satisfaite. Certains faits ou concepts surprenants captent l'attention et suscitent des commentaires. La reconnaissance de la contribution stimule le désir de contribuer à nouveau. Chaque enseignant est conscient de ces dynamiques et les utilise pour faciliter la discussion en classe. Les étudiants en ligne répondent aux mêmes stimuli ; seul l'environnement est différent.</p> <p>Cette différence est cependant considérable. Des malentendus peuvent être rapidement corrigés en classe, laissant une marge d'ambiguïté et d'erreur beaucoup plus grande sur un forum en ligne où la confusion peut prendre plusieurs jours à se régler. La clarté d'expression est donc requise de tous et du facilitateur avant tout. Parfois, cela implique de développer des sujets et leurs commentaires beaucoup plus longuement que cela se ferait face à une classe. De la même manière, la reconnaissance de la contribution des étudiants est un fardeau plus lourd en ligne, où les étudiants ne voient pas la réponse tacite de leurs camarades et ont ainsi besoin d'être rassurés plus fréquemment par l'enseignant.</p> <p>Malgré ces difficultés, les étudiants apprécient les discussions en ligne bien facilitées et apprennent beaucoup en écrivant au sujet des concepts de leur domaine d'études. Il y a quelque chose d'excitant à se connecter quotidiennement et à chercher la prochaine série de messages, qui peuvent inclure des réponses à ses propres commentaires et de nouvelles perspectives introduites par l'enseignant. La participation à un forum de discussion en ligne peut se transformer en une « dépendance » qui incite les étudiants à revenir jour après jour tout au long du semestre.</p> <div style="border: 1px dotted gray; margin: 20px 0px 20px 15px; padding: 8px;position: relative;"><span style="position: absolute; top: -10px; left: 15px;background-color: white;display: block;padding-left: 5px;padding-right: 5px;">Facilitation : Fonctions de communication</span> <div> <h3 class="spip">Fonctions de contextualisation :</h3> <p>1) Ouvrir les discussions : Le modérateur doit fournir un commentaire d'ouverture qui expose le thème de la discussion et établit un modèle de communication. Le modérateur peut périodiquement faire des propositions de sujet ou des « incitations » à la prise de parole qui ouvrent sur de nouvelles discussions dans le cadre du thème général du forum.</p> <p>2) Établir les règles : suggérer des règles de procédure pour la discussion. Certaines normes sont règlées par la forme et le style des messages d'ouverture du modérateur. D'autres sont explicitement formulées dans les commentaires de la discussion.</p> <p>3) Définir les priorités : gérer le forum, sélectionner un ordre et un enchaînement de thèmes et de sujets de discussion. Le modérateur précise en général une partie ou la totalité des priorités avec les participants au départ.</p> <p>4) Référer : La conférence peut être mise en contexte en référant à du matériel rendu disponible sur Internet, comme des hyperliens, ou à du matériel hors ligne tels que des manuels scolaires.</p> <h3 class="spip">Les fonctions de suivi :</h3> <p>5) Reconnaître : référer explicitement aux commentaires des participants pour leur assurer que leur contribution est appréciée et la bienvenue, ou pour corriger les malentendus à propos du contexte de la discussion.</p> <p>6) Inciter à la discussion : adresser des demandes de commentaires à des personnes ou au groupe. L'incitation à la discussion consiste à poser des questions et peut être formalisée par des « devoirs » ou des tâches. Elle peut être effectuée par des demandes publiques sur le forum ou par des messages privés.</p> <p>7) Évaluer : La réussite des participants peut être évaluée par des tests, des séances de révision, ou d'autres procédures formelles.</p> <h3 class="spip">Les méta-fonctions : </h3> <p>8) Méta-commenter : des remarques au sujet d'éléments comme le contexte, les normes ou les priorités du forum, ou au sujet de problèmes comme le manque de clarté, le manque de pertinence et la surcharge d'information. Les méta-commentaires jouent un rôle important dans le maintien des conditions d'une communication réussie.</p> <p>9) Mettre les idées en corrélation : résumer l'état de la discussion et trouver des points communs aux commentaires des participants. Cette fonction joue un rôle dans la reconnaissance des auteurs des commentaires mis en lien, et les invite souvent implicitement à poursuivre la discussion de manière à faire avancer les priorités de la conférence.</p> <p>10) Déléguer : Certaines fonctions de modération, telles que les synthèses, peuvent être attribuées à des participants pour une courte ou plus longue période.</p> </div> </div> <h3 class="spip">La facilitation et l'enseignement</h3> <p>Les dix fonctions de communication décrites dans le tableau maintiennent le flot de la conversation en ligne indépendamment de son objet et de son contenu. Elles seront effectuées d'une façon ou d'une autre dans n'importe quel groupe en ligne réussi. Parfois, la responsabilité d'assurer la discussion est largement distribuée parmi les membres du groupe, Chacun effectuant occasionnellement une des fonctions ; parfois, elle est principalement à la charge d'un seul facilitateur. Il y a de fortes raisons pour préférer ce dernier modèle dans un cours en ligne.</p> <p>Dans l'éducation en ligne, une facilitation habile est un enseignement habile. Il n'y a pas de pédagogie alternative disponible. Cela est dû aux limitations intrinsèques du médium. Les cours magistraux en ligne, à travers du matériel écrit ou de la vidéo, ne possèdent pas les qualités interactives essentielles à un bon enseignement. Le problème n'est pas les cours magistraux en tant que tels. Dans une petite salle de classe, l'enseignant peut encourager l'interaction en restant ouvert aux commentaires et questions, mais cette flexibilité est perdue lors de cours magistraux reproduits en ligne. Ceux-ci se distinguent peu des conférences qui elles-mêmes, ne constituent pas une expérience d'enseignement. Des solutions techniques sophistiquées utilisant la vidéo interactive sont encore trop compliquées pour la plupart des enseignements en classe. En réponse à cette limite, les éducateurs en ligne utiliseront plutôt la discussion sur des forums asynchrones car c'est ce se rapproche le plus de l'expérience familière de la classe.</p> <p>Comme dans une classe, la facilitation en ligne de discussions offre à l'enseignant de nombreuses occasions pour faire progresser la compréhension des élèves. Dans ce contexte, les fonctions de communication de la facilitation ne sont pas purement sociales, détacchées du contenu éducatif. De nombreuses activités sociales et pédagogiques s'effectuent mieux dans le cadre de l'exécution des fonctions de communication. Par exemple, le maintien d'un environnement agréable exige la reconnaissance rapide des contributions individuelles, afin que personne ne se sente mis à l'écart. De même, les concepts sont souvent expliqués lors de l'ouverture de discussions à l'aide de propositions de sujets.</p> <p>Les synthèses et les commentaires de la discussion ont une importance particulière pour la pédagogie en ligne pratiquée par de nombreux enseignants. Comme fonction de communication, la mise en relation des idées échangées permet au groupe de faire le bilan des accords et des désaccords et de suivre les progrès accomplis quant à ses priorités. Ceci s'accomplit en identifiant dans un texte les ressemblances avec un certain nombre de commentaires précédents. Pour écrire ces synthèses, il est nécessaire d'examiner attentivement les archives des discussions, de manière à se rappeler des contributions antérieures, à clarifier des expressions confuses, à identifier des thèmes, à faire des liens.</p> <p>Dans le cadre d'un cours en ligne, ces activités créent des occasions pédagogiques. La synthèse peut faire davantage que simplement résumer la discussion dans les termes d'une nouvelle discussion. Elle permet de relier les contributions des étudiants aux thèmes du forum, et les concepts plus avancés dans la discipline de l'enseignant avec les idées et les expériences des élèves. C'est un moyen particulièrement efficace d'accroître la présence didactique dans le cours en ligne.</p> <h3 class="spip">Conclusion</h3> <p>La formation en ligne a à peine plus de 20 ans. Durant cette courte période, il y a eu de nombreuses discussions au sujet de la facilitation dans les publications scientifiques (voir suggestions de lecture), mais les mêmes thèmes réapparaissent sans cesse. De manière générale, ces publications scientifiques ne sont pas basées sur des recherches poussées, mais sur l'expérience pratique. Néanmoins, il existe un solide consensus quant aux aspects essentiels de la facilitation en ligne. Les divers angles d'approche des commentateurs contribuent à la construction d'une image complète de cet art. D'autres recherches sur la facilitation apporteront sans doute de nouveaux éléments à notre compréhension de cette importante activité, mais on en connait déjà suffisamment pour former les nouveaux enseignants.</p> <p>(Traduction en français par Geneviève Szczepanik)</p></div> <hr /> <div class='rss_notes'><p>[<a href='#nh1' id='nb1' class='spip_note' title='Notes 1' rev='footnote'>1</a>] Note de traduction : L'expression utilisée dans le texte original est : “ communication-theoretic approach”</p></div> <div class='rss_ps'><h3 class="spip">Suggestions de lecture</h3> <p>Anderson, T., L. Rourke, Garrison, D. R, Archer, W. (2001). “Assessing teaching presence in a computer conferencing environment.” Journal of Asynchronous Learning Networks 5(2).</p> <p>Berge, Z. L. (1995). “Facilitating Computer Conferencing : Recommendations from the Field.” Educational Technology 15(1) : 22-30.</p> <p>Feenberg, A. (1989). The Written World. Mindweave : Communication, Computers, and Distance Education. R. Mason and A. Kaye (Eds.). Oxford : Pergamon Press : 22-39.</p> <p>Hiltz, S. R. and M. Turoff (1978 & 1993). The Network Nation : Human Communication via Computer. Cambridge, MA : MIT Press.</p> <p>Paulsen, M. F. (1995). Moderating Educational Computer Conferences. Z. L. Berge & M. P. Collins (Eds.). Computer-mediated communication and the on-line classroom in Distance Education. Cresskill, NJ : Hampton Press.</p></div> Les figures de la facilitation de la coopération avec les TIC http://vecam.org/article1183.html http://vecam.org/article1183.html 2010-03-23T15:55:17Z text/html fr Frédéric Sultan, Stéphane Couture Appropriation des outils vecam-F Revue-reseau-TIC i-jumelage La plupart des activités collectives d'aujourd'hui, en particulier les activités militantes et citoyennes, ne sauraient se passer des échanges de courriels, des conversations en réseaux, de la publication sur Internet, du partage d'information dans des bases de données ou, plus récemment, des échanges au sein de réseaux numériques sociaux tels que Facebook, Twitter, ou autre. Cependant, ce ne sont pas les technologies à elles seules qui organisent la coopération entre ces acteurs sociaux. Les (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique124.html" rel="directory">Les figures de la facilitation de la coopération avec les TIC</a> / <a href="http://vecam.org/mot40.html" rel="tag">Appropriation des outils</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot68.html" rel="tag">Revue-reseau-TIC</a>, <a href="http://vecam.org/mot75.html" rel="tag">i-jumelage</a> <div class='rss_texte'><p>La plupart des activités collectives d'aujourd'hui, en particulier les activités militantes et citoyennes, ne sauraient se passer des échanges de courriels, des conversations en réseaux, de la publication sur Internet, du partage d'information dans des bases de données ou, plus récemment, des échanges au sein de réseaux numériques sociaux tels que Facebook, Twitter, ou autre. Cependant, ce ne sont pas les technologies à elles seules qui organisent la coopération entre ces acteurs sociaux. Les organisations, réseaux, collectifs, associations ou groupes se dotent de formes d'animation, de coordination, de médiation qui se déploient en s'appuyant sur ces technologies. Dans ces coopérations numériques, certaines personnes assument un rôle particulier de facilitation, en agissant de manière plus ou moins visible et volontaire comme initiateur, ressource technique ou médiateur, et tentent d'articuler les technologies aux activités du collectif. Le nombre et la nature de ces intervenants n'a cessé de s'élargir. Parfois, ce sont des militants bricoleurs et formés « sur le tas » qui assument ce rôle. D'autres fois, ce sont des professionnels, issus de corps de métiers de plus en plus éloignés de l'informatique. La facilitation de la coopération avec les technologies de communication est finalement une activité qui peut se faire discrète au sein du collectif.</p> <p>Quelles formes prend la facilitation, et quelle est l'importance de cette activité dans les processus de coopération soutenus par les technologies de l'information ? Pour répondre à cette question, nous avons réuni neuf articles qui concernent divers champs d'action. Un portrait à plusieurs facettes de la facilitation se dégage de la mise en relation de ces différentes expériences. Cet article vise à présenter une synthèse de ce dossier thématique.</p> <h3 class="spip">Des techniques et des humains</h3> <p>Pour faciliter la coopération, les technologies ont évidemment une grande place : cartes mentales pour appuyer le développement d'idées, wikis et dispositifs d'écriture pour partager les idées, etc. Ce rôle des technologies en tant qu'acteurs de la facilitation ressort particulièrement de l'entrevue réalisée avec Nicolas Taffin. Typographe de métier, Nicolas Taffin insiste sur l'importance de l'interface d'utilisation, de l'ergonomie. Pour reprendre ses termes, l'outil est un objet qui dialogue avec la matière ; un bon outil permet d'amplifier l'humanité contenue dans le geste productif. Jean-Michel Cornu expose pour sa part les avantages des schémas heuristiques – encore appelés cartographies mentales – comme outil pour penser collectivement et résoudre les conflits. La cartographie mentale permet, selon lui, au groupe de se voir lui-même. La tâche du facilitateur (humain) est donc, dans ce cas, de « montrer le groupe au groupe ».</p> <p>Dans le texte d'une présentation réalisée par Gustave Massiah, celui-ci nuance toutefois le rôle déterminant des technologies dans le processus de facilitation. Exposant la construction du Forum Social Mondial, Gustave Massiah affirme que bien que les techniques ouvrent de nouveaux horizons, elles ne sont pas en elles-mêmes porteuses des formes d'organisation sociale. Les technologies et l'organisation d'un espace, le forum social dans ce cas-ci, s'influencent de manière réciproque plutôt qu'elles se déterminent de manière causale. Sur un plan plus macro-sociologique, Gustave Massiah affirme toutefois que les technologies sont une source de tension et de changements potentiels, en particulier parce qu'une génération de jeunes chômeurs éduqués s'empare aujourd'hui de ces technologies pour élaborer et mettre à profit une culture du net propice au développement des mouvements sociaux.</p> <h3 class="spip">Mettre en scène des expériences de coopération</h3> <p>La plupart des articles du dossier montrent la facilitation comme la mise en scène d'une expérience ou d'une situation de coopération où les participants sont invités à s'impliquer. Ainsi, Claire Brossaud définit le processus de facilitation comme « une façon de faire advenir des échanges sociaux outillés par la technique dans une perspective collaborative ou participative ». Andrew Feenberg et Cindy Xin la définissent, quant à eux, comme « l'art du leadership dans la communication de groupe ». Le talent du facilitateur, dans ce contexte, tient à sa capacité à organiser des activités et à leur donner un style qui correspond à l'esprit du groupe en action.</p> <p>Pour bien fonctionner, ces activités ont aussi besoin d'éléments, tels qu'un scénario, des repères suffisamment connus par tous pour servir de codes, et des objectifs plus ou moins partagés, qui vont contribuer à la dynamique d'échange (ou de coopération). Les analyses présentées par Andrew Feenberg et Cindy Xin, Frédéric Sultan ou Jean-Michel Cornu illustrent comment ce besoin peut être satisfait. A. Feenberg et C. Xin associent à la facilitation un ensemble de 10 actions classées en 3 types de fonctions : actions de contextualisation, de suivi et méta-fonctions. Claire Brossaud propose de son côté trois rôles du facilitateur, soit le « modérateur » qui stimule la participation des acteurs, le « passeur » qui aide à définir un espace réflexif pour les acteurs, et finalement l'« animateur » qui organise le cadre social de la rencontre.</p> <p>Dans son analyse, Claude Henry décrit différentes micro-expériences de coopération qu'il a mises en scène, et auxquelles il a invité les membres du réseau Beijaflor : prise de décision collective à l'aide d'un sondage en ligne, documentation des pratiques par l'écriture collective de pages wiki. L'auteur met notamment en avant la métaphore du « jardinier » pour décrire ce travail de facilitation. Nicolas Taffin discute pour sa part, du récit de son expérience de création d'un site Internet destiné aux typographes qui vont fabriquer ensemble la semaine des Rencontres internationales de Lure en exploitant au mieux les disponibilités des membres de l'association. Enfin, le réseau RTP-doc a mis en scène le personnage collectif de Roger T. Pédauque comme signataire collectif de différents textes. Pour J.M. Salaün (dans la préface commentée par F. Sultan), ce choix d'utiliser un pseudonyme collectif visait à incarner la communauté et à atténuer la personnalisation parfois très vive qui existe dans le monde scientifique. Dans ces exemples, le facilitateur, la facilitatrice, s'attache à réunir les conditions de la coopération en provoquant la situation et en organisant l'activité du collectif dans l'espace et le temps.</p> <p>Ces mises en scène d'expériences de coopération et de communication sont souvent perçues comme secondaires en regard de l'objectif premier : acquérir des connaissances, survivre à une catastrophe naturelle, organiser des rencontres, publier des livres, etc. La facilitation est un moyen plutôt qu'une fin, et une activité qui doit généralement demeurer en arrière-plan, au profit de l'émergence d'un sens et d'une intelligence collective. Cependant, en se donnant comme raison d'être dans le collectif de vivre et faire vivre cette « expérience de communication », le facilitateur et la facilitatrice expriment une créativité et font de leur geste une prestation artistique (ou spirituelle) articulée aux outils de communication. La facilitation est une activité qui relève en quelque sorte de la mise en scène et qui implique un certain style dans ses façons de faire, de s'exprimer, de présenter les règles, de modérer, etc. D'ailleurs, Andrew Feenberg la décrit bien comme un art du leadership, ce qui met bien l'accent sur le caractère intuitif de cette activité. Pour reprendre les mots utilisés par Nicolas Taffin dans sa description du bon fabriquant d'outil, nous pourrions dire que la facilitation vise également à amplifier l'humanité contenue dans le geste productif.</p> <h3 class="spip">« Produire du collectif »</h3> <p>Une autre composante essentielle de la facilitation semble être l'idée de faire advenir un collectif porté par un idéal commun. Cette idée ressort explicitement de l'expérience d'animation du réseau Beijaflor décrite par Claude Henry. L'auteur considère la facilitation non pas seulement comme étant orientée vers un objectif pragmatique (produire du contenu dans ce cas), mais également tournée vers l'objectif de « produire du collectif ». Le site Internet dont il s'occupe est certes un outil de travail collaboratif pour les membres du réseau, mais il participe également à la construction de l'identité même du groupe en lui donnant une existence permanente sur le web. L'auteur fait également ressortir différentes figures de la facilitation. Le facilitateur peut y prendre la figure du « jardinier », garant de la qualité de l'organisation et de la pérennité des outils numériques, ou encore celle du « voisin », plus près de l'entraide, où une personne plus expérimentée dans l'usage des outils de communication accompagne son « voisin ». Ces deux facettes se rejoignent pour faire de l'activité de facilitation un facteur de l'émergence d'une communauté partageant des valeurs et des pratiques.</p> <p>Nous pouvons reconnaître cette façon de faire advenir le collectif dans les projets de la maison d'édition C&F Editions ou les pratiques de « cartographie mentale » décrites par Jean- Michel Cornu. Dans le premier cas, il s'agit d'élargir le groupe des personnes sensibilisées aux enjeux du débat sur les biens communs de la connaissance et aux pratiques de diffusion qui leur sont associées. Dans cette figure de l'éditeur, le facilitateur joue un rôle de passeur entre les auteurs et les lecteurs possibles ou en devenir. Jean-Michel Cornu décrit, quant à lui, un facilitateur qui permet au groupe de se voir lui-même et de reconfigurer les conflits qui le traversent.</p> <p>Enfin, Jean-Michel Salaün, animateur de la rédaction collective de l'ouvrage « Le document à la lumière du numérique », a pour objectif de constituer une communauté, qui sera force de proposition dans les politiques publiques de la recherche. Ses pratiques le rattachent à une figure que l'on pourrait appeler « dictateur bienveillant » - figure que l'on retrouve par ailleurs souvent dans les communautés du logiciel libre - qui se caractérise par la concentration du pouvoir aux mains d'une personne, acceptée par tous, afin de permettre au collectif d'atteindre son but pragmatique. Dans cette forme d'organisation, la position dominante du leader du projet est équilibrée par la possibilité pour chacun, à tout moment, d'entrer et de sortir de la coopération. Elle est aussi encadrée par la codification des droits d'usage des productions collectives à travers l'usage d'une licence de propriété intellectuelle ou un accord entre les participants, comme cela est le cas pour RT. Pédauque.</p> <h3 class="spip">Une nécessaire politisation de la facilitation</h3> <p>Finalement, le texte de Joëlle Palmieri nous amène à poser un regard critique sur ces pratiques de la facilitation avec les technologies de communication. Proposant une réflexion féministe, l'auteure soutient la nécessité d'une politisation de l'activité de facilitation. Elle remarque que ce sont le plus souvent des hommes – et des hommes blancs - qui occupent les rôles dominants dans les pratiques de facilitation, et en particulier lorsque cette activité relève de la conception des technologies. Analysant notamment la situation des femmes dans les pays du sud, elle note que la facilitation se limite souvent à permettre l'accès aux outils, et que les femmes restent confinées à un rôle de simple utilisatrice. La facilitation doit donc tenir compte des différences, voire des frontières de genre, au risque de les creuser. Plus largement, les formes sociales, de même que les pratiques de facilitation qui en découlent, sont toujours, comme le rappelle l'analyse féministe de Joëlle Palmieri, articulées à des inégalités qui passent souvent inaperçues. Leur politisation conditionne l'émergence d'un acteur social qui se reconnaisse dans la figure du facilitateur des processus de coopération à travers l'usage des TIC.</p></div> Accompagner la collaboration entre réseaux avec des outils numériques, l'expérience de ACH/ Beijaflor http://vecam.org/article1184.html http://vecam.org/article1184.html 2010-03-23T15:55:14Z text/html fr Frédéric Sultan Appropriation des outils vecam-F Revue-reseau-TIC i-jumelage Il semble évident que l'usage de la Toile par des collectifs porteurs d'initiatives alternatives économiques et politiques améliore sensiblement leur efficacité. Il s'avère cependant que cette évolution est lente. Tout semble se passer comme si, après une diffusion forte de l'usage du mail et de la pratique de la recherche d'information sur la toile, le pas à franchir pour être actif dans le Web2 ne s'effectue que de manière très progressive. L'auteur de ces lignes a eu la chance d'être partie prenante (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique124.html" rel="directory">Les figures de la facilitation de la coopération avec les TIC</a> / <a href="http://vecam.org/mot40.html" rel="tag">Appropriation des outils</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot68.html" rel="tag">Revue-reseau-TIC</a>, <a href="http://vecam.org/mot75.html" rel="tag">i-jumelage</a> <div class='rss_texte'><p>Il semble évident que l'usage de la Toile par des collectifs porteurs d'initiatives alternatives économiques et politiques améliore sensiblement leur efficacité. Il s'avère cependant que cette évolution est lente. Tout semble se passer comme si, après une diffusion forte de l'usage du mail et de la pratique de la recherche d'information sur la toile, le pas à franchir pour être actif dans le Web2 ne s'effectue que de manière très progressive. L'auteur de ces lignes a eu la chance d'être partie prenante d'une tentative d'appropriation des TIC [<a href='#nb1' class='spip_note' rel='footnote' title='TIC : technologies de l'information et de la communication' id='nh1'>1</a>], lors de la naissance du Collectif Beijaflor/ACH.</p> <h3 class="spip">Le collectif Beijaflor autour du « bien vivre »</h3> <p>Dans le contexte de crise grave que traverse la Planète, de multiples groupes [<a href='#nb2' class='spip_note' rel='footnote' title='On pense en particulier au mouvement d'« associationisme » qui désigne un (...)' id='nh2'>2</a>] s'investissent dans l'expérimentation d'alternatives au système dominant. Des expérimentations significatives, encore trop contraintes par le système dominant, ont vu le jour dans différents domaines, tels que l'agro-écologie, les monnaies alternatives, le travail personnel « sur soi », les villes écologiques, une culture de l'être et non plus de l'avoir, etc. ; sans qu'une orientation d'ensemble, politique, ne se dégage pour l'instant… Dans ce moment d'attente de mutation, ou, si on veut être plus optimiste, de mutation engagée, et face à l'ampleur de la tâche d'invention d'un autre mode de vie, on voit divers réseaux tenter de se regrouper, pour être plus visibles…et plus forts !</p> <p>C'est sous les grands arbres du Parc de la Tête d'Or (Lyon, France), début juillet 2008, lors des 4° Dialogues en Humanité [<a href='#nb3' class='spip_note' rel='footnote' title='Dialogues en humanité est une rencontre annuelle ouverte à tous proposée par (...)' id='nh3'>3</a>], qu'est née l'idée d'un réseau de réseaux porteurs de potentialités créatrices, face aux menaces multiples de notre monde contemporain. « beijaflor », le nom de cet inter-réseaux, a fonctionné comme un code entre les membres pour désigner « l'Alliance civique pour l'Humanité » (ACH).</p> <p>Le groupe partage la conviction que nous sommes dans un moment historique de crise systémique qui se caractérise par une double tension : <br /><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> La domination de l'économie sur la vie politique mène à une rupture des liens avec une société civile porteuse de potentialités positives multiples et immenses. Il faut rapidement retrouver une relation vivante avec le politique et viser une société dans laquelle l'humain retrouve un lien serein avec lui-même, avec les autres et avec ses milieux naturels et environnementaux. <br /><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> L'échec des tentatives historiques récentes de changement de paradigme social nous interpelle. Nous pensons qu'il est possible de le dépasser, si nous reconsidérons la question humaine dans les organisations démocratiques à reconstruire, dans la ville, dans les associations et, bien entendu, dans l'entreprise !!!</p> <p>L'intention du Collectif était donc d'œuvrer à la mise en synergie de ceux qui agissent et partagent des valeurs et des pratiques pour remettre l'Humain et la Nature au centre de leurs aspirations.</p> <p>La question humaine – bien vivre et bien mourir - comme question politique (Patrick Viveret [<a href='#nb4' class='spip_note' rel='footnote' title='http://fr.wikipedia.org/wiki/Patric...' id='nh4'>4</a>]) et la nécessité pour chacun de lier transformation personnelle et transformation sociale, constituent un « principe supérieur commun » à ce réseau de réseaux.</p> <p>Une année sera nécessaire pour cerner précisément l'identité du collectif, préciser ce que nous voulions, devions ou pouvions faire, tout en tirant parti de nos expériences antérieures pour ne pas échouer.</p> <p>On trouvera une présentation de la démarche et des réseaux membres sur l'espace collaboratif « beijaflor [<a href='#nb5' class='spip_note' rel='footnote' title='http://beija-flor.info' id='nh5'>5</a>] ». Dix-huit en tout, dont quatre plus importants, se sont engagés dans l'expérience. Ils rassemblent une petite centaine de personnes, francophones, dont une poignée hors de France. Premiers pas avec un wiki Nous relier par les vertus du numérique a été une idée immédiatement acceptée ; idée lancée et rendue opérationnelle par l'auteur de ces lignes qui joue le rôle de facilitateur.</p> <p>Avant la constitution de ce collectif , chacun des réseaux utilisait, souvent modestement, mail et Web et entrevoyait l'utilité de faire collectivement un pas en avant dans les pratiques numériques. L'originalité de cette expérience de facilitation des usages d'outils numériques tient à la diversité des réseaux à mettre en collaboration.</p> <p>Le point de départ est l'ouverture d'un espace wiki [<a href='#nb6' class='spip_note' rel='footnote' title='Cette installation se fait avec le support de l'équipe Outils-réseaux (...)' id='nh6'>6</a>] et d'une liste de discussion. Une première mise en forme du wiki fût proposée durant le mois de septembre 2008, avec l'objectif qu'elle soit discutée au cours d'une rencontre physique, deux mois plus tard. Des petits menus déroulants très simples, (des onglets, bien visibles en page d'accueil) signalent le découpage du site en fonction de la visée de l'inter-réseaux : « Accueil », « Textes de référence », « La démarche », « Les réseaux membres », « Les réseaux partenaires ». Ces onglets sont compréhensibles directement par chacun et permettent d'accéder à des menus ouvrant sur différentes pages. Un mini-blog devait compléter le wiki mais, piraté, il a été mis en sommeil.</p> <p>Le choix du wiki fut commandé par le désir de commencer très simplement, et de ne monter en complexité, par ajout de fonctionnalités, qu'une fois effectuées les premières prises en main par un petit nombre de membres. Un autre choix s'est révélé crucial : n'obliger personne à s'identifier sur le wiki. Des expériences précédentes sur des groupes de même culture numérique [<a href='#nb7' class='spip_note' rel='footnote' title='On désigne par culture numérique le niveau de savoir-faire dans les usages (...)' id='nh7'>7</a>] montraient qu'une procédure d'identification risquait de produire une exclusion d'un bon quart des membres, fatale à la poursuite du processus.</p> <h3 class="spip"> Jardinage et voisinage numériques</h3> <p>Dans un premier temps, ce fut le facilitateur/ « jardinier » [<a href='#nb8' class='spip_note' rel='footnote' title='La connotation naturaliste du mot « jardinier », proposée à titre de boutade (...)' id='nh8'>8</a>], aidé par une spécialiste des outils les plus récents (vidéo/son), qui a enrichi les différentes pages, et suscité la mise en place des pages de présentation de chacun des réseaux membres par eux même. Quelques personnes à l'aise avec ces techniques (trois personnes sur un groupe d'alors une soixantaine) se sont saisies de cette proposition, mais ne développent guère d'activité par la suite, peut-être en attente d'une avancée – technique ou relationnelle - plus rapide.</p> <p>Puis, plus intéressant, un second groupe entre dans le jeu, voyant l'adéquation entre la visée du collectif en train de se structurer et les informations rassemblées. Au début ce sont des contributions techniquement très simples, passer en édition et écrire « au kilomètre » - c'est à dire sans soin particulier de mise en forme textuelle - ou le plus souvent, transférer par copier-coller un texte écrit précédemment. Les membres « experts » du premier groupe aident les autres. Cette « facilitation par voisinage », dans laquelle celui qui sait un peu plus que l'autre enseigne au second ce qu'il sait (le processus se déroulant de proche en proche), ne durera guère.</p> <p>En novembre 2008, certaines actions vont permettre de déployer de nouvelles fonctionnalités proposées par le facilitateur (moi-même, on l'aura compris). Mais plus tard, des demandes commencent à émaner du groupe, par exemple « pourrait-on être prévenu quand une page du wiki est modifiée ? ».</p> <p>Ainsi, il est décidé de préparer une prise de position à l'occasion du soixantième anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. Ceci conduit à une écriture à plusieurs mains, via l'usage du wiki et l'échange de e-mails, puis à un sondage [<a href='#nb9' class='spip_note' rel='footnote' title='Il a suffit de préparer un tableau de questions sur le site de Google (...)' id='nh9'>9</a>] portant sur ce texte. La nouveauté de cette pratique surprend, intéresse, et il y a suffisamment de participation pour que le texte soit validé.</p> <p>En mars 2009, deux journées de travail sur le « vivre et décider ensemble » et sur la construction de l'identité de l'inter-réseaux sont l'occasion d'organiser un sondage sur les attentes des participants. Le sondage, placé sur le wiki, permet à tous de voir les intentions déclarées et aux animateurs de mieux calibrer la journée. L'efficacité de cet outil simple a fait beaucoup pour la « promotion » de l'espace numérique auprès des membres encore réticents.</p> <p>Le facilitateur, aidé par plusieurs rapporteurs, tente d'assurer la conservation dynamique de la mémoire de ces deux journées, qui malgré la mise à disposition des outils, peine à se concrétiser. De nombreux rappels sont nécessaires, et la collecte se révèle partielle.</p> <p>Une tentative malheureuse d'usage d'un réseau social, via le site activiste « WiserEarth [<a href='#nb10' class='spip_note' rel='footnote' title='Http ://www.wiserearth.org' id='nh10'>10</a>] », portée par quelques membres de BeijaFlor, souligne en creux l'importance de la facilitation.</p> <p>Certains sont tentés de mettre en attente ou de se replier sur des actions « bilatérales ». Mais l'ensemble tient bon. Un nouveau groupe d'animateurs émerge en vue d'une rencontre qui aura lieu au terme d'une année, date à laquelle un consensus devra être trouvé sur l'identité et les actions communes à engager. Le « look » de l'espace collaboratif est amélioré à la marge. Surtout, l'effort « d'édition » partagée se poursuit.</p> <p>L'inter-réseaux cherche actuellement un second souffle. Il a précisé quelques principes généraux, comme celui de la subsidiarité (ne rien faire dans l'inter-réseaux qui soit déjà fait dans l'un des réseaux). De manière plus précise, on a mis à jour la nécessite de deux grandes fonctions :</p> <p>En premier lieu, maintenir entre les réseaux un lieu d'échange, de savoir et de recherche sur la question du mieux être ; être « un lien, un liant » ; renforcer l'interdépendance entre collectifs par « pollinisation » ; donner de la visibilité, mutualiser, et innover dans le mieux-être (être dans son intégrité personnelle dans la vie collective) dans tous les processus de transformation du Monde, en percevant en toute chose les dimensions politiques (la gestion féconde des tensions entre les groupes) et économiques.</p> <p>Et en second lieu, repérer les éléments majeurs à la fois risques et chances pour l'humanité encore insuffisamment couverts par des réseaux de la société civile mondiale tels que par exemples : les atteintes à la biodiversité ; les risques de dérapage nucléaire, l'appropriation citoyenne de la monnaie. La facilitation, entre la technique et la socialisation du collectif La facilitation, telle qu'elle a été brièvement décrite dans ce texte, a largement permis qu'un fil rouge demeure dans le temps, par la construction d'une mémoire collective structurée, disponible à tout moment. Le groupe se serait dissous assez rapidement sans la volonté d'un tout petit noyau de personnes, quatre dont le facilitateur. Il est fort possible que le second souffle soit trouvé… Il y aura alors une autre facilitation.</p> <p>L'analyse de cette période montre que la facilitation, par le « jardinage » de l'espace collaboratif et les nombreuses invitations à participer sous différentes formes, a pour objectif à la fois de produire du contenu et également de « produire du collectif ».</p> <p>Proposer un premier outil très simple ; convaincre les plus experts qu'il faut commencer ainsi ; préparer une maquette, au mieux avec un petit groupe de non-experts, la présenter devant l'ensemble du groupe, le plus rapidement possible ; attendre que des besoins s'expriment pour faire émerger de manière partagée de nouveaux besoins et proposer des fonctionnalités spécifiques nouvelles ; aider chacun à maîtriser les fonctions les plus simples ; lorsque le désir est là, suscité par des pratiques réussies, savoir proposer sans retard, de nouvelles fonctionnalités ; ouvrir des séries de pages cohérentes qui pourront être alimentées par tous ensuite. Travailler la mise en page, sans usage excessif des techniques dernier cri, mais rester attentif à ce qui émerge de réellement utile et appropriable par tous.</p> <p>Tout ceci demande au facilitateur d'être bien intégré au pilotage collectif de l'inter-réseaux et de « sentir » les différentes forces au sein du collectif, d'agir en tant que passeur entre les membres, sans s'interposer. L'idéal est d'être un petit noyau - deux personnes - pour l'édition : gestion des pages, cohérence du contenu, mise en mémoire, visualisation, et un petit groupe pour l'accompagnement au cas par cas, avec le plus possible d'accompagnement « par voisinage ».</p> <p>Un double appui technique extérieur est nécessaire : une gestion technique (mise en place initiale, serveur, « capacitation » technique du (ou des) facilitateur(s)) et un éclairage des « possibles techniques » : l'équipe Outils-réseaux [<a href='#nb11' class='spip_note' rel='footnote' title='http://outils-reseaux.org/' id='nh11'>11</a>] a joué ces deux rôles techniques, l'immédiat et le prospectif, et une autre personne a aussi aidé à imaginer de nouveaux dispositifs techniques .</p> <p>Les besoins de facilitation sont immenses. La facilitation n'a pas encore trouvé sa reconnaissance fonctionnelle, et encore moins professionnelle. C'est plus que nécessaire dans la société moderne qui doit réinventer ses modes de fonctionnement collectifs, quels qu'ils soient. Dans notre cas, la facilitation a trop reposé sur une personne retraitée bénévole ayant eu l'opportunité de suivre et d'être un peu acteur de l'évolution des usages collectifs du numérique depuis une quinzaine d'années, comme chercheur et praticien associatif.</p></div> <hr /> <div class='rss_notes'><p>[<a href='#nh1' id='nb1' class='spip_note' title='Notes 1' rev='footnote'>1</a>] TIC : technologies de l'information et de la communication</p> <p>[<a href='#nh2' id='nb2' class='spip_note' title='Notes 2' rev='footnote'>2</a>] On pense en particulier au mouvement d'« associationisme » qui désigne un courant de pensée née pendant « du printemps des peuples » que fût la période des révolutions – passagères – de 1848 en Europe. L'idée de « l'association » est née à cette époque pour faire face à l'idée de contrat dont les partisans du libéralisme économique souhaitaient la généralisation. Cette pensée sera bousculée par le développement des idées marxiennes. Elle est reprise en France par une école de sociologie et de philosophie politique autour d'Alain Caillé et de Roger Sue. Elle est diffusée par la revue du Mauss . On s'intéresse ici à la partie du tissu associatif issu des idées de 48, donc investi dans l'expérimentation d'alternatives au système dominant.</p> <p>[<a href='#nh3' id='nb3' class='spip_note' title='Notes 3' rev='footnote'>3</a>] Dialogues en humanité est une rencontre annuelle ouverte à tous proposée par Patrick Viveret, <a href="http://dialoguesenhumanite.free.fr/" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>http://dialoguesenhumanite.free.fr/</a></p> <p>[<a href='#nh4' id='nb4' class='spip_note' title='Notes 4' rev='footnote'>4</a>] <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Patrick_Viveret" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>http://fr.wikipedia.org/wiki/Patric...</a></p> <p>[<a href='#nh5' id='nb5' class='spip_note' title='Notes 5' rev='footnote'>5</a>] <a href="http://beija-flor.info/" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>http://beija-flor.info</a></p> <p>[<a href='#nh6' id='nb6' class='spip_note' title='Notes 6' rev='footnote'>6</a>] Cette installation se fait avec le support de l'équipe Outils-réseaux <a href="http://outils-reseaux.org/" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>http://outils-reseaux.org</a></p> <p>[<a href='#nh7' id='nb7' class='spip_note' title='Notes 7' rev='footnote'>7</a>] On désigne par culture numérique le niveau de savoir-faire dans les usages des outils numériques des différents membres du groupe.</p> <p>[<a href='#nh8' id='nb8' class='spip_note' title='Notes 8' rev='footnote'>8</a>] La connotation naturaliste du mot « jardinier », proposée à titre de boutade dans un premier temps, s'est révélée utile pour désigner celui qui est le « garant » de la qualité de l'organisation et de la pérennité des divers outils numériques.</p> <p>[<a href='#nh9' id='nb9' class='spip_note' title='Notes 9' rev='footnote'>9</a>] Il a suffit de préparer un tableau de questions sur le site de Google Documents. Ensuite est généré sur ce même site une ligne de code informatique que l'on recopie sur une page de wiki - on désigne cette opération par le terme : mettre un « widget »-. Le tableau et son contenu est alors lisible par tous sur la page du wiki choisie.</p> <p>[<a href='#nh10' id='nb10' class='spip_note' title='Notes 10' rev='footnote'>10</a>] Http ://<a href="http://www.wiserearth.org/" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>www.wiserearth.org</a></p> <p>[<a href='#nh11' id='nb11' class='spip_note' title='Notes 11' rev='footnote'>11</a>] <a href="http://outils-reseaux.org/" class='spip_url spip_out' rel='nofollow external'>http://outils-reseaux.org/</a></p></div>