Vecam http://www.vecam.org/ Réflexion et action pour l'internet citoyen fr SPIP - www.spip.net Vecam http://vecam.org/local/cache-vignettes/L144xH41/siteon0-dd267.png http://www.vecam.org/ 41 144 Initiative française sciences et démocratie http://vecam.org/article1132.html http://vecam.org/article1132.html 2009-12-07T14:20:52Z text/html fr Frédéric Sultan Creative Commons vecam-F France Recherche Revue-reseau-TIC Sciences et démocratie http://www.fmsd-france.org L'initiative française du Forum mondial sciences et démocratie (FMSD) a pour but de faire connaître et d'ancrer en France le processus FMSD qui a été lancé à Belém en janvier 2009. Syndicats et associations de chercheurs, mouvements sociaux et ONG dialoguent sur la place de la recherche scientifique dans un monde durable, le statut des biens communs de la connaissance, la démocratisation des choix scientifiques et technologiques dans nos sociétés, le suivi voire le (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique57.html" rel="directory">Actualités</a> / <a href="http://vecam.org/mot17.html" rel="tag">Creative Commons</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot60.html" rel="tag">France</a>, <a href="http://vecam.org/mot66.html" rel="tag">Recherche</a>, <a href="http://vecam.org/mot68.html" rel="tag">Revue-reseau-TIC</a>, <a href="http://vecam.org/mot69.html" rel="tag">Sciences et démocratie</a> <div class='rss_texte'><p><a href="http://www.fmsd-france.org/" class='spip_out' rel='external'>http://www.fmsd-france.org</a></p> <p>L'initiative française du Forum mondial sciences et démocratie (FMSD) a pour but de faire connaître et d'ancrer en France le processus FMSD qui a été lancé à Belém en janvier 2009.</p> <p>Syndicats et associations de chercheurs, mouvements sociaux et ONG dialoguent sur la place de la recherche scientifique dans un monde durable, le statut des biens communs de la connaissance, la démocratisation des choix scientifiques et technologiques dans nos sociétés, le suivi voire le contrôle à mettre en place face à la montée en puissance des technologies de rupture (nanotechnologies, biosynthèse…), l'éthique et la responsabilité sociale des chercheurs ...</p> <p>VECAM propose 2 ateliers dans ce cadre : l'un sur le thème : l'innovation sociale : alternative au scientisme (contacter : Claire Brossaud (claire.brossaud at-gmail.com), l'autre sur le thème : Biens communs de la connaissance proposé avec C&F éditions (contacter : Hervé Le Crosnier (herve-at-info.unicaen.fr).</p> <p>Vous trouverez sur le <a href="http://www.fmsd-france.org/" class='spip_out' rel='external'>site de l'initiative</a> les informations utiles ainsi que la possibilité de proposer un atelier pour le forum décentralisé du FMSD qui se déroulera le 23 janvier 2010 à la Bourse du Travail à Paris. Vous pouvez par ailleurs participer aux débats du FMSD en réagissant aux articles ou en contactant directement l'adresse email : contact-at-fmsd-france.org.</p></div> Application du triptyque « privatisation, libéralisation, régulation » au secteur des télécommunications Bilan de l'expérience sénégalaise http://vecam.org/article1125.html http://vecam.org/article1125.html 2009-11-15T07:09:11Z text/html fr Olivier Sagna, Maitre de conférences, Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) Creative Commons Afrique vecam-F Recherche Revue-reseau-TIC Le triomphe du libéralisme dans nombre de pays occidentaux, au début des années 80, a eu pour conséquence la mise en œuvre de politiques axées sur le rétrécissement du périmètre d'intervention de l'Etat, la réduction des budgets sociaux et la déréglementation des secteurs de l'économie fonctionnant jusqu'alors sous contrôle étatique. Dans le cadre de la mondialisation encouragée par les grandes firmes capitalistes, ces politiques ont été relayées dans les instances internationales par la Banque mondiale, le (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique2.html" rel="directory">Articles / Publications</a> / <a href="http://vecam.org/mot17.html" rel="tag">Creative Commons</a>, <a href="http://vecam.org/mot42.html" rel="tag">Afrique</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot66.html" rel="tag">Recherche</a>, <a href="http://vecam.org/mot68.html" rel="tag">Revue-reseau-TIC</a> <div class='rss_texte'><p>Le triomphe du libéralisme dans nombre de pays occidentaux, au début des années 80, a eu pour conséquence la mise en œuvre de politiques axées sur le rétrécissement du périmètre d'intervention de l'Etat, la réduction des budgets sociaux et la déréglementation des secteurs de l'économie fonctionnant jusqu'alors sous contrôle étatique. Dans le cadre de la mondialisation encouragée par les grandes firmes capitalistes, ces politiques ont été relayées dans les instances internationales par la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, l'Organisation mondiale du commerce ou encore l'Union internationale des télécommunications (Do-Nascimento 2003). Les pays, dont les économies étaient sous perfusion des institutions financières internationales, furent contraints de s'inscrire dans cette dynamique libérale au risque de se voir sevrés de toute aide multilatérale voire bilatérale. C'est dans ce contexte que le Sénégal, dirigé par le Président Abdou Diouf, qui avait fait sienne la devise « Moins d'Etat, mieux d'Etat », a entrepris, à partir de 1987, la privatisation d'une première série d'entreprises publiques du secteur marchand (Samb 2009). Une seconde vague de privatisations intervînt quelques années plus tard qui toucha les entreprises concessionnaires de service public évoluant dans les secteurs de l'eau (Sonees), de l'électricité (Sénélec), etc.1 Le secteur des télécommunications n'échappa pas à cette logique car pour les institutions de Bretton Woods, l'ouverture des pays en développement ne devait pas se limiter aux flux commerciaux, aux flux d'investissements et aux flux financiers mais également s'étendre aux flux de technologies, d'informations et de services (Deepak Nayyar & Amit Bhaduri 1997). Une loi fut donc votée en 1995 afin de privatiser la Sonatel2 et un code des télécommunications adopté en 1996 en vue de libéraliser le marché des télécommunications3.</p> <p>La première étape de la mise en œuvre de la réforme du secteur des télécommunications est survenue en juillet 1997 avec la cession d'un tiers du capital de la Sonatel à France Télécom, suivie par l'introduction du titre en bourse en octobre 1998. La seconde étape, s'inscrivant dans la libéralisation du marché des télécommunications, fut l'attribution d'une licence de téléphonie mobile à Sentel, filiale du groupe Millicom International, en juillet 1998. La troisième étape fut la création d'une Agence de régulation des télécommunications (Art), en janvier 2002, parachevant ainsi la mise en œuvre du triptyque « privatisation, libéralisation, régulation » induit par les engagements internationaux pris par le Sénégal dans le cadre de l'Uruguay Round sur les télécommunications à valeur ajoutée (1994-1995) et la signature de l'accord sur les télécommunications de base (1997)4. A l'époque, la réforme du secteur des télécommunications était décrite, par ses instigateurs, comme le gage d'une plus grande efficacité économique et la condition sine qua non d'une entrée réussie dans la société de l'information. Elle était sensée permettre la modernisation des infrastructures, l'accroissement de la couverture, l'augmentation de la télédensité, la réalisation du service universel, l'amélioration de la qualité de service, la diversification de l'offre de services, la baisse des prix, etc. tous objectifs dont l'atteinte était présentée comme difficile voire impossible par un opérateur public. Près de quinze ans après le lancement de ce processus, il nous a paru intéressant de revenir sur cette réforme et tenter d'en établir un bilan afin de voir dans quelle mesure les fruits ont tenu la promesse des fleurs.</p> <h3 class="spip"> A l'origine de la privatisation était le Grcc…</h3> <p>En 1995, en vue de libéraliser l'économie sénégalaise, une structure composée de membres de l'administration, d'organisations professionnelles et patronales, de syndicats de travailleurs, de représentants du monde rural et d'associations de consommateurs, a été créée, sur recommandation de la Banque mondiale, sous l'appellation de Groupe de réflexion sur la compétitivité et la croissance (Grcc). Sa mission est d'une part de servir de cadre de concertation, d'analyse, d'information et de réflexion en vue d'identifier les entraves à la compétitivité et à la croissance des entreprises et d'autre part de formuler des propositions en vue de lever les entraves et de renforcer la contribution du secteur privé au développement économique5. La réforme des télécommunications figure parmi les priorités du Grcc mais elle est combattue par les syndicats de travailleurs qui, pour s'y opposer, organisent une grève en août 19956. En cette période où le gouvernement met en œuvre le Programme d'ajustement structurel (Pas) imposé par le Fmi suite à la dévaluation du Franc CFA de janvier 1994, la conjoncture n'est guère favorable aux luttes sociales. Pressentant que le combat risque d'être perdu, les syndicats, regroupés au sein d'une intersyndicale, décident alors d'accompagner le processus de privatisation afin d'en limiter les conséquences. Ils exploitent le cadre de concertation constitué par le Grcc pour réclamer que 25% des actions du capital de la Sonatel leur soient réservés (Azam, Dia & N'Guessan 2002 : 26). A l'issue d'âpres négociations, ils se voient finalement attribuer 10% des actions à des conditions très avantageuses7. Suite à cet accord, le schéma retenu est que le capital de la Sonatel sera réparti entre l'Etat (34%), un partenaire stratégique (33,33%), les travailleurs et les retraités de la Sonatel (10%), des investisseurs privés (17,66%) et un opérateur africain à identifier (5%). Les syndicats ayant été en quelque sorte neutralisés, le processus de privatisation se poursuit sans heurts majeurs, d'autant plus que l'opposition a été réduite à peu de chose suite à l'entrée au gouvernement de plusieurs de ses composantes8. Une autre question qui fait débat est de savoir s'il est préférable de libéraliser le secteur des télécommunications avant de privatiser la Sonatel ou au contraire de privatiser avant l'ouverture du marché à la concurrence. Le secteur privé, dont certaines des composantes souhaitent profiter rapidement de cette opportunité, pousse en faveur de la première option tandis que d'autres, parmi lesquels les travailleurs, défendent la seconde afin de laisser le temps à l'opérateur historique de se préparer pour affronter la concurrence. Finalement, il sera décidé d'opter pour la privatisation avant de procéder à la libéralisation.</p> <h3 class="spip"> Une entreprise publique qui n'avait rien d'un canard boiteux</h3> <p>Au moment où la privatisation de la Sonatel se prépare, la situation du secteur des télécommunications est plutôt meilleure que celle prévalant dans nombre de pays africains. La raison principale en est que celui-ci a bénéficié d'une attention particulière des autorités publiques depuis le début des années 70. De plus, il est animé par des cadres de valeur à l'image d'Alassane Dialy Ndiaye qui peut être considéré comme le « père » des télécommunications sénégalaises9. C'est sous l'impulsion de cet ingénieur, formé à l'Ecole nationale supérieure des télécommunications (Enst), qu'ont été introduites, en 1972, les télécommunications par satellites et réalisées les études ayant abouti à la connexion du Sénégal au réseau mondial des câbles-sous-marins avec la mise en service d'Antinéa, Fraternité I et II ainsi qu'Atlantis I entre 1973 et 1982. Nommé en 1973 à la tête de Télé-Sénégal, société d'économie mixte chargée de la gestion des télécommunications internationales10, Alassane D. Ndiaye anticipe l'évolution du secteur. Dans un rapport, rédigé en 1981 à l'attention des autorités, il préconise la fusion des activités de télécommunications nationales et internationales jusqu'alors gérées par l'Office des postes et des télécommunications (Opt) et Télé-Sénégal. Ses recommandations aboutissent en 1985 à la première réforme d'envergure du secteur des télécommunications avec la séparation des activités postales et de télécommunications débouchant sur la création de l'Office de la poste et de la caisse d'épargne (Opce) et la fusion de l'Opt et de Télé-Sénégal qui donne naissance à la Société nationale des télécommunications du Sénégal (Sonatel). Nommé Directeur général de la Sonatel, Alassane D. Ndiaye procède à la numérisation de tous les circuits de commutation et de transmission et introduit la transmission de données par paquets avec la création du réseau X25 Senpac en 1988. Résultat de cette politique, qui sera poursuivie par son successeur Cheikh Tidiane Mbaye, à la veille de la privatisation, l'infrastructure de télécommunications est numérisée à plus de 90 % et comprend près de 36.600 km de câbles en fibre optique ce qui en fait une des plus modernes d'Afrique. Le nombre de lignes téléphoniques principales est de 133.000 lignes, soit une télédensité de 13 lignes principales pour 100011 et grâce à un réseau de télécentres privés, 65% des habitants sont couverts par la téléphonie. Sur le plan des services, le vidéotex (1994), l'audiotex (1995), Internet et la téléphonie mobile (1996) ont été successivement introduits. Bien qu'ayant fortement investi dans l'extension et la modernisation de son réseau, la Sonatel est peu endettée12 et par ailleurs son personnel présente le taux de productivité le plus élevé du secteur des télécommunications en Afrique (Lemesle 2002 : 57). Son capital, qui était de 3,5 milliards de Francs CFA13 en 1985, a été porté à 50 milliards de Francs CFA en 1993, son chiffre d'affaires est de 62.013 milliards de Francs CFA pour un bénéfice net de 12.605 milliards de Francs CFA et elle dispose d'un cash-flow de 24.445 milliards de Francs CFA. Globalement, les télécommunications contribuent pour 2,6% du Pib14 ce qui est remarquable pour un pays en voie de développement. Seuls bémols à ce tableau, les zones rurales ne sont peu couvertes par les services de téléphonie, les sommes dues par le secteur public ont du mal à être recouvrées et surtout 75% des recettes de la Sonatel proviennent des balances de trafics ce qui n'est pas viable dans le nouvel environnement qui se dessine. Comme, on le voit, c'est donc une entreprise performante, saine, plutôt bien gérée et évoluant dans un secteur d'avenir que l'on s'apprête à privatiser et non un canard boiteux.</p> <h3 class="spip"> Quand la privatisation bénéficie à une entreprise publique…</h3> <p>En 1996, les autorités lancent un appel d'offres international pour la sélection d'un « partenaire stratégique » qui se voit proposer l'achat du tiers du capital de la Sonatel pour un prix minimal de 55 milliards de Francs CFA. L'opération n'a pas l'assentiment de la Banque mondiale qui s'oppose au maintien du monopole sur les services de base accordé à la Sonatel15, mais le gouvernement sénégalais décide de passer outre (Dianté 2003). L'opération est un succès et de nombreux investisseurs déposent leurs offres parmi lesquels le français France Télécom, Telia overseas, un consortium piloté par l'opérateur historique suédois et composé de la société américaine The Walter Group, de la société taïwanaise China Telecommunications Services (Cts) et de la société sénégalaise Senecom Partners ainsi que les opérateurs nationaux d'Afrique du Sud, d'Arabie saoudite, de Malaisie, du Maroc, du Portugal, etc. En novembre 1996, Telia overseas remporte l'adjudication avec une offre de 137,3 millions de dollars (Hawkins & Shepher 1997). Cependant, les négociations entre l'Etat et Telia achoppent sur la garantie de l'emploi, le plan d'investissement à long terme et la durée de la concession que l'Etat souhaite de vingt ans tandis que Telia veut la limiter à sept années (Mbengue 2007). Après quatre mois de négociations infructueuses, Telia retire son offre et des négociations s'engagent avec France Télécom qui figure en deuxième place sur la liste des adjudicataires. L'Etat sénégalais s'accorde finalement, avec l'opérateur historique français qui accepte de signer une concession pour une durée de vingt ans et verse la somme de 70 milliards de Francs CFA (Dianté 2003). Ironie de l'histoire, l'opérateur historique sénégalais tombe, à l'occasion de sa privatisation, sous la coupe de France Télécom, une société dans laquelle l'état français détient une participation majoritaire16.</p> <h3 class="spip"> De bons résultats financiers…payés par les consommateurs</h3> <p>L'introduction du titre Sonatel à la Bourse régionale des valeurs mobilières (Brvm) de l'Union économique et monétaires ouest africaine (Uemoa) d'Abidjan (Côte d'ivoire) en octobre 1998 est une première en Afrique de l'Ouest. Quelques 9.000 sénégalais souscrivent des actions17 et au total la vente rapporte plus de 14 milliards de Francs CFA à l'Etat. Introduit sur le marché à la cote de 22.000 Francs CFA, le titre devient rapidement la valeur phare de la Brvm, dont il représente entre 40 % et 50 % de la capitalisation boursière selon les années18. Après une phase de faible croissance entre 1998 et 1999, le titre Sonatel subit les conséquences de la crise ivoirienne et chute jusqu'à atteindre son cours d'introduction. Cependant, à partir de 2003, le retour des fonds d'investissements étrangers le fait repartir à la hausse et il clôture 2005 à 67.015 Francs CFA. En 2006, il franchit la barre des 100.000 Francs CFA pour atteindre le cours record de 194.995 Francs CFA en février 2008. Alors que certains analystes prévoient qu'elle atteigne les 200.000 Francs CFA, voire même les 250.000 Francs CFA19, l'action Sonatel s'inscrit de nouveau à la baisse pour voir son cours se stabiliser autour de 130.000 Francs CFA à la fin du mois de décembre 2008 suite au repli des investisseurs étrangers qui reconsidèrent leurs stratégies de placements du fait de la crise économique mondiale20. Malgré ces fluctuations, le titre Sonatel enregistre une capitalisation boursière de 1300 milliards de Francs CFA en 200821 soit 26 fois le montant de son capital réel. Ces bons résultats reposent sur le fait que les activités du groupe, tirées par la téléphonie mobile, ont fortement progressé au Sénégal (Sagna 2008) et se sont étendues au Mali (2002), en Guinée et en Guinée-Bissau (2006). Le chiffre d'affaires de la Sonatel est ainsi passé de 90.695 milliards de Francs CFA en 1998 à 529.552 milliards de Francs CFA en 2008, soit une progression de 483,9%, pendant que son résultat net progressait de 229% passant de 47.660 milliards de Francs CFA à 156.825 milliards de Francs CFA. De son côté, le dividende par action a augmenté de 400%, passant 2340 Francs CFA en 1998 à 11.700 Francs CFA en 200822 et son Price earning ratio23 n'a jamais été inférieur à 4 s'élevant même à 10 en 2007.</p> <p><span class='spip_document_876 spip_documents spip_documents_center'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L500xH243/imagsagna-038d0.jpg' width='500' height='243' alt="" style='height:243px;width:500px;' /></span> Source : Brvm</p> <p>Le succès du titre s'explique surtout par le montant de la marge opérationnelle de la Sonatel24. En effet, alors qu'en 2007 Vodafone et AT&T, leaders mondiaux du secteur des télécommunications, affichaient des marges opérationnelles respectives de 26,4%, et de 35,8%, celle de la Sonatel était de 56,2%25. Mieux en juin 2009, cette marge s'établissait à 59%, en hausse de 4,8% par rapport à l'année 200826, tandis que celle du groupe France Télécom était de 34,7% en baisse de 0,7% par rapport précédente27. Si de tels résultats ont été possibles, c'est grâce à une conjonction particulière où interagissent un marché de la téléphonie mobile en très forte expansion28, une concurrence limitée, l'utilisation de technologies et de solutions techniques déjà expérimentées, des tarifs relativement élevés, l'absence d'un véritable mouvement consumériste capable de faire pression sur les opérateurs et une régulation faible qui n'impose guère de contraintes à l'opérateur historique. La réussite financière de la Sonatel privatisée a donc été largement payée par les consommateurs sénégalais du fait d'une régulation très imparfaite du marché.</p> <h3 class="spip"> Immobilisme dans la téléphonie fixe</h3> <p>Le monopole de la Sonatel sur la téléphonie fixe ne l'a guère encouragé à développer cette activité. Dès 2001, la Sonatel a cessé de développer son réseau en cuivre et le nombre de lignes fixes a très faiblement progressé, passant de 140.000 en 1998 à 240.000 en 2008, soit un taux de pénétration de 2,27%. Derrière ces chiffres, se cache en réalité une baisse du nombre de lignes entamée depuis l'année 2007 et s'expliquant principalement par la fermeture progressive des télécentres dont le nombre est passé de plus 24.000 en 2006 à moins de 5000 en 2009. En effet, après avoir joué un rôle important dans la démocratisation de l'accès au téléphone et contribué à la création de près de 30.000 emplois, ils ont été tués à petit feu par la politique tarifaire et commerciale de l'opérateur historique. Bien qu'ayant été parmi les plus gros clients de la Sonatel, ils n'ont jamais pu obtenir le moindre traitement de faveur et se sont vu refuser la possibilité d'acheter leurs unités en gros, la Sonatel se contentant d'accorder des ristournes aux plus performants. De plus, en quinze années d'existence, ils n'ont fait l'objet d'aucune innovation de quelque nature que ce soit pendant que la téléphonie mobile bénéficiait de campagnes publicitaires, de nouveaux services, de baisses des prix des abonnements et des communications et de nombreuses opérations de promotion offrant des crédits de communication à la clientèle. De ce fait, les télécentres, en lesquels beaucoup voyaient un support pour le développement de l'accès collectif à Internet ou encore la création de centres multiservices, ont quasiment disparus et ceux qui subsistent voient leurs activités tourner au ralenti (Sagna 2009). Outre, la disparation de nombreux emplois, la fermeture des télécentres a pour conséquence de réduire les possibilités d'accès au téléphone. Certes, la téléphonie mobile s'est fortement développée et pratiquement tous les villages du pays sont couverts par les services de téléphonie29 mais cela ne signifie pas pour autant que la question du service universel est résolue. En effet, si le problème de la disponibilité de l'infrastructure d'accès ne se pose quasiment plus, avec l'utilisation des technologies sans fil, il n'en reste pas moins que 1.000 des 14206 villages du Sénégal possèdent un point d'accès public au téléphone30. La problématique du service universel se pose toujours puisque l'offre de services n'est que virtuellement accessibles31 car son utilisation effective bute sur la question de l'abordabilité, pour tous ceux qui disposent de très faibles revenus.</p> <h3 class="spip"> Des services à valeur ajoutée en quête de rentabilité</h3> <p>Une autre conséquence du monopole de la Sonatel a été d'étouffer le développement des services à valeur ajoutée pourtant régi par un régime de libre concurrence totale. En effet, alors qu'il existait près d'une quinzaine de fournisseurs de services Internet (Fsi)32 dans les années qui suivirent la connexion du Sénégal à Internet, ceux-ci ont peu à peu été contraints de cesser leurs activités, compte tenu de la concurrence déloyale exercée par Télécom-Plus puis par Sonatel multimédia33. S'appuyant sur son monopole en matière d'accès à la bande passante Internet internationale, la Sonatel a pratiqué des prix de revente au détail sur les liaisons spécialisées qui n'ont pas permis aux Fsi d'exercer rentablement leur activité. Par ailleurs, commercialisant des liaisons spécialisées dont les débits furent pendant longtemps limités à moins d'un mégabits/seconde tandis que Télécom-Plus accédait directement au backbone international, la Sonatel a contribué, par cette pratique, à discréditer les autres Fsi aux yeux de la clientèle car ceux-ci étaient incapables de faire jeu égal avec elle en matière de confort de connexion. Enfin, Télécom-Plus a jouit pendant longtemps de l'avantage comparatif constitué par le réseau commercial de l'opérateur historique sur lequel il a pu s'appuyer à une époque où « services de télécommunications » rimait toujours avec Sonatel dans l'esprit d'une majorité de Sénégalais. Résultat de cette situation contre laquelle le régulateur n'a jamais joué le rôle qui aurait dû être le sien en imposant une régulation asymétrique à l'opérateur historique, seuls subsistent actuellement deux revendeurs de services Adsl. L'absence d'une véritable concurrence sur ce segment de marché est sans doute un des facteurs expliquant le faible taux de pénétration d'Internet dont le nombre d'abonnés était de 57.265 en juin 2009 soit un taux de pénétration de 0,47%, même si par ailleurs le nombre d'utilisateurs d'Internet était estimé à plus d'un million soit un taux de pénétration de 7,2%34. En effet, en dehors des barrières constituées par le fort taux d'analphabétisme numérique, la cherté du matériel informatique et la faible disponibilité de contenus locaux, le maintien de tarifs Adsl relativement élevés constitue un frein à la pénétration d'Internet dans les ménages et les entreprises. De plus au fil des ans, tous ceux qui ont voulu lancer de nouveaux services en ont été dissuadés soit par la Sonatel du fait des tarifs proposés pour accéder à la bande passante soit par le régulateur en raison de considérations réglementaires. D'un autre coté, nombre de fournisseurs de contenus qui avaient créé des services à valeur ajoutée, tels les jeux par Sms proposés par les chaines de télévision et de radios, ont du cesser leur activité du fait d'une législation inadaptée accordant le monopole des jeux de hasard à la Loterie nationale sénégalaise (Lonase)35. En dehors des centres d'appels, seuls quelques fournisseurs de services, tel Manobi, en partie détenue par la Sonatel, ont pu émerger tout en restant marginaux en termes de volume d'activités et de chiffre d'affaires. La libéralisation n'a donc guère favorisé l'apparition de services complémentaires répondant aux besoins des citoyens à travers l'offre d'une gamme variée d'applications ni servi de base au développement d'une économie de services basées sur les Tic36. Enfin, elle a peu contribué à attirer les investissements directs étrangers dans le secteur.</p> <h3 class="spip"> Une concurrence limitée sur le marché de la téléphonie mobile</h3> <p>En matière de téléphonie mobile, le réseau Alizé, lancé par la Sonatel en septembre 1996, est resté pendant plus de deux ans et demi sans concurrent direct ce qui lui a permis d'en tirer un avantage comparatif certain. Durant cette période, Alizé s'est contenté d'offrir à ses clients une formule post-payée qui limitait l'accès de la téléphonie mobile aux plus nantis compte tenu des tarifs pratiqués. Cependant, sachant que Sentel comptait se positionner sur le pré-payé, Alizé a investi le créneau en proposant, à partir de juin 1998, une offre qui a rencontré rapidement un grand succès. Un an après son lancement, elle compte près de 22.000 abonnés dépassant la formule post-payée qui ne totalise que 16.000 abonnés (Guèye 2002). En avril 1999, le groupe Millicom International Cellular (Mic), qui avait obtenu sa licence en juillet 1998, démarre ses activités sous le label Sentel. Sa part de marché passe rapidement de 15% à 26% entre 1999 et 2001 mais, contrecoup de l'annonce du retrait de sa licence par l'Etat, elle retombe à 20% en 2002 avant de remonter à plus de 35% en 2008. Le démarrage des activités d'un troisième opérateur en janvier 2009 a certes apporté un regain de dynamisme au marché de la téléphonie mobile mais il n'a pas véritablement exacerbé la concurrence. En effet, Expresso a adopté un positionnement mettant l'accent sur les capacités et les qualités de son réseau 3G, exigeant l'utilisation de terminaux spécifiques incompatibles avec les réseaux de la Sonatel et de Sentel, et proposant des tarifs du même ordre que les deux autres opérateurs, ce qui a présenté un intérêt limité pour les consommateurs. De plus, la non-portabilité des numéros, n'incite pas les clients à changer d'opérateurs ce qui constitue un frein à l'exercice d'une large concurrence dans ce segment de marché. Au final, si l'instauration de la compétition a indubitablement participé au succès de la téléphonie mobile (Chéneau-Loquay 2002) et a contribué à une baisse des coûts du ticket d'entrée comme de celui des télécommunications, la situation de duopole a fortement limité l'intensité de la concurrence pendant plus d'une décennie. Avec 64,3% des parts de marché37, l'opérateur historique reste ultra dominant sur ce segment de marché, fort de sa position de premier entrant et quelque peu aidé par l'Etat qui, à deux reprises, a annoncé le retrait de la licence accordée à Sentel.</p> <h3 class="spip"> Le monopole public est mort vive le monopole privé !</h3> <p>Le code des télécommunications de 1996 avait prévu trois régimes pour l'exploitation des services de télécommunications : le monopole pour la téléphonie fixe, les liaisons spécialisées, la communication de données et l'accès à l'international, la concurrence limitée pour la téléphonie mobile et la libre concurrence pour les services à valeur ajoutée. Il a été modifié en décembre 2001 par l'adoption d'un nouveau code des télécommunications instituant cinq régimes juridiques à savoir la licence pour l'établissement et/ou l'exploitation de réseaux de télécommunications ouverts au public, l'autorisation pour la mise en œuvre de réseaux indépendants, l'agrément pour les équipements radio électriques et leur installation, la déclaration pour les services à valeur ajoutée et la liberté pour les réseaux internes, les réseau de télécommunications d'entreprise et les installations radioélectriques exclusivement composées d'appareils de faible puissance et de faible portée. C'est dans cet environnement légal et réglementaire que s'est inscrit le fonctionnement de l'opérateur historique qui a bénéficié d'un monopole de jure sur les services de base jusqu'en juillet 2004. Cela étant, le troisième opérateur, qui s'est vu attribuer une licence globale en septembre 2007, ayant décidé de limiter, dans un premier temps, ses activités à la téléphonie mobile, la Sonatel continue de jouir d'un monopole de facto sur les télécommunications de base. Du fait d'une libéralisation mal régulée, elle exerce une position dominante sur neuf des dix segments du marché des télécommunications et partage cette position avec Tigo sur le segment de la téléphonie mobile38. Il n'est donc pas exagéré d'affirmer que la privatisation de la Sonatel et la libéralisation du marché des télécommunications ont eu pour résultat de substituer un monopole privé à un monopole public. De plus, à l'exception de la venue d'un troisième opérateur et de la création de quelques entreprises de téléservices (gestion de la relation client, saisie, traitement documentaire, etc.), la privatisation n'a pas entrainé un accroissement significatif du volume des investissements directs étrangers comme cela a d'ailleurs été constaté dans d'autres parties du continent africain (Mezouaghi 2005). Pour l'essentiel, les lacunes observées dans la libéralisation du marché des télécommunications découlent des faiblesses de la régulation pourtant censée être la pièce du dispositif du libre marché.</p> <h3 class="spip"> Régulation : Impartialité et transparence aux abonnés absents</h3> <p>Dans le cadre du monopole naturel des télécommunications, la régulation du secteur des télécommunications a pendant longtemps été l'apanage de l'opérateur historique. Dès 1985, l'Etat a officiellement retiré les fonctions de régulations à la Sonatel mais dans les faits, elle a continué à les assumer. La création, en 1994, de la Direction des études et de la réglementation des postes et télécommunications (Derpt) au sein du ministère des télécommunications avec pour mission l'approbation des tarifs des services de télécommunications, la délivrance des autorisations d'exploitation de services, la gestion de l'attribution des fréquences radioélectriques, etc.39 n'y changera pas grand-chose puisqu'il s'est en fait agi du transfert d'une ancienne direction de la Sonatel au sein du ministère des télécommunications (Kane 2008 : 157). De même, malgré l'adoption du code des télécommunications de 1996 qui introduisit la séparation entre la fonction d'exploitation et de réglementation en transférant la politique réglementaire au ministère des télécommunications, la Sonatel continuera, bien après sa privatisation, à gérer la régulation. Dans le cadre de l'Accord général sur le commerce et les services (Agcs), le Sénégal avait souscrit une série d'engagements additionnels dont celui de créer, avant le 31 décembre 1997, un organe de régulation40. Cependant, annoncée puis repoussée à plusieurs reprises, la création d'une agence de régulation devra attendre l'adoption du code des télécommunications de décembre 2001 pour être inscrite dans la loi41. Le ministère des télécommunications ayant disparu de l'organigramme gouvernemental à cette époque, l'Art se verra confier les taches de régulation et le pouvoir de réglementation, la rendant à la fois juge et partie. Sa création est effective à partir de janvier 2002 suite à la nomination de Mactar Seck comme Directeur général, cependant, il faudra attendre avril 2003 et la signature des décrets organisant son fonctionnement et nommant les membres du Conseil de régulation pour qu'elle devienne pleinement opérationnelle.</p> <p>Disposant de faibles ressources humaines, provenant pour l'essentiel de la Sonatel, et n'ayant pas les équipements techniques nécessaires à l'accomplissement de ses missions, notamment en matière de contrôle des fréquences, l'Agence de régulation des télécommunications (Art), connaît des débuts difficiles. Comble de malheur, alors qu'elle commence à prendre ses marques, son directeur général, injustement suspecté de vouloir vendre illégalement des fréquences, est limogé en mai 2003, sans qu'aucune explication ne soit officiellement donnée42. Le profil de son remplaçant, Malick F. Guèye, est quelque problématique. Agé de trente et un ans, cet ancien directeur des grands travaux de l'Agence pour la promotion des investissements et des grands travaux (Apix), possède une très faible expérience du secteur des télécommunications pour n'avoir travaillé en tout et pour tout que deux années chez Neuf Télécom dans le cadre de son premier emploi. En juin 2005, il est d'ailleurs relevé de ses fonctions, suite à une mission de l'Inspection générale d'Etat (Ige) ayant décelé des malversations qui auraient porté sur plusieurs centaines de millions de Francs CFA43. La courte histoire de l'Art a mis en évidence le lien direct unissant le régulateur à la Présidence de la république. Le Conseiller spécial du Président de la république pour les Ntic avait d'ailleurs clairement annoncé, avant même sa création, que l'Art ne serait pas autonome comme le souhaitaient nombre d'acteurs mais qu'elle resterait, au moins dans un premier temps, sous la tutelle de la Présidence de la république44. En réalité, d'autonomie elle n'en aura guère comme le montre la manière dont fut attribuée la troisième licence.</p> <p>En janvier 2005, Joseph Ndong, alors ministre des télécommunications, annonce, à l'occasion de la présentation de la lettre de politique sectorielle des télécommunications, que l'Etat a décidé de lancer un appel d'offres international en vue de choisir un nouvel opérateur, dans le courant du premier trimestre 200545. Cependant ce n'est qu'en novembre 2005, à l'occasion du Sommet mondial sur la société de l'information (Smsi), que les choses semblent prendre forme. Le Directeur général de l'Art, Daniel G. Goumalo Seck, déclare depuis Tunis que le cahier des charges de la licence est en cours d'élaboration et que l'appel d'offres sera lancé en janvier 2006 et précise même que l'Etat a déjà choisi les cabinets, Mc Kinsey, Goldman Sachs et Clifford Chance pour être respectivement ses conseillers sectoriel, financier et juridique46. Sans que l'on sache pourquoi, le délai ne sera pas respecté et pendant plus de dix-huit mois on n'entendra plus parler de cette fameuse licence. Coup de théâtre, en août 2007, l'opinion publique est incidemment informée, par le site d'information en ligne « Nettali », que l'Etat procède à la consultation d'un certain nombre d'opérateurs en vue de l'attribution de la troisième licence47. D'abord démentie, l'information est finalement confirmée par l'Agence de régulation des télécommunications et des postes (Artp)48 qui avoue dans un communiqué avoir demandé à tous les opérateurs qui s'étaient montrés intéressés par l'attribution de la licence globale de télécommunications de remettre une offre avant le 31 août 2007. Le 7 septembre 2007, l'Artp annonce que la licence a été attribuée à la société soudanaise de télécommunications, Sudatel, en raison de la qualité de son offre technique et du fait qu'elle offrait la somme de 200 millions de dollars contre 152 millions de dollars et 105 millions de dollars respectivement proposés par Bintel et Celtel49. Les Sénégalais apprendrons plus tard, à travers un communiqué du Conseil des ministres, que Karim Wade, fils du Président de la république et Thierno Ousmane Sy, Conseiller spécial pour les Ntic du Président de la république, avaient conduits les négociations avec Sudatel et que le Chef de l'Etat était personnellement intervenu à plusieurs étapes du dossier tantôt pour récuser un soumissionnaire tantôt pour demander de réviser à la hausse les prétentions financières de l'Etat, mettant de fait l'Artp totalement hors jeu. En fait, si l'on en croit certaines sources, le principe d'attribuer la licence à Sudatel aurait été arrêté bien avant le lancement de l'appel d'offres et ce dernier aurait été organisé à la demande de l'opérateur afin de protéger ses arrières. Quoi qu'il en soit, l'affaire fit grand bruit d'autant plus que Sudatel était sur la liste noire du Département d'Etat. De son côté, le secteur privé national critiquera l'opération n'ayant obtenu que 15% du capital de l'opérateur alors qu'il avait d'abord demandé à l'Artp de lui réserver 51% des parts avant de limiter ses prétentions à 30%.</p> <p>L'autre affaire ayant fortement hypothéqué la crédibilité de la régulation du secteur, même si l'Artp ne peut en être tenue pour directement responsable, a été celle du bras de fer entre l'Etat et Sentel autour de la question de la réévaluation du montant de sa licence. Attribuée en juillet 1998, sous le régime du Président Abdou Diouf, pour une durée de vingt ans au prix de 50 millions de Francs CFA, la licence de Sentel a été brusquement remise en cause par le nouveau régime issu de l'élection présidentielle de mai 2000. En octobre, un communiqué du Conseil des ministres annonce le retrait de la licence de Sentel à compter du 29 septembre 2000 pour non respect de ses engagements en matière de volume d'investissements, défaillances en termes de qualité et de couverture radioélectrique de son réseau, absence d'information relative à la gestion financière et technique de la licence et non paiement d'une dette de 579 millions de Francs CFA due à l'Etat au titre des redevances. Récusant ces accusations, Sentel n'interrompt poursuit ses activités et des discussions s'engagent en coulisses qui aboutissent, en août 2002, à une « paix des braves ». Les deux parties s'accordent sur le principe de rouvrir des négociations après l'attribution de la troisième licence afin de définir de nouvelles conditions d'exploitation, mutuellement acceptables. A la surprise générale, le 30 octobre 2008, Millicom International Cellular publie un communiqué révélant que l'Etat du Sénégal l'a informé de son intention de révoquer sa licence à partir du 31 octobre 2008. Des informations qui filtrent du dossier, il apparait que l'Etat exige de Sentel la somme de 100 milliards de Francs CFA afin qu'elle puisse continuer à exploiter sa licence. Faisant monter la pression, l'Etat attrait l'opérateur devant les tribunaux et de son côté Sentel saisit le Centre international de règlement des différends liés à l'investissement (Cirdi)50. Alors que l'on semble être au bord de la rupture totale, l'Ambassade des Etats-Unis intervient auprès des autorités afin qu'elles autorisent Tigo à poursuivre ses activités sur la base de la convention de 1998, dans l'attente d'un règlement définitif. Cette affaire a provoqué un profond malaise chez les professionnels du secteur qui y ont vu un mauvais signal adressé aux investisseurs pour qui la garantie de la sécurité juridique et financière est essentielle.</p> <p>Ayant vu quatre directeurs généraux se succéder à sa tête en neuf années d'existence51, l'Artp a beaucoup perdu de sa crédibilité d'autant plus que son fonctionnement repose essentiellement sur le directeur général qui détient le véritable pouvoir de régulation. Alors que sa création devait marquer la fin de l'intervention directe de l'Etat dans la régulation, la pratique a montré que cette dernière était gérée par la Présidence de la république avec un certain parti pris en faveur de la Sonatel52 même si cette dernière a été sanctionnée d'une lourde amende en 200753. Par ailleurs, l'Artp n'a pas su prendre en temps opportun les décisions qui s'imposaient en direction de l'opérateur historique afin que celui-ci n'écrase pas la concurrence. De plus, elle n'a guère contribué à résoudre la question du service universel, le Fonds de développement du service universel des télécommunications (Fdsut) mis en place en 2006 n'étant toujours pas opérationnel et la seule action d'envergure à mettre à son crédit en la matière ayant été l'adjudication d'une licence de service universel dans le cadre du projet dans la région de Matam. Enfin, elle n'a pas su répondre aux attentes des acteurs du secteur qui sont suspendus, depuis des années, à la prise de toute une série de décisions concernant des questions aussi cruciales que la téléphonie sur IP, le dégroupage de la boucle locale, la boucle locale radio, la portabilité du numéro, la sélection du transporteur, etc. Conclusion</p> <p>Dès 2003, certains observateurs questionnaient la « réussite » de la privatisation de la Sonatel et montraient que l'opération avait surtout profité à France Télécom (Jaffré 2003). L'examen des résultats financiers de la Sonatel sur la décennie 1998-2008 confirme ce qui pouvait apparaître à l'époque comme une simple tendance. En effet, la Sonatel a réalisé un bénéfice cumulé de 897 milliards de Francs CFA dont l'essentiel est allé à l'actionnaire principal54, sans compter l'ensemble des transferts internes liés au paiement des prestations de services et autres frais de gestions facturés par France Télécom55 ainsi que les 20% de la croissance du résultat d'activités qui sont prélevés sur le bénéfice avant même la rétribution des actionnaires. Si l'on rapporte ces sommes aux 70 milliards de Francs CFA payés en 1997 pour prendre le contrôle de la Sonatel, il est indubitable que ce fut une opération particulièrement rentable pour France Télécom et ces dirigeants ne s'y sont d'ailleurs pas trompés puisqu'ils ont reconnu que les résultats 2004 de la Sonatel avaient dépassé de vingt cinq fois les projections établies au moment des négociations en vue de son acquisition56. Dans une moindre mesure, l'Etat57, les actionnaires privés et les salariés58 ont été les autres grands bénéficiaires de la privatisation. S'agissant des performances de l'entreprise, si l'on s'en tient à la progression de la téléphonie fixe, les résultats n'ont rien eu d'extraordinaire puisque le nombre d'abonnés n'a progressé que de 72% en dix ans avec un taux de pénétration qui est aujourd'hui de 1,98%59. Si le développement de l'infrastructure a permis une couverture quasi-totale du territoire, il n'en reste pas moins qu'elle n'offre qu'un accès potentiel aux services de télécommunications puisque celle-ci a été réalisée avec des technologies sans fil ce qui ne règle que partiellement la question du service universel. Certes, la téléphonie mobile a fait des progrès impressionnants, avec un taux de pénétration de 51,63%60, mais il faut souligner qu'en dehors de la voix, des sms et de l'Internet mobile, elle fournit bien peu de services ayant une véritable utilité sociale. Par ailleurs, son développement s'est fait aux dépens de l'infrastructure fixe ce qui, à terme, risque d'entraver le déploiement de l'Internet à haut débit. Ceci dit, si l'on se réfère à ce qui s'est produit dans des pays comme l'Algérie, le Bénin ou encore le Mali, le choix de privatiser avant de libéraliser s'est avéré judicieux. Pour ce qui est du volet libéralisation, l'évolution des différents segments du marché montre, qu'en dehors de la téléphonie mobile, l'instauration d'un véritable régime de concurrence n'a pas été au rendez-vous. De plus, le monopole de la Sonatel sur l'accès à l'international combiné à son contrôle sur l'accès au câble sous-marin Sat-3 a eu pour résultat le maintien de prix élevés pour l'accès à la bande passante ce qui a entrainé la disparition de tous les fournisseurs de services Internet, une forte diminution du nombre de cybercentres et finalement la faible progression d'Internet dans la société sénégalaise avec un taux de pénétration de 0,45 en 200961. Derrière ces chiffres, se cachent un très faible taux de connexion des établissements scolaires et sanitaires mais aussi des Pmi-Pme avec toutes les conséquences sociales et économiques qui en découlent en termes de développement humain. Par ailleurs, la position dominante exercée par la Sonatel sur les divers segments du marché des télécommunications a eu pour résultat d'entraver la croissance des services à valeur ajoutée ce qui en retour a entrainé une sous-exploitation des capacités de l'infrastructure de télécommunications en l'absence d'applications et de contenus locaux susceptibles d'intéresser les Sénégalais. Enfin, en ce qui concerne le volet régulation, si la séparation des fonctions opérationnelles et de réglementation a été effective, la mise en place d'un organe de régulation autonome a été tardive alors que certains marchés étaient déjà ouverts à la concurrence ce qui a contribué à créer un vide qui a profité à l'opérateur historique. Par ailleurs, l'attitude du régulateur dans le règlement des contentieux et l'attribution des licences de télécommunications a montré qu'il n'avait été capable de mettre en place des procédures transparentes, crédibles et impartiales sans parler de sa subordination vis-à-vis de la Présidence de la république, même s'il est compréhensible que l'Etat ne reste pas indifférent à ce qui se passe dans un secteur aussi stratégique (Plane 2002). Le faible niveau de collégialité dans la prise de décision, l'inaction face à la domination du marché par l'opérateur historique, la lenteur à trancher les questions critiques intéressant le secteur et la confusion des pouvoirs de régulation et de réglementation sont autant d'éléments qui ont également contribué à hypothéquer la mise en place d'une régulation acceptée par tous, de telle sorte qu'à bien des égards, la situation n'a pas beaucoup changé par rapport à ce qu'elle était auparavant. Au vu tout de ce qui précède, le bilan de la réforme du secteur des télécommunications au Sénégal montre donc qu'elle n'a pas été le remède magique qui devait apporter des solutions à tous les maux du secteur des télécommunications. Tous ces effets n'ont certes pas été négatifs mais ses bénéfices ont plus profité à quelques minorités (France télécom, actionnaires privés, équipementiers étrangers, etc.) qu'à la grande majorité des Sénégalais pour qui les opportunités offertes par la Société de l'information restent toujours inaccessibles. Par contre, elle a commis un dégât irrémédiable (?) en dépossédant le Sénégal d'un instrument de politique susceptible de jouer un rôle-clé dans sa stratégie de développement politique, économique, social et culturelle à l'échelle locale, nationale, sous-régionale et continentale.</p> <h3 class="spip">Références bibliographiques </h3> <p>Agence de régulation des télécommunications et des postes (2009), « Le marché de la téléphonie fixe », Observatoire trimestriel, Dakar. <br />––––– 2009, « Le marché de l'Internet », Observatoire trimestriel, Dakar. <br />––––– 2009, « Le marché de la téléphonie mobile », Observatoire trimestriel, Dakar. <br />––––– 2009, « Rapport annuel d'activité 2008 », Dakar. <br />Azam J.P., Dia M. & N'Guessan T. Telecommunication sector reforms in Senegal. World Bank Policy Research Working Paper 2894, September 2002, p. 26 <br />Chéneau-Loquay A. Les territoires de la téléphonie mobile en Afrique. Netcom vol. 15, n° 1-2 sept. 2001. <br />Dianté C.Y. 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Le 29 octobre, jour de publication de cet article, est aussi celui des 40 ans de la mise en service du réseau de l'ARPA (Agence des projets de recherche du département de la Défense américain) Ce mois-ci, on célèbre les anniversaires de faits qui ont bouleversé le (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique2.html" rel="directory">Articles / Publications</a> / <a href="http://vecam.org/mot17.html" rel="tag">Creative Commons</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot66.html" rel="tag">Recherche</a>, <a href="http://vecam.org/mot68.html" rel="tag">Revue-reseau-TIC</a> <div class='rss_chapo'><p>Ce mois-d'octobre 2009, on célèbre les anniversaires de faits qui ont bouleversé le monde : les 80 ans de la précédente crise financière, les 70 ans de la déclaration de la deuxième guerre mondiale ou les 20 ans de la chute du mur de Berlin. Le 29 octobre, jour de publication de cet article, est aussi celui des 40 ans de la mise en service du réseau de l'ARPA (Agence des projets de recherche du département de la Défense américain)</p></div> <div class='rss_texte'><p>Ce mois-ci, on célèbre les anniversaires de faits qui ont bouleversé le monde : les 80 ans de la précédente crise financière, les 70 ans de la déclaration de la deuxième guerre mondiale ou les 20 ans de la chute du mur de Berlin.</p> <p>C'est aussi l'anniversaire de la mise en service du réseau de l'ARPA (Agence des projets de recherche du département de la Défense américain) : ce jour là, le 29 octobre 1969, dans la salle de calcul du département informatique de l'Université de Californie à Los Angeles, il n'y avait ni journaliste, ni photographe, ni homme d'affaire. Simplement une bande d'étudiants, doctorants, leurs professeurs et un ingénieur de la société BBN à qui avait été confié le développement du logiciel des commutateurs de paquets du réseau.</p> <p>Le professeur Léonard Kleinrock raconte sobrement cette discrète éclosion <a href="#note_1">[1]</a> : il est aux commandes, entouré des étudiants membres du groupe de travail sur le réseau (NWG ) : il tape sur un simple terminal un premier caractère de l'ordinateur Sigma 7 (commercialisé en France par la CII sous le nom de 10070) vers celui du Stanford Research Institute (SRI) près de San Francisco, puis un second. Au troisième le logiciel « plante ». C'était il y a exactement quarante ans. J'étais le seul européen de la bande.</p> <p>Un projet utopique, animé par des universitaires, sans participation industrielle, prenait corps. Tous nous avions plus ou moins conscience de participer à l'émergence d'un projet riche en promesses. Aucun n'aurait pourtant osé imaginer l'avenir qu'a connu et que connaît l'internet. A travers maints rebondissements, du réseau de l'ARPA (le nom d'Arpanet n'apparaît qu'en 1972) au « web 3.0 », l'internet s'est depuis imposé comme un outil incontournable du monde d'aujourd'hui et de demain si l'on en croit les projections de Joël de Rosnay pour le web 4.0 <a href="#note_2">[2]</a>. Quels caractères génétiques ont donc permis à cette petite pousse de devenir un tel baobab ?</p> <p>Sa chance a bien sûr été la mise en œuvre des technologies de communication numériques, de la miniaturisation des circuits et l'enclenchement du cercle vertueux, d'une technologie reproductible et de plus en plus dense, proposée à un public de plus en plus large, et donc de moins en moins coûteuse. Sa chance a aussi été la déréglementation des télécommunication et la mondialisation de l'économie dont il a par ailleurs été un outil stratégique.</p> <p>Mais pourquoi l'Arpanet et son successeur l'internet a-t-il finalement balayé les projets concurrents ? Les ingrédients du succès étaient déjà dans l'embryon du réseau ARPA né de la rencontre de visions, d'objectifs et de personnalités diverses, voire contradictoires : militaire, universitaire ou libertaire.</p> <p>Le souci d'inspiration militaire était l'invulnérabilité : d'où le choix pour le réseau de transmission, de la technique de la commutation de paquets : l'information peut passer par n'importe quel chemin d'un réseau maillé de commutateurs de paquets ( les IMP) ; si l'un d'eux est détruit les communications ne sont pas perturbées.</p> <p>Les universitaires ont fourni les premiers sites, développé des spécifications en toute indépendance des constructeurs et des grands opérateurs de télécommunications, inventé les premières applications . Les contrats de l'ARPA leur assuraient l'indépendance financière nécessaire. Le partage des ressources, en matériel, logiciel, données ainsi que des ressources humaines disponibles sur le réseau était un objectif majeur. S'y ajoute une culture de l'échange et du partage. Le réseau devient vite aussi un moyen de soumettre à la communauté des utilisateurs des algorithmes à vérifier, des programmes à tester, des données à archiver. Il deviendra un levier pour les promoteurs du logiciel libre. Il a su galvaniser des énergies et des intelligences désintéressées, individuelles et collectives.</p> <p>Enfin les jeunes chercheurs de l'UCLA n'étaient pas insensibles à l'air du temps libertaire qui y régnait : l'hiver 1969-1970 fut aussi celui de la contestation dans les universités américaines : une sorte de mai 68 sur fond de guerre du Vietnam de plus en plus mal supportée par les étudiants et de révolte des minorités ethniques. C'est à l'UCLA qu'enseignait Angela Davies, militante communiste sympathisante des Black Panthers. La philosophie qu'ils ont inoculé au réseau à travers ses spécifications était fondée sur l'indépendance, la liberté, la transparence, le partage et le pragmatisme. Dès le départ, en mai 1968, ils ont institutionnalisé un système de spécifications ouvertes et publiques, basé sur la compétence, la reconnaissance mutuelle et le consensus qui s'est révélé par la suite être l'un des facteurs de succès majeurs du projet. Les <cite>« request for comments »</cite> (RFC) ont défié le temps : 5689 RFC ont été publiés en 40 ans et toujours avec la même sobriété de présentation. L'ensemble des RFC aujourd'hui disponible sur l'Internet constitue une extraordinaire "mémoire" du processus collectif de construction et d'évolution du réseau. La liberté d'expression deviendra un cheval de bataille des pionniers de l'Internet : sur le réseau, tout doit pouvoir se dire, il est " interdit d'interdire " ; à chacun de faire montre d'esprit critique, de filtrer et de recouper l'information. L'usage exclusif au départ de la langue anglaise par contre montre combien ces gènes étaient monoculturels…</p> <p>Vingt ans après sera introduit par une équipe de recherche européenne le world wide web, la Toile sur laquelle ont peut naviguer en suivant des liens qui relient les informations où qu'elles se trouvent. Cette application viendra compléter les atouts de l'internet et lui permettra de faire son entrée au début des années 90 sur la scène politique, économique, sociale et sociétale mondiale, et d'éliminer les réseaux industriels concurrents.</p> <p>Leur pragmatisme enfin est bien caractérisé par la célèbre affirmation : « nous récusons rois, présidents et vote. Nous croyons au consensus et aux programmes qui tournent » <a href="#note_1">[3]</a>.</p> <p>Le succès de l'internet, nous le devons aux bons choix initiaux et à la dynamique qui en est résultée : la collaboration de dizaine de milliers d'étudiants, ou de bénévoles apportant leur expertise, tels par exemple ces centaines de personnes qui enrichissent continuellement des encyclopédies en ligne telles que Wikipédia. En France certains avaient détecté la jeune pousse prometteuse, avaient vu dans l'Arpanet un signal faible, porteur d'avenir. Malheureusement ceux qui perçoivent ne sont pas ceux qui décident et ceux qui proposèrent une approche calquée sur l'internet, ne furent pas suivis : en s'en tenant à des arguments techniques économiques, ou d'indépendance nationale, avec Transpac puis Teletel, et tout en marquant des points sur le court terme, on a choisi le repli sur notre pré carré et ignoré les ressorts humains qui ont permis à l'internet de finalement l'emporter.</p> <p>L'internet a été au fil des ans une création continue qui a su minimiser les contraintes d'usage. Il offre des outils puissants et accessibles à tous, ce qui a largement profité à des organisations ne disposant pas de moyens financiers importants pour communiquer : ainsi le secteur associatif en a-t-il été un grand bénéficiaire quand il a su se l'approprier. Aujourd'hui l'internet, puissant levier pour l'action de la société civile, est devenu un outil stratégique de la solidarité mondiale, peut être la source d'une citoyenneté plus participative. Il permis la chute du mur de la communication mondiale. Ne soyons pas naïfs : peuvent s'y exprimer le bien comme le mal, le narcissisme comme la convivialité, l'ordre comme le désordre.</p> <p>Néanmoins pourquoi ne pas dédier ce quarantième anniversaire à ces très nombreux contributeurs passionnés mais restés obscurs qui au fil des années ont consacré leur temps libre, jour et nuit, à tisser cette toile, à lui apportant un élément de structure, ou de contenu, la gorgeant de leur savoir faire et de leurs connaissances, l'animant et l'imposant comme l'outil du savoir et de la communication universels. En reconnaissance de ce rôle pionnier, l'usager doit pouvoir conserver un droit de regard sur l'internet et ses évolutions dont il est codétenteur. Au moment où l'internet devient un pilier incontournable de l'organisation de notre société, où le développement d'une culture démocratique sur l'internet pourrait être menacé et où leur accessibilité sur l'internet pourrait être le prétexte pour des entreprises à but lucratif de s'approprier des composants de ce qui jusqu'à maintenant était considéré comme des biens communs, l'outil l'internet doit être reconnu comme un bien public, et la liberté d'y accéder comme un droit fondamental.</p> <p><strong>Notes</strong></p> <p><a name="note_1"] </a></p> <p>UCLA's Leonard Kleinrock on the first Internet connection <br /> <a href="http://newsroom.ucla.edu/portal/ucla/electronicplay.aspx?fid=28176 "> http://newsroom.ucla.edu/portal/ucla/electronicplay.aspx?fid=28176</a></p> <p><a name="note_2"] </a></p> <p><a href="http://www.dailymotion.com/video/x7g070_joel-de-rosnay-devoile-le-web-40_tech">http://www.dailymotion.com/video/x7g070_joel-de-rosnay-devoile-le-web-40_tech</a></p> <p><a name="note_3"] </a></p> <p><cite>We reject kings, presidents and voting. We believe in rough consensus and running code</cite></p></div> Panel C : Formes émergentes de luttes pour la démocratisation des sciences http://vecam.org/article1089.html http://vecam.org/article1089.html 2009-02-12T19:45:42Z text/html fr Démocratie Creative Commons vecam-F Recherche Mariana Tamari, Epidemia, Brésil, Modératrice du Panel La connaissance est un élément central des secteurs de pointe du capitalisme. Nous sommes dans la société de la connaissance, ces facteurs ont généré des disputes politiques dans toute la société, par exemple dans les domaines des OGM, des logiciels libres. Il y a des combats entre le capital et les intérêts sociaux. C'est ce que nous espérons présenter ici. Sergio Amadeu, Rede Libre, Brésil (ancien haut fonctionnaire responsable de l'implentation (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique121.html" rel="directory">2009 Échos du Forum Mondial Sciences & Démocratie</a> / <a href="http://vecam.org/mot11.html" rel="tag">Démocratie</a>, <a href="http://vecam.org/mot17.html" rel="tag">Creative Commons</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot66.html" rel="tag">Recherche</a> <div class='rss_texte'><p><strong>Mariana Tamari, <i>Epidemia</i>, Brésil, Modératrice du Panel</strong></p> <p><span class='spip_document_871 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:186px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L186xH240/DSC08919_Mariana_Tamari-8b1f0.jpg' width='186' height='240' alt="" style='height:240px;width:186px;' /></span>La connaissance est un élément central des secteurs de pointe du capitalisme. Nous sommes dans la société de la connaissance, ces facteurs ont généré des disputes politiques dans toute la société, par exemple dans les domaines des OGM, des logiciels libres. Il y a des combats entre le capital et les intérêts sociaux. C'est ce que nous espérons présenter ici.</p> <p><strong>Sergio Amadeu, <i>Rede Libre</i>, Brésil (ancien haut fonctionnaire responsable de l'implentation des logiciels libres dans l'administration brésilienne)</strong></p> <p>Le mouvement des logiciels libres est l'un des nombreux mouvements de technoactivistes au Brésil.</p> <p>La science et la technologie sont des éléments stratégiques essentiels au capitalisme contemporain. On parle de « capitalisme cognitif ». La logique de l'innovation se substitue à la logique de la répétition propre au monde industriel. Il ne suffit plus de produire des biens, mais inventer en permanence. Le science devient productrice de valeur.</p> <p>La science travaille avec des connaissances codifiées. Le contrôle capitaliste de la science est dans le processus de distribution de l'information. Le contrôle de la connaissance est un élément essentiel dans le modèle de distribution des richesses. Le capitalisme informationnel détient les moyens de bloquer la circulation de la connaissance et c'est au travers de cela qu'il accumule le capital.</p> <p>il y a plusieurs éléments centraux dans ce processus : <br /><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> les Traités internationaux, comme les ADPIC (Accords sur les Droits de Propriété Intellectuelle touchant au Commerce) au sein de l'OMC <br /><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> le système national des brevets <br /><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> le système de financement public et privé des savoirs scientifiques. Ici il n'y a pas de ressources pour financer les technologies ouvertes, si bien que le financement dit ce que nous devons faire. Nos indicateurs sont fermés. Dans mon université, on nous demande « combien de brevets avez-vous déposés » ? <br /><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> la capture de l'activité des centres de recherche des universités par les grandes entreprises. Quand Monsanto finance les recherches biologiques, devinez ce qui sera étudié dans les laboratoires.</p> <p>Ajoutons à ces mécanismes de privatisation, la concentration des épines dorsales des réseaux haut débit qui sont partagées par un très petit nombre d'entreprises.</p> <p>La convergence médias-informatique et télécommunications n'est qu'une face de la tendance de concentration de divers groupes dans le numérique. Qu'est ce qui entraîne Google à entrer dans le marché du mobile ? Dans les réseaux, il y a une tendance naturelle au monopole. Il y a de moins en moins d'entreprises qui maîtrisent ce marché du numérique.</p> <p>Nous pensons que cette concentration représente un grand danger pour la diffusion de la connaissance.</p> <p>Mais il y a dans le numérique un aspect positif fabuleux, c'est la capacité à créer des communs de la science. L'exemple des logiciel libres est significatif. Nous construisons des choses concrètes.</p> <p><strong>Marcos barbosa – <i>Scienta Studia</i>, Université de Saõ Paulo, Brésil</strong></p> <p><span class='spip_document_873 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:207px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L207xH240/marcos_barbosa_modifie-1-7fcad.jpg' width='207' height='240' alt="" style='height:240px;width:207px;' /></span>Le titre de cette table fait mention de nouvelles façons de lutter pour la démocratisation de la science. Ces luttes impliquent les scientifiques, mais cela concerne aussi les sciences humaines et les mouvements. Finalement, cela s'adresse à tous.</p> <p>Devant la crise financière, il y a une tendance à penser le néolibéralisme comme une privatisation de l'économie, du marché et de l'international. Le neolibéralisme est une tendance à transformer tout en marché, entraînant à sa suite tous les domaines, comme la science, l'éducation, l'université. Le tendance à la marchandisation du capitalisme se ressent très fortement dans les universités.</p> <p>Les processus du capitalisme marchand à l'université se traduisent par : déterminer les projets de recherche qui doivent être financés et ceux qui seront abandonnés importance de la propriété intellectuelle modification en profondeur du travail même des chercheurs</p> <p>La science n'est pas une marchandise. Ce sur quoi je voudrais insister concerne le troisième aspect concernant le régime de travail des chercheurs. Comment est évaluée la production scientifique ? Le poids de l'évaluation, suivant des modèles qui changent de surcroît chaque année, occupe une place de plus en plus importante dans la carrière des chercheurs. La recherche est partout mesurée de la même façon. Le chercheur est considéré comme un producteur de technologie intellectuelle. Cela connaît des variations selon les pays, mais le phénomène est le même partout.</p> <p>Nous mesurons de façon quantitative la recherche, la réflexion et l'enseignement supérieur. Il faut faire pression sur les chercheurs pour maximiser leur production. Cela passe par une forme de taylorisme dans la réforme libérale de l'Université. Il y a d'autres raisons à ce taylorisme universitaire, mais on peut s'accorder sur les conséquences néfastes.</p> <p>La première question concerne le stress qui pèse sur les chercheurs. Il s'agit de produire plus, d'être compétitif. Les investissements sont variables, les sujets n'ont pas forcément de durée. Les femmes scientifiques ont là aussi un double poids entre leur vie personnelle et ses charges et la vie universitaire.</p> <p>La question de la responsabilité sociale des chercheurs doit être posée. Les pratiques scientifiques doivent être interrogées. Quelles sont les conséquences sociales des travaux de recherche ? Il faut que le chercheur ait du temps pour commencer à réfléchir à cette question.</p> <p>La réflexion sur la propre pratique du chercheur n'a rien a voir avec les articles publiés dans les revues spécialisées. Ces interrogations ne comptent pas dans les CV des chercheurs. C'est une perspective volée au travail productif. Le taylorisme crée des individus aliénés qui n'ont pas de conscience de l'enjeu de leur travail dans la société. Même ceux qui se posent ces questions, ceux qui font des projets avec les mouvements sociaux sont souvent bloqués dans leur travaux, car les résultats de ce type de projet ne fait pas partie de l'évaluation néolibérale.</p> <p>Le combat pour une science démocratique que nous souhaitons engager ici est essentiel. Il faut travailler avec la partie, aujourd'hui très petite, de la communauté scientifique qui en est consciente. Le changement du régime de travail des chercheurs dans les universités devient une revendication essentielle. la fin du taylorisme universitaire est la base principale de la capacité à mobiliser les chercheurs.</p> <p><strong>Cécile Sabourin, <i>Fédération Québécoise des Professeures et Professeurs d'Université</i>, Québec</strong></p> <p>Quel impact des politiques publiques dans les Universités ?</p> <p>Cette question dépasse les cadres nationaux. L'OCDE travaille depuis plus de 20 ans à ce que les universités participent au régime économique. Depuis la publication en 96 de ce rapport de l'OCDE, les pays ont mis en place une nouvelle façon de gérer les universités, et une nouvelle façon de concevoir les connaissances dans les universités. La recherche est soumise à des critères économiques. Les orientations de la recherche viennent des besoins du milieu des affaires et des lobbies qui définissent les répartitions des crédits.</p> <p>On a imposé la construction d'équipes de recherches de plus en plus grosses, hiérarchisées, internationalisées. Cela découpe plus encore les travaux de recherche. Cela accentue l'hyper spécialisation.</p> <p>Les Universités n'ont guère de choix. Le financement public diminue. Les programmes sont orientés de façon à ce que la liberté de choix diminue en permanence. La recherche publique et la culture universitaires vont devenir de plus en plus difficile à maintenir, y compris dans l'Université publique. Pour obtenir des fonds, on se conforte aux désirs des organismes subventionnaires. Des chercheurs ont abandonné leur liberté académique de façon à pouvoir obtenir les fonds leur permettant de poursuivre la cairrière à laquelle ils aspirent, depuis la stabilité de l'emploi jusqu'à la reconnaissance.</p> <p>On a vu se développer une grande diversité dans les ressources accessibles aux enseignants- chercheurs. Plus les programmes sont ciblés sur les activités économiques, en incluant la défense et la sécurité, plus les ressources sont disponibles. Le modèle privilégie les secteurs économiques de rentabilité à court terme, ce qui en échange ébranle la structure de recherche fondamentale, l'essence même de la notion de communauté scientifique.</p> <p>Dans notre fédération de syndicats d'enseignants, nous voulons mieux comprendre le corps professoral. Qui sont les scientifiques ? Pourquoi leur diversité rend difficile la revendication d'une politique différente ? Certains chercheurs sont satisfaits des politiques choisies. Mais même ceux-là deviennent déboussolés par les changements fréquents des politiques scientifiques.</p> <p>Un tel travail passe par le rétablissement d'un dialogue interne à l'Université. Les chercheurs sont dans un processus compétitif pour des ressources, et donc ont des difficultés à cette réflexion collective. Il faut aussi comprendre les effets sur les personnes des nouvelles formes de gestion publique. Il faut accentuer les pratiques de collégialité plus saines, refuser la mise en compétition permanente. Même si certains chercheurs apprécient cette compétition qui correspond à leur modèle d'excellence.</p> <p>Un mouvement mondial permettrait à tous de mieux comprendre ce problème.</p> <p><strong>Asha Misra et Kashinath Chatterjee, <i>All Indian People Science Network</i>, Inde.</strong></p> <p><span class='spip_document_872 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:199px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L199xH240/DSC08920_Ashra_Mishra-967d4.jpg' width='199' height='240' alt="Asha Misra" title="Asha Misra" style='height:240px;width:199px;' /></span>Comme nous le savons, il n'y a pas beaucoup d'expérience différentes dans la communauté scientifique. Ce que nous essayons de faire en Inde est de regrouper dans un réseau toutes ces expériences, et d'échanger avec les communautés de base. Dans notre pays, les mouvements collectifs sont limités par les diversité ethniques. Notre expérience a donc à voir avec les racines de la science.</p> <p>Nous avons expérimenté une caravane de la science en 1987, ce qui a permis d'envisager les divers moyens de promouvoir et échanger la culture scientifique avec les populations. Ce fut un événement fondateur pour notre mouvement. Une des conséquences en a été la capacité à fixer de réels objectifs populaires pour l'éducation scientifique.</p> <p><strong>Alfredo Wagner Berno de Almeida, <i>Universidade Federal do Amazonas</i>, Coordenador do PNCSA, Brésil</strong></p> <p>Dans les trois dernières années, il y a eu en Amazonie trois événements en relations avec les questions de propriété intellectuelle. Ces trois conférences de Shamans avaient pour titre : « droit de propriété intellectuelle, biodiversité et protection des connaissances traditionnelles »</p> <p>Dans le titre de ces conférences, les sujets de luttes étaient déjà inscrits. La démocratisation de la science passe par la reconnaissance des savoirs des peuples, et la réactivation de l'idée de connaissance scientifique.</p> <p>Nous devons penser ce que nous allons démocratiser. Il y a une lutte contre le biologisme. les Shamans appellent cela la socio-bio-diversité, c'est déjà une forme de rupture.</p> <p>Une deuxième lutte nécessaire serait contre le géographisme, qui limite la science à l'idée qu'il y aurait des faits naturels liés à des territoires.</p> <p>Les shamans ont envoyés une lettre à l'OMC disant, toutes les connaissances traditionnelles sont en danger d'être mise en commerce. Les shamans disent que leurs connaissances n'ont jamais été pensées sur le modèle des brevets. Ce modèle vient de la France du 19ème siècle. C'est un instrument utile au capitalisme de la deuxième révolution industrielle. Le capitalisme est présent de deux façon en Amazonie : l'une qui détruit la forêt, et l'autre qui la met en « réserves » au nom de la biodiversité.</p> <p>En Amazonie, il y a une grande diversité ethnique. Mais l'identité collective est justement fortifiée par cette diversité ethnique. Nous avons un mouvement contraire à ce qui existe dans d'autre continents. Ce sont les mouvements sociaux qui ont amené l'Amazonie à la résistance. Nous essayons de faire une rupture avec cette idée naturaliste et positiviste des sciences, et rompre avec un modèle scientifique,qui a tout transformé en procédures.</p> <p>Nous ne sommes pas partisan de la vulgarisation de la connaissance : il ne s'agit pas de simplifier, mais de complexifier.</p> <p>Je m'oppose à l'idée que la participation des communautés serait un bien. La participation, la recherche action,... est un vocabulaire porté par la banque mondiale et ce type d'organismes.</p> <p>Notre responsabilité de scientifiques est très complexe. Nous devons réfléchir aux méthodes. Le sens, la carte et le musée : pendant longtemps, la culture matérielle s'est classifiée en fonction des objets... qui peuvent être pris par les musées occidentaux. Nous essayons d'aider les communautés sociales à construire leurs propres cartes socio-géographiques, et pour cela à utiliser l'informatique et le GPS. Mais cela rompt avec l'idée de laboratoire. Le laboratoire est importé dans les communautés et ce sont elles qui choisissent ce qu'elles veulent étudier et conserver sur leurs propres cartes.</p></div> <div class='rss_ps'><p>(notes prises en direct par Hervé Le Crosnier, seul responsable des erreurs qui se seraient glissées)</p></div> Panel D – Sciences et démocratie dans un monde soutenable http://vecam.org/article1091.html http://vecam.org/article1091.html 2009-02-12T17:17:58Z text/html fr Démocratie Creative Commons vecam-F Recherche Angelika Hilbeck, Institut fédéral Suissse de technologie, Suisse, Modératrice du panel Je suis chercheur en biologie, et je cherche à rester proche des mouvements sociaux et environnementaux. Or nous devons entendre et comprendre que cela est devenu de plus en plus difficile pour de nombreux chercheurs dans notre domaine. Reiner Braun – Physicien, Institut Max Plank et INES (International Network Of Engineers And Scientists For Global Responsibility), Allemagne Que veut dire « durable » ? (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique121.html" rel="directory">2009 Échos du Forum Mondial Sciences & Démocratie</a> / <a href="http://vecam.org/mot11.html" rel="tag">Démocratie</a>, <a href="http://vecam.org/mot17.html" rel="tag">Creative Commons</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot66.html" rel="tag">Recherche</a> <div class='rss_texte'><p><strong>Angelika Hilbeck, <i>Institut fédéral Suissse de technologie</i>, Suisse, Modératrice du panel</strong></p> <p>Je suis chercheur en biologie, et je cherche à rester proche des mouvements sociaux et environnementaux. Or nous devons entendre et comprendre que cela est devenu de plus en plus difficile pour de nombreux chercheurs dans notre domaine.</p> <p><strong>Reiner Braun – Physicien, <i>Institut Max Plank</i> et <i>INES (International Network Of Engineers And Scientists For Global Responsibility</i>), Allemagne</strong></p> <p><span class='spip_document_865 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:100px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L100xH152/Reiner-Braun_0-e2346.jpg' width='100' height='152' alt="Reiner Braun " title="Reiner Braun " style='height:152px;width:100px;' /></span>Que veut dire « durable » ? C'est un équilibre de différentes idées économiques, sociales et environnementales. Notre problème est de définir ce qui est utile dans les différents secteurs. Comment hiérarchiser les intérêts sociaux et économiques ?</p> <p>Intéressons-nous au partage des informations entre les individus, la société et les générations. Il nous faut respecter les cultures humaines et l'environnement. La véritable question est dans les mains des pays les plus développés. Ces pays exploitent depuis deux cents ans le reste du monde. Le changement de comportement est donc principalement celui du Nord.</p> <p>Qu'est-ce que cela veut dire pour la recherche ? D'abord le développement d'inter et de trans-disciplinarité dans la recherche, et la démocratisation des institutions scientifiques elles-mêmes.</p> <p>Démocratisation de la science c'est changer la hiérarchie des valeurs - dans les institutions scientifiques. Il faut définir un processus démocratique pour définir les axes de recherche, et les sujets d'enseignement. Cela veut dire la fin du mandarinat, l'organisation démocratique à l'intérieur des université, et de nouvelles relations avec la société.</p> <p>Les changements à l'Université ne se feront pas sans changer la place de l'Université dans la société toute entière. C'est lié à une plus grande participation de tous les mouvements et syndicats.</p> <p>Les scientifiques ont des responsabilités pour créer de la démocratie durable. Prenons l'exemple des changements climatiques : à l'origine peu de chercheurs, puis un consensus global qui rend évident les changements majeurs nécessaires pour protéger la planète. Nous avons un même processus qui se déroule actuellement concernant l'agriculture. Un groupe de scientifiques opposés au courant majoritaire de l'industrie agro-alimentaire essaie de définir de nouvelles règles culturales, et commence à gagner un impact mondial déterminant.</p> <p>Les chercheurs doivent sortir de leur tour d'ivoire. Quand les combats de la société et ceux des chercheurs se rencontreront, cela construira réellement des idées nouvelles.</p> <p><strong>Michel Doucin, ambassadeur de la France chargé de la bioéthique auprès de l'ONU.</strong></p> <p><span class='spip_document_866 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:168px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L168xH198/doucin-77fc9.jpg' width='168' height='198' alt="Michel Doucin" title="Michel Doucin" style='height:198px;width:168px;' /></span>Pourquoi notre pays a-t-il nommé une personne chargé de la diplomatie dans un domaine complexe qui regroupe des industries, des associations de la société civile et des gouvernements ?</p> <p>Il y a en France un débat vif sur la bio-éthique, et des propositions d'actions concernant la place des scientifiques dans la société.</p> <p>La bioéthique représente les questions posées par les sciences biologiques et médicales, en terme de respect des droits de l'homme, de durabilité, d'éthique et de morale.</p> <p>La France est « légaliste ». Elle a la volonté d'inscrire dans la loi les préoccupations citoyennes. Ce qui nous a permis d'avoir une Loi de bio-éthique dès 1987. Nous en organisons aujourd'hui la révision. Cette loi de plus de 100 pages touche toutes les questions bio-médicales.</p> <p>Prenons l'exemple du clonage des cellules souches. On a commencé à cloner les animaux, à la suite de la brebis Dolly. Rappelons-nous que Dolly fut conduite à l'abattoir au bout de 6 ans, au lieu des 12 habituels pour ces animaux, car elle avait des maladies de sénescence très précoce. On voit qu'il nous faut prendre du temps avant de valider les expériences scientifiques, car elles posent des questions à plus long terme. Il faut y penser quand on parle aujourd'hui de « clonage thérapeutique ».</p> <p>Ce débat n'est pas limité aux scientifiques et aux politiques, mais doit intégrer l'ensemble de la société. Il y a des orientations diverses entre les scientifique. Mais la biologie a aussi des éléments qui interpellent le religieux. Par exemple quand décide-ton du début de la vie humaine ? Se confond-elle avec la vie biologique, ou avec le développement de la conscience ? On voit que cela a des conséquences importantes, notamment sur la question du droit à l'avortement.</p> <p>Nous souhaitons organiser une grande série de débats, en mobilisant les divers « conseils consultatifs éthiques » qui existent dans de nombreux secteurs. Mais nous souhaitons aussi élargir au delà du territoire national. Nous cherchons des interlocuteurs internationaux afin d'échanger au mieux les méthodes et les questions. Nous cherchons en ce domaine autant des scientifiques, que des ONG ou des mouvements sociaux, afin que le débat couvre réellement des intérêts globaux de la société.</p> <p><strong>D. Raghunandan, <i>All Indian People Science Network</i>, Inde</strong></p> <p><span class='spip_document_867 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:160px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_7068_D_Raghunandan-cd98f.jpg' width='160' height='240' alt="D. Raghunandan" title="D. Raghunandan" style='height:240px;width:160px;' /></span>Je voudrais vous parler aujourd'hui de l'aspect « alternative de développement » du travail de l'AIPSN.</p> <p>Le processus capitaliste et ses structures nous invite à séparer la science des autres connaissances. Tous les sujets scientifiques sont l'objet de contestations.</p> <p>La question de la relation entre la science et la technologie ne me semble pas avoir été suffisamment suivie hier. La technologie est sociale, et ouvre toujours plusieurs options. Il y a différentes manière de produire... et chaque manière porte en elle des relations différentes à la société. Il n'est que penser à la question de la production d'énergie.</p> <p>Les solutions techniques entre l'énergie solaire et nucléaire portent des modèles différents. Les relations des gens avec le savoir et les compétences sont mise en jeu. Quel rôle jouent les institutions scientifiques pour aider les gens à imaginer une bonne science qui offre de réelles solutions.</p> <p>Il y a dans la société, à côté des chercheurs, de nombreux groupes qui portent un savoir technologique, à l'image des paysans.</p> <p>Un autre exemple est celui des potiers qui travaillent avec les céramiques traditionnelles. Il s'agit de transformer l'artisanat de céramique par un débat permet de mécaniser leur production tout en conservant les forces de la méthode traditionnelle, et son adaptation aux usages locaux. Ce fut l'objet d'un travail conjoint mené par notre association et des communautés de potiers. Le processus manuel est devenu plus formel. On remplace le four à feu par un four à biogaz. Ils ont dès lors appris à fabriquer plusieurs types de céramiques. Ce type de transfert de technologie et d'évolution à partir des techniques connues des populations est répété dans de nombreux secteurs, souvent importants, comme le travail du cuir.</p> <p>Ceci nous donne des exemples de stratégies pour des systèmes durables, avec un faible entropie.</p> <p>Ce que l'on appelle les externalités (équité, durabilité,...) doivent pouvoir être internalisées dans la recherche. Pour nous, l'équité est la garantie d'une bonne science. « Equity is a good science »</p> <p><strong>Ian Illuminato, <i>Friends of the Earth</i>, États-Unis</strong></p> <p><span class='spip_document_868 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:100px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L100xH125/ian_illuminato-a6e8a.jpg' width='100' height='125' alt="Ian Illuminato" title="Ian Illuminato" style='height:125px;width:100px;' /></span>Je voudrais vous parler des risques des nanotechnologies. Les nanotechnologies s'occupent de la matière à l'échelle de l'atome, le nano-mètre.</p> <p>Les recherches en nanotechnologie sont largement portées par les militaires, qui veulent créer de nouvelles armes plus ciblées et des moyens de renseignement sur le champ de bataille. Mais au delà, les technologies de tous les domaines pourraient être transformés, par exemple avec l'invention de nano-caméras capable de filmer depuis l'intérieur du corps humain.</p> <p>Les produits contenant des nano particules sont d'ores et déjà commercialisés, comme dans les crèmes de soin. Beaucoup imaginent que les nanos vont s'intégrer dans la chaîne alimentaire, pour produire de nouveaux aliments, mais aussi dans les emballages... alors que nous ne savons pas quels sont les phénomènes de migration des éléments de l'emballage vers le contenu. Les entreprises utilisent les nano principalement pour produire la « junk food », ce qui met en jeu des questions de santé publique.</p> <p>Nous ne connaissons pas les chemins par lesquels les nano produits peuvent pénétrer dans les cellules et briser les barrières cellulaires. La toxicité des nano produits n'est pas étudiée précisément, alors qu'ils sont dispersés dans l'environnement et les produits industriels.</p> <p><strong>Louise Vandelac, Professeur de sociologie et environnement à l'<i>Université du Québec à Montréal</i>.</strong></p> <p><span class='spip_document_869 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:160px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_7073-77ae7.jpg' width='160' height='240' alt="Louise Vandelac" title="Louise Vandelac" style='height:240px;width:160px;' /></span>Il y a une continuité des technosciences du vivant, depuis la reproduction artificielle, la transgénèse végétale et animale (porc, saumon,...) et la nano-toxicologie.</p> <p>Le paradoxe est de voir à quel point on ne prend pas au sérieux ce que l'on dit depuis trente ans sur l'état de la planète, comme si tout pouvait continuer comme avant. C'est dorénavant la sécurité de la planète qui est en jeu.</p> <p>Du strict point de vue économique, il y a longtemps que l'on sait que l'intégration de l'écologie est porteur de développement. Pourtant, cela n'est pas mis en oeuvre. Faut-il par exemple confier la protection de la planète aux ministres de l'environnement, sans pouvoir sur les entreprises ? Ou bien est-il temps que cela dépende réellement des ministres de l'industrie, riche en pouvoirs et moyens ?</p> <p>Nous sommes à la convergence de plusieurs phénomènes, chacun appelant des approches nouvelles pour la recherche : <br /><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> les changements climatiques, qu'il faut aussi voir comme une invitation à travailler collectivement entre les chercheurs (à l'image du GIEC) et à inventer de nouveaux indicateurs (tels l'empreinte environnementale), <br /><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> le phénomène du « nuage brun », <br /><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> la question de la démographie, avec un enjeu sur les termes choisis. Faut-il parler de surpopulation, ce que l'on pourrait réduire à « dites-moi que je suis de trop »... ou d'empreinte écologique ?</p> <p>Avec ces nouveaux indicateurs on peut construire des mappemondes qui montrent l'ampleur des dégâts et des problèmes environnementaux. Dans ces nouveaux indicateurs, il y a aussi des indicateurs économiques, et le nouveaux champ de l'éco-économie est en plein développement.</p> <p>De même, le modèle du cycle de vie rompt avec le modèle linéaire qui a dominé la production jusqu'à présent.</p> <p>L'ensemble des technologies se sont imposées dans un même discours sirupeux. Avec l'idée qu'il y aura toujours une solutions technologique aux problèmes créés par la technologie.</p> <p>Il n'y a aucun lieu de débat sur l'impact réel, sur les modèles concernant la sécurité environnementale ou la santé publique. C'est à ce travail préalable qu'il faut s'attacher pour mettre la science en démocratie.</p> <p><strong>Notes sur le débat :</strong></p> <p><strong>Bertrand Monthuber, France, Ancien Président de <i>Sauvons la Recherche</i> </strong></p> <p>J'ai un peu de frustration à ce stade. Il faut préciser les termes. On mélange la question sur les décisions de la recherche, ou sur les usages en aval ? Que souhaite-t-on contrôler ?</p> <p>Il faut regarder concrètement ce que la première solution voudrait dire : par exemple le créationisme est une opinion, mais pas une démarche scientifique. Pourtant des groupes voudraient s'en serrvir pour décider des projets de recherche.</p> <p>Nous sommes chacun partagés : nous avons envie du téléphone mobile, mais nous interrogeons sur les effets des ondes. La question sociale de la technologie est à prendre en compte.</p> <p><strong>Claude Henry, <i>Vecam</i> et <i>Vivagora</i>, France </strong></p> <p>Il y a un modèle général qui porte à croire que la nature fonctionne comme une machine. C'est au fond toute la question des nanotechnologies. Il nous faut travailler comme citoyens ce modèle épistémologique.</p></div> <div class='rss_ps'><p>(notes prises en direct par Hervé Le Crosnier, seul responsable des erreurs qui se seraient glissées)</p></div> Panel E : Responsabilité sociale : quelle coopération entre sciences et société ? http://vecam.org/article1092.html http://vecam.org/article1092.html 2009-02-12T16:20:16Z text/html fr Démocratie Creative Commons Accès au savoir vecam-F Recherche Vinod Raina, All Indian People Science Network, Inde, Modérateur du panel Nous avons besoin de créer des alliances, des relations entre mouvements sociaux et chercheurs, et ceci ne peut pas se faire uniquement sur une approche en termes de risques. Il faut différencier les relations entre société et sciences et société et technologie. Pensons d'abord les manières de produire du savoir, plutôt que des outils. André Jeaglé, Fédération mondiale des Travailleurs scientifiques, France Je suis cartographe, (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique121.html" rel="directory">2009 Échos du Forum Mondial Sciences & Démocratie</a> / <a href="http://vecam.org/mot11.html" rel="tag">Démocratie</a>, <a href="http://vecam.org/mot17.html" rel="tag">Creative Commons</a>, <a href="http://vecam.org/mot45.html" rel="tag">Accès au savoir</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot66.html" rel="tag">Recherche</a> <div class='rss_texte'><p><strong>Vinod Raina, <i>All Indian People Science Network</i>, Inde, Modérateur du panel</strong></p> <p>Nous avons besoin de créer des alliances, des relations entre mouvements sociaux et chercheurs, et ceci ne peut pas se faire uniquement sur une approche en termes de risques. Il faut différencier les relations entre société et sciences et société et technologie. Pensons d'abord les manières de produire du savoir, plutôt que des outils.</p> <p><strong>André Jeaglé, <i>Fédération mondiale des Travailleurs scientifiques</i>, France</strong></p> <p>Je suis cartographe, je me place du point de vue de la Fédération mondiale des Travailleurs scientifiques.</p> <p>Cela ne sert à rien de vouloir engager ce dialogue, si la société ne s'intéresse pas aux conditions dans lesquelles les chercheurs exercent leur travail, conditions politiques et scientifiques. On parle de nouvelle alliance, mais alliance avec qui, pour qui ?</p> <p>J'attends de ce Forum une volonté d'écoute réciproque. Que veut on entendre par responsabilité ? La responsabilité des travailleurs scientifiques peut s'entendre de diverses manières. Nous devons nous garder de démontrer a posteriori des postulats posés à l'origine.</p> <p>Nous avons des objectifs ambitieux : amener des chercheurs qui ne se reconnaissent pas dans l'alter mondialisme à s'engager dans nos débats. Notre fédération essaye d'amener les syndicats à s'engager, ce qui n'est pas facile car ils n'ont pas forcément les mêmes visions sur le rôle de la science.</p> <p>La science sans se substituer au politique devrait essayer de résoudre des problèmes comme la pauvreté, la pollution... Ce qui conduit à une impasse. Ne pas confondre ce qui relève de l'ordre scientifique et politique.</p> <p>Autre question, celle du contrôle social de la science : de nombreux directeurs le subissent en étant sans cesse à la recherche de nouveaux contrats.</p> <p>Les scientifiques doivent être considérés comme des citoyens comme les autres, et on doit les interpeller en tant que tel, à titre individuel et au titre de leurs organisations. Plutôt que de demander aux scientifique d'arrêter les recherches sur les OGM nous devrions leur demander de se mobiliser sur le contrôle des semences.</p> <p>Conclusion pour ceux qui donneront une suite au forum : rassembler dans un document unique des mots clés comme « liberté de la recherche », « monopole du savoir », « expertise citoyenne »... Il serait bon de débattre sur un glossaire avec des définitions qui peuvent être contradictoires. C'est une des conditions d'un dialogue fructueux.</p> <p><strong>Gangadharan et K.K. Krisnakumar, <i>All Indian People Science Network</i>, Inde</strong></p> <p>AISPN compte 500 000 membres. Après 35 années de travail, notre mouvement a évolué et s'est investi dans de nouveaux thèmes, comme les questions de genre, de développement durable, de financement...</p> <p>A ceux qui s'interrogent pour savoir comment amener la science vers la société, j'évoque, le programme que nous avons commencé en 1991. Au Kerala, cela nous a permis d'atteindre 1,4 millions de volontaires. C'est un programme simple qui repère les ressources naturelles du territoire : les personnes observent les ressources naturelles, les recensent, et ceci permet de construire un lien avec les scientifiques. Ceci permet d'apporter la cartographie au peuple. Les cartes que nous avons réalisées sont disponibles, elles sont variées, nous avons essayé de diversifier la notion de carte.</p> <p>Le gouvernement local du Kerala a endossé la campagne, après le mouvement populaire. Les volontaires ont joué un rôle essentiel au delà de la conception des cartes mais aussi dans le développement local. C'est une démarche éminemment participative.</p> <p>Nous avons réussi à inclure des scientifiques dans le programme, et à rendre des citoyens experts de ces domaines.</p> <p>Un autre exemple est lié à la conservation énergétique.</p> <p>Nous avons également de nombreuses institutions qui se mobilisent sur ces programmes. De 5 à 10 scientifiques sont sortis transformés de ces programmes et cela a influencé profondément nos programmes de recherche.</p> <p><strong>Andrew Feenberg, <i>Simon Fraser University</i>, Canada</strong></p> <p><span class='spip_document_863 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:320px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L320xH213/DSC09170-9e28d.jpg' width='320' height='213' alt="Andrew Feenberg" title="Andrew Feenberg" style='height:213px;width:320px;' /></span>Je souhaite intervenir rapidement sur les modes de collaboration entre scientifiques et citoyens.</p> <p>Des scientifiques se sont mobilisés pendant et après la seconde guerre mondiale et ont contribué à façonner le monde sur des sujets comme la non prolifération. Ceci a été une première prise de responsabilité des scientifiques dans la formation du public.</p> <p>Mais nous avons aussi des situations plus conflictuelles. Par exemple quand une population entière a été logée sur des déchets toxiques et que les scientifiques les ont aidé à être relogés.</p> <p>L'expérience du Sida est aussi intéressante : nous sommes passés d'une opposition entre chercheurs et malades à une collaboration.</p> <p>Les conséquences de ces collaborations :</p> <p>La technologie implique une organisation industrielle, mais ici nous parlons plutôt des sciences, de production de savoirs. Les personnes ordinaires sont impliquées dans la production d'outils techniques mais leur implication n'est pas la même dans la science fondamentale, dont ils subissent plutôt les effets.</p> <p>Parlons nous de l'économie de la recherche pour laquelle nous voulons une indépendance des chercheurs ? Nous devons qualifier ce que nous entendons par économie de la recherche. Nous ne voulons pas que les gouvernements décident ce qui est « vrai » à la place des sciences.</p> <p>La technologie est différente par nature ; elle est hétérogène. Il y a plein de manières de produire les mêmes artefacts. Et ceci peut s'appuyer sur des choix sociaux qui ne sont pas liés à la science.</p> <p>On peut voter sur le niveau de pollution que nous attendons de nos voitures, mais pas de l'orientation de la science fondamentale.</p> <p>La recherche peut impliquer des formes de collaboration mais au final nous voulons que les scientifiques prennent des décisions sur ce qui est « vrai ». Nous pouvons nous reposer sur la démocratie pour protéger l'économie de la recherche.</p> <p>Attention aussi, quand on emploie le mot science, à ne pas faire la confusion avec le savoir en général ni avec les technologies.</p></div> <div class='rss_ps'><p>(notes prises en direct par Hervé Le Crosnier et Valérie Peugeot, seuls responsables des erreurs qui se seraient glissées)</p></div> Panel B : Accès aux connaissances : construire les biens communs http://vecam.org/article1088.html http://vecam.org/article1088.html 2009-02-12T12:25:03Z text/html fr Démocratie Creative Commons Accès au savoir vecam-F Recherche Valérie Peugeot, VECAM, France, modératrice du panel Œ En présentant cet atelier, je voudrais distinguer les notions de biens publics, relevant de la responsabilité des pouvoirs publics et issus de la nature ou de l'histoire (patrimoine, domaine public de la culture) et les biens communs, qui sont en permanence construits et reconstruits par les communautés qui les ont créés. Amit Sengupta, Secrétaire général de All Indian People Science Network, Inde Il nous faut commencer à comprendre les (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique121.html" rel="directory">2009 Échos du Forum Mondial Sciences & Démocratie</a> / <a href="http://vecam.org/mot11.html" rel="tag">Démocratie</a>, <a href="http://vecam.org/mot17.html" rel="tag">Creative Commons</a>, <a href="http://vecam.org/mot45.html" rel="tag">Accès au savoir</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot66.html" rel="tag">Recherche</a> <div class='rss_texte'><p><strong>Valérie Peugeot, VECAM, France, modératrice du panel</strong> <span class='spip_document_855 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:160px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6876_Valerie_Peugeot-2-1de0b.jpg' width='160' height='240' alt="Valérie Peugeot" title="Valérie Peugeot" style='height:240px;width:160px;' /></span>Œ En présentant cet atelier, je voudrais distinguer les notions de biens publics, relevant de la responsabilité des pouvoirs publics et issus de la nature ou de l'histoire (patrimoine, domaine public de la culture) et les biens communs, qui sont en permanence construits et reconstruits par les communautés qui les ont créés.</p> <p></BR> <br /></BR> <br /></BR> <br /></BR></p> <p><strong>Amit Sengupta, Secrétaire général de All Indian People Science Network, Inde</strong></p> <p>Il nous faut commencer à comprendre les diverses expériences qui se partagent ici, dans ce Forum. Les nouvelles façon de penser la recherche sont importantes.</p> <p>Permettez-moi de débuter avec des choses élémentaires. La situation crée la conscience.</p> <p>Ne négligeons pas l'impact du néolibéralisme sur la façon dont la science est produite et celle par laquelle elle est reçue.</p> <p><span class='spip_document_859 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:160px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6841-80671.jpg' width='160' height='240' alt="Amit Sengupta" title="Amit Sengupta" style='height:240px;width:160px;' /></span>Quelles sont les raisons de la grande transformation ? Il y a un brouillage de la différence entre la science et la technologie. Traditionnellement, le savoir est transformé en produits qui vont sur un marché. Mais si tout nouveau produit de recherche doit se transformer en quelque chose qui va se vendre sur un marché, nous nous retrouvons dans une course pour produire de plus en plus d'artefacts technologiques pour répondre au marché.</p> <p>Dès lors, le financement de la recherche est de plus en plus contrôlé par les forces économiques.</p> <p>Cette situation nous conduit à la crise de la santé publique actuelle, dans laquelle des millions de morts de l'épidémie de SIDA pourraient être évités par la recherche. Ils ne meurent pas parce qu'il n'y a pas de connaissances permettant de trouver une solution. Ils meurent parce que les recherches existantes et les réussites ne sont pas partagées.</p> <p>Nous sommes arrivé à une situation dans laquelle le simple travail de la pensée est conçu comme une propriété privée. Heureusement, des communautés sont en train de développer des méthodes pour partager leurs savoirs, et garantir le maintien de cette liberté. Je peux parler ici du mouvement des logiciels libres, mais aussi de celui de la biologie ouverte.</p> <p>Nous avons atteint aussi une conscience commune qu'il n'existe qu'une seule planète, et que la façon dont nous allons l'utiliser est essentielle.</p> <p>La tentative d'enfermer le savoir derrière des barrières juridiques artificielles est voué à l'échec, car la connaissance est faite pour circuler.</p> <p>Mais nous devons aussi aller plus loin : nous ne pouvons pas considérer comme scientifiques seulement ceux qui travaillent dans les institutions. Il faut aussi prendre en compte toutes les autres personnes qui peuvent construire les communs de la connaissance.</p> <p><strong>Viviana Muñoz Tellez – South Centre, Organisme multilatéral du G77 basé à Genève.</strong></p> <p><span class='spip_document_856 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:160px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6843_Viviana_Munoz_Tellez-8c36a.jpg' width='160' height='240' alt="Viviana Munoz Tellez" title="Viviana Munoz Tellez" style='height:240px;width:160px;' /></span>Il nous faut définir le périmètre des savoirs traditionnels, et évaluer la façon dont le système légal international les traite.</p> <p>Les savoirs traditionnels sont aussi liés aux sciences formelles. Il y a une conception générale d'une supériorité de la science occidentale. Il n'y a pas de reconnaissance de ce qui émane des populations et de la façon dont elles créent et diffusent leurs savoirs.</p> <p>Les connaissances traditionnelles ne sont pas uniquement des connaissances qui apparteriennent au domaine public, dans lequel chacun pourraient se servir. Cela aboutirait à déposséder les peuples de leurs savoirs et de la façon dont ils sont renouvelés à chaque transmission entre générations. Les connaissances traditionnelles appartiennent aux communs du savoir.</p> <p>Nous devons regarder avec attention l'expérience de la proposition d'une nouvelle loi au Kerala. Celle-ci établit une « licence des communs » qui permet aux communautés de partager les bénéfices en cas de vente, mais refuse les brevets sur les connaissances qui seraient placées sous cette licence. C'est une expérience importante à suivre.</p> <p><strong>Pascale de Robert, Anthropologue à l'Institut pour la Recherche pour le Développement , travaillant en Amazonie au MNHN (France/ Brésil).</strong></p> <p><i>La Corbeille de la femme étoile</i> : Ce titre énigmatique fait référence au mythe amazonien de la diversité agricole.</p> <p><span class='spip_document_857 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:160px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6855_Pascale_De_Robert-15800.jpg' width='160' height='240' alt="Pascale De robert" title="Pascale De robert" style='height:240px;width:160px;' /></span>Je voudrais commencer le débat à partir d'une expérience de terrain. Comment les instruments légaux peuvent protéger la diversité biologique et la diversité culturelle élaborées par les populations locales.</p> <p>Le contexte de l'Amazonie fait coexister des modèles économiques différents. D'une part le modèle d'une zone de développement, avec le soja et l'agro-business et de l'autre le modèle socio-gouvernemental qui s'intéresse aux populations locales, et crée des zones protégées. Dans la région des Kayapo, où je travaille, les deux modèles sont implémentées.</p> <p>Les terre indigènes sont reconnues depuis 1988 comme moyens de subsistance des populations autochtones. Or elles sont appropriées. Les plantes de la forêt elles-mêmes sont victimes de la biopiraterie.</p> <p>Il faut comprendre ce qui se passe pour les chercheurs dans cette région. C'est très difficile aujourd'hui de faire de la recherche ici sans faire de la politique. La recherche scientifique est faite pour accompagner les processus de développement autonome des populations indigènes.</p> <p>Je voudrais vous montrer la mise en place d'une plantation de pommes de terre sucrées. dans laquelle l'intervention de Socioambiental a un place importante.</p> <p>Quel est le chemin administratif que nous avons du parcourir pour mener cette recherche ? Il y a de nombreux organismes concernés. Il nous a fallu deux ans, et plusieurs dossiers pour pouvoir lancer la recherche après avoir eu l'autorisation de la communauté. Ces exigences légales se présentent contre la biopiraterie, mais font aussi tort aux initiatives conjointes des chercheurs et des communautés.</p> <p>La diversité agricole est le résultat de nombreux échanges de graines et de techniques agricoles. Ces connaissances peuvent être mise en commun. Et peuvent utiliser les méthodes modernes, comme par exemple l'usage de GPS pour les plantations.</p> <p>Je voudrais pour terminer évoquer ici la « Déclaration de Belèm », rédigée par l'International Society for Ethnobiology en 1988. Elle a maintenant vingt ans. C'était la première fois qu'une organisation scientifique internationale reconnaissait que l'établissement de « mécanismes en vue d'indemniser les peuples autochtones pour l'utilisation que d'autres font de leurs connaissances et de leurs ressources biologiques » était une obligation fondamentale. Cette déclaration engage tous les anthropologues à respecter un principe éthique dans leurs recherches.</p> <p><strong>Pablo Ortellado GPOPAI, Grupos de Pesquisa em Politicas para o Accesso à Informação, Université de Sao Paulo, Brésil</strong></p> <p><span class='spip_document_858 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:160px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6860_Pablo_Ortellado-3417e.jpg' width='160' height='240' alt="Pablo Ortellado" title="Pablo Ortellado" style='height:240px;width:160px;' /></span>Je vais vous parler de l'accès aux savoir, qui est la finalité de la science, de la publication des articles, des livres,...</p> <p>L'idée que les résultats des recherches doivent être publiés est une forme de « communisme de la recherche ». Partager les résultats est essentiel, entre chercheurs d'une même discipline, mais aussi entre les générations et pour éclairer les recherches des autres disciplines. La façon traditionnelle de publier consiste à passer par des éditeurs privés. Il y a une contradiction entre l'organisation interne de la science, basée sur le partage, et les intérêts privés des éditeurs. 60% des journaux scientifiques sont contrôlés par trois conglomérats.</p> <p>Avec l'internet, il est devenu possible pour les communautés scientifiques de communiquer directement les résultats de leurs travaux. Les initiatives en ce sens ont été fédérées par diverses rencontres et déclarations, dont la plus célèbre est l'Initiative de Budapest pour l'Accès Ouvert en 2001.</p> <p>Il y a eu ensuite d'autres expériences comme la volonté du MIT d'ouvrir ses cours (opencourseware).</p> <p>Les possibilités ouvertes par l'internet d'un côté et le rôle monopoliste du marché de l'autre créent une situation conflictuelle.</p> <p>Il ya plusieurs points de blocages dans la capacité à mettre la science au mains du public : 65% des journaux scientifiques permettent aux chercheurs de déposer leur préprint dans les archives publiques de leur université. Mais il faut que les chercheurs le fassent eux-même, ce qui limite le succès. De plus les archives ouvertes ne sont pas facile à interroger.</p> <p>Il y a des pays dans lesquels les gouvernements rendent obligatoire le dépôt dans des archives ouvertes, mais l'organisation réduit la réalité des dépôts.</p> <p>Il reste donc un grand travail à faire pour que les publications scientifiques soient réellement en accès ouvert et aisé.</p> <p>Mais au delà, nous devons d'ores et déjà poser la question des livres scientifiques, notamment des livres pour l'enseignement. C'est le mouvement débutant pour les Ressources éducatives ouvertes. Nous venons de rédiger un rapport sur cet aspect pour le Brésil, et nous espérons des avancées en ce sens pour favoriser la création de communs de la connaissance.</p> <p><strong>James Love (Knowledge Ecology International – Washington et Genève)</strong></p> <p><span class='spip_document_860 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:160px;'> <img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6865_James_Love-eacb8.jpg' width='160' height='240' alt="James Love" title="James Love" style='height:240px;width:160px;' /></span>Je voudrais vous présenter deux initiatives concernant les formes nouvelles que pourrait prendre le financement de la recherche en vue de créer des biens communs de la connaissance.</p> <p>La première concerne un système pour financer les médicaments. Chacun connaît les difficultés pour accéder à des médicaments en raison des prix trop élevés. Mais l'accès n'est pas la seule question en jeu. La production de médicaments adaptés aux maladies et situations sanitaires des pays pauvres est tout aussi importante.</p> <p>Nous proposons un système de prix (au sens de récompenses délivrées par un jury), qui seraient versés aux organismes qui travaillent sur des médicaments pour ces populations et qui les mettent dans le domaine public. On peut partager ces prix entre organismes selon les niveaux de vie des pays, par un système de prix différenciés. De même, l'apport préalable de la connaissance ouverte partagée pour aboutir aux produits peut être évaluée pour répartir la somme réservée.</p> <p>Cette idée de remplacer les revenus du marché par des prix et des bourses commence à recueillir un bon accueil, notamment à l'OMS, mais rencontre aussi une forte opposition des industries du médicament.</p> <p>Une autre proposition concerne l'OMC. Il s'agit de prendre au pied de la lettre l'objectif de l'OMC et de le détourner pour favoriser la création de biens communs. On pourrait dire que cette proposition s'intilule « Hacking WTO ».</p> <p>Il s'agit de créer dans l'OMC un mécanisme pour que les États s'engagent à mettre dans le domaine public de la connaissance des produits et services et des savoirs. En faire une partie de l'OMC va lier les États à la réalisation des objectifs de mise en commun des savoirs. Ce n'es t plus la libéralisation des services, mais celle des biens publics qui peut devenir un nouveau moteur d'une autre mondialisation.</p> <p><strong>Quelques notes sur le débat dans la salle</strong></p> <p><i> <strong>José Correa, Université de Saõ Paulo, Brésil</strong> </i></p> <p>Il y a dans ce FSM de Belèm un manifeste sur les biens communs qui est en train d'être écrit et proposé par des organisations des mouvements sociaux du Brésil. Nous en sommes encore au stade d'une écriture collective. Nous allons construire ce document d'ici au 31.</p> <p>La logique de la propriété intellectuelle est renvoyée auprès de l'OMPI où il y a eu une confrontation entre les pays de la périphérie contre l'etablishment des États-Unis. La communauté scientifique a on seulement besoin de s'emparer de ce débat, mais aussi une appropriation, une prise de décision et de positionnement de la partie critique de la communauté autour de la propriété intellectuelle. Sommes-nous pour ou contre le système de droit de propriété immatérielle qui existe ?</p> <p><i> <strong>Eliane ?? FSU-France</strong> </i></p> <p>Concernant les publications scientifiques ouvertes, nous sommes dans un domaine où règne une très grande différence selon les pays ou les disciplines. Seules les revues volontaires renseignent leur politique. Dans les sciences humaines et sociales, moins de 10% des revues de SHS avaient renseignés leur politique d'auto-archivage dans ROMEO.</p> <p>L'auto-archivage demande des moyens importants. Il y a une division des grandes archives en petites archives institutionnelles, ce qui augmente le temps d'embargo (durée entre la publication privée et la mise à disposition ouverte).</p> <p>Il faut se méfier de l'optimisme en ce domaine, car le conflit entre les intérêts des chercheurs et celui des éditeurs est important.</p> <p><i> <strong>Christophe Aguiton, SUD, France.</strong> </i></p> <p>Sur la différence entre les communs du savoir et les communs matériels.</p> <p>Il y a plusieurs traditions sur le savoir. Celle des universitaires, qui pensent que le savoir doit être ouvert, alors que des communautés, par exemple les paysans, veulent partager avec des gens qui sont comme eux, ce qui est différent.</p> <p>Il y a une vraie contradiction entre mettre en commun des savoirs et empêcher la mainmise sur ces savoirs par les entreprises du Nord. Un des outils est l'équivalent des « appelations géographiques ». Le savoir est commun, mais le nom est réservé.</p></div> <div class='rss_ps'><p>(notes prises en direct par Hervé Le Crosnier, seul responsable des erreurs qui se seraient glissées)</p></div> Panel A : Sciences & Démocratie : quels enjeux ? http://vecam.org/article1087.html http://vecam.org/article1087.html 2009-02-12T11:11:21Z text/html fr Démocratie Creative Commons Solidarité internationale vecam-F Recherche Hugh Lacey, (Scientia Studia, Brésil) Nous devons nous interroger sur l'idée de l'objectivité, et celle de servir les biens communs Première proposition : à la fois la science et la démocratie ont été mis en cause par les pratiques actuelles. Seconde proposition : changer les priorités de la recherche. D'aucun rejettent les valeurs traditionnelles de la science. La science a une place à prendre en s'éclairant des pratiques des mouvements sociaux, à l'image de Via Campesina qui défend l'idée de la (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique121.html" rel="directory">2009 Échos du Forum Mondial Sciences & Démocratie</a> / <a href="http://vecam.org/mot11.html" rel="tag">Démocratie</a>, <a href="http://vecam.org/mot17.html" rel="tag">Creative Commons</a>, <a href="http://vecam.org/mot29.html" rel="tag">Solidarité internationale</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot66.html" rel="tag">Recherche</a> <div class='rss_texte'><p><strong>Hugh Lacey, (Scientia Studia, Brésil)</strong></p> <dl class='spip_document_847 spip_documents spip_documents_right' style='float:right;'> <dt><img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6835_Hugh_Lacey-17a61.jpg' width='160' height='240' alt='JPEG - 25.2 ko' style='height:240px;width:160px;' /></dt> <dt class='spip_doc_titre' style='width:160px;'><strong>Hugh Lacey</strong></dt> </dl> <p>Nous devons nous interroger sur l'idée de l'objectivité, et celle de servir les biens communs</p> <p>Première proposition : à la fois la science et la démocratie ont été mis en cause par les pratiques actuelles.</p> <p>Seconde proposition : changer les priorités de la recherche. D'aucun rejettent les valeurs traditionnelles de la science.</p> <p>La science a une place à prendre en s'éclairant des pratiques des mouvements sociaux, à l'image de Via Campesina qui défend l'idée de la souveraineté alimentaire. Les mouvements indigènes montrent que les méthodologies scientifiques employées ne sont pas en phase avec leur sujet d'étude lui-même. Il faut inventer d'autres modèles de relations que la science mainstream.</p> <p>Une telle démarche nous permettrait de définir ce que nous voulons organiser pour le futur.</p> <p><strong>Silvia Ribeiro, ETC Group, Bureau du Mexique</strong></p> <dl class='spip_document_848 spip_documents spip_documents_right' style='float:right;'> <dt><img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6817_Silvia_Ribeiro-83161.jpg' width='160' height='240' alt='JPEG - 29.2 ko' style='height:240px;width:160px;' /></dt> <dt class='spip_doc_titre' style='width:160px;'><strong>Silvia Ribeiro</strong></dt> </dl> <p>Nous travaillons sur les impacts qu'imposent les destruction écologiques sur la société. Nous dénonçons la convergence des technologies BANG (Bit, Atome, Neurone et Gène). Nous préférons ce terme qui est significatif à celui de NBIC, plus neutre et utilisé dans les rapports.</p> <p>Nous vivons une crise globale, écologique, sociale et financière. Devant la modification du climat par les activités industrielles, les gens prennent conscience du premier choc. Mais un deuxième choc se prépare par la manipulation de la planète elle-même. Les dix dernières années ont connu une concentration sans précédent des entreprises de contrôle de la vie.</p> <p>Il y a des chercheurs qui commencent à questionner cet ordre de construction de la science et de la technologie. Il y a aujourd'hui plus de 700 produits en vente avec des particules nanotechnologiques, mais aucune critique publique, alors même que les études de toxicologie ne sont pas effectuées. Il y a les diverses techniques de géo-engineering, sans que soient maîtrisées les conséquences. La fertilisation des mers a été mise sous moratoire grâce aux actions de la société civile l'an dernier à Bonn au sein de la CDB. Ce qui n'arrive pas à empêcher la pollution actuelle menée par le bateau Polarstern. Il y a le développement de la génétique extrême, qui a débuté avec les transgéniques, mais se poursuit aujourd'hui par la biologie synthétique.</p> <p>L'arrivée d'Obama et la nomination du prix Nobel de physique Steven Chu au Ministère de l'énergie sont des signes que des choses peuvent changer, mais il faut faire attention, car il veut substituer au pétrole des techniques et non une réflexion globale sur les usages énergétiques.</p> <p><strong>Janine Guespin, Espace Marx et Transform !, France</strong></p> <dl class='spip_document_849 spip_documents spip_documents_right' style='float:right;'> <dt><img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6833-58372.jpg' width='160' height='240' alt='JPEG - 26 ko' style='height:240px;width:160px;' /></dt> <dt class='spip_doc_titre' style='width:160px;'><strong>Janine Guespin</strong></dt> </dl> <p>Pour libérer la science des pressions du néo-libéralisme, il faut un cadre qui dépasse la communauté scientifique, mais qui doit néanmoins intégrer directement les chercheurs.</p> <p>Les choix actuels de recherche sont faits principalement par les multinationales. Face à cette mainmise, une partie des scientifiques estiment que cela irait mieux si on pouvait dégager une science fondamentale. Nous ne le pensons pas, car la technoscience intègre les divers les applications dans la recherche. Même si en sens inverse, c'est le discours néo-libéral qui réduit la science aux innovations, et donc au marché.</p> <p>Les scientifiques seuls ne peuvent répondre à ce défi sur la connaissance. Un dialogue avec les mouvements sociaux peut les aider à repérer la présence des marchés dans le fonctionnement même du discours scientifique. Hors beaucoup de scientifiques limitent leur discours de critique à la demande d'une plus grande autonomie.</p> <p>D'un autre côté, les citoyens, confrontés aux menaces liées aux nouveaux produits innovants, tendent à critiquer la science elle-même. Le débat porte alors sur les risques, ce qui crée une situation de méfiance qu'il nous faut surmonter. On a masqué le rôle fondamental de la science par sa réduction à l'innovation.</p> <p>Pour résoudre les difficultés, il faut inventer des lieux de dialogue, ijnstiller de la démocratie. Il y a pour cela les espaces de lutte citoyennes, mais aussi des espaces institutionnels, au niveau des institutions scientifiques, ou des pouvoirs publics, locaux ou nationaux. Il ne faut pas négliger non plus les interventions internes aux entreprises, à l'image de l'intervention directe des travailleurs d'un laboratoire Sanofi travaillant sur les maladies des pauvres pour refuser de la fermeture de leur outil d'étude, jugé non rentable.</p> <p><strong>Anita Rampal, All Indian People Science Network, Inde.</strong></p> <dl class='spip_document_850 spip_documents spip_documents_right' style='float:right;'> <dt><img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6800_Anita_Rampal-41937.jpg' width='160' height='240' alt='JPEG - 30 ko' style='height:240px;width:160px;' /></dt> <dt class='spip_doc_titre' style='width:160px;'><strong>Anita Rampal</strong></dt> </dl> <p>Je suis physicienne, je vais vous parler du discours de la science. Les chercheurs estiment qu'ils sont en train de lire le grand livre de la nature. Mais il faut aussi agir pour transformer le monde.</p> <p>Je parle de l'engagement personnel des chercheurs.</p> <p>La science à l'école vise avant tout à créer une élite. Certains chercheurs refusent cette façon d'enseigner la science, qui est décontextualisée.</p> <p>Exemple de la manière d'enseigner les sciences alimentaires. Les aliments sont partie intégrante de toutes les cultures, comment intégrer ces savoirs dans l'enseignement universitaire des sciences des aliments ?</p> <p>Lire la forêt est tout aussi important que de lire les livres. Il y a de nombreuses traces des cultures et des humains, de la nature.</p> <p>La moitié des jeunes ne terminent pas leurs études primaires en Inde. Comment construire les parcours de savoir scientifique en tenant compte de ce type de situation ?</p> <p><strong>Priscilla Faulhaber, Museu de Astronomia é Ciências Afins (MAST/MCT), Brésil</strong></p> <dl class='spip_document_851 spip_documents spip_documents_right' style='float:right;'> <dt><img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L183xH240/IMG_6816_Priscila_Faulhaber-f4a1d.jpg' width='183' height='240' alt='JPEG - 25.1 ko' style='height:240px;width:183px;' /></dt> <dt class='spip_doc_titre' style='width:183px;'><strong>Priscila Faulhaber</strong></dt> </dl> <p>Quelle usage de la science pour la détermination des peuples. La science crée des hiérarchies, c'est un système de domination par les élites. Les connaissances collectives sont expropriés, sous une forme néo-coloniale.</p> <p>Au lieu de garder la vision des bénéfices en ligne de mire, il faut au contraire poser une vision alternative, pour réduire les inégalités.</p> <p>L'Amazonie a toujours représenté un enjeu pour les pouvoirs au Brésil. Les musées sont intégrés dans les autres institutions d'enseignement et de recherche. Il y a un populisme, positiviste qui s'exprime en Amazonie. Ce qui conduit à marginaliser les chercheurs qui sont en phase avec les populations indigènes.</p> <p><strong>Edna Castro, Universidade Federal do Para-NAEA, Brésil</strong></p> <dl class='spip_document_852 spip_documents spip_documents_right' style='float:right;'> <dt><img src='http://vecam.org/local/cache-vignettes/L160xH240/IMG_6820_modifie-1-5c428.jpg' width='160' height='240' alt='JPEG - 27.9 ko' style='height:240px;width:160px;' /></dt> <dt class='spip_doc_titre' style='width:160px;'><strong>Edna Castro</strong></dt> </dl> <p>Nous sommes au 21ème siècle, mais la pensée de la science est restée en retard, qui conserve une perspective « évolutioniste » : il faut politiser le champs de la science pour lui faire accéder au niveau démocratique.</p> <p>Les arguments défendants le productivisme de la science reposent sur la nécessité de développer le marché brésilien dans le marché international. Les thèmes de recherche sortent de la décision des scientifiques. Ils s'alignent sur les intérêts des marchés, pour l'usage des produits de la forêt, le développement de l'agro-business.</p> <p>L'Amazonie a un potentiel de biodiversité et de diversité culturelle si important qu'il nous faut changer la façon d'aborder la recherche scientifique et de changer les politiques en ce domaine. Il y a un sous-équipement de la recherche en Amazonie (3% des ressources, alors qu'il y a 10% de la population brésilienne).</p> <p>Il nous faut aussi reconnaître comme un système de connaissance ce qui nous vient des peuples d'Amazonie.</p></div> <div class='rss_ps'><p><span class='spip_document_854 spip_documents spip_documents_right' style='float:right; width:320px;'> <img src='http://vecam.org/IMG/jpg/DSC09124_Herve_Le_Crosnier.jpg' width="320" height="236" alt="Hervé Le Crosnier" title="Hervé Le Crosnier" /></span> (notes prises en direct par Hervé Le Crosnier, seul responsable des erreurs qui se seraient glissées)</p></div> Le système de propriété intellectuelle freine la science et l'innovation selon des lauréats du prix Nobel http://vecam.org/article1064.html http://vecam.org/article1064.html 2008-07-13T23:36:29Z text/html fr Démocratie OMPI Accès au savoir vecam-F Recherche MANCHESTER, UK – Le système de propriété intellectuelle vise davantage à « fermer l'accès à la connaissance » qu'à permettre sa diffusion, a indiqué le Professeur Joseph Stiglitz lors d'une conférence intitulée “Who Owns Science ?” (« À qui appartient la science » ?) qui a eu lieu le 5 juillet. Joseph Stiglitz, lauréat du Prix Nobel d'économie en 2001 et John Sulston, lauréat du prix Nobel de physiologie et médecine en 2002, ont ouvert à l'Université de Manchester un nouvel institut pour la science, l'éthique et (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique82.html" rel="directory">Contributions à débattre</a> / <a href="http://vecam.org/mot11.html" rel="tag">Démocratie</a>, <a href="http://vecam.org/mot12.html" rel="tag">OMPI</a>, <a href="http://vecam.org/mot45.html" rel="tag">Accès au savoir</a>, <a href="http://vecam.org/mot49.html" rel="tag">vecam-F</a>, <a href="http://vecam.org/mot66.html" rel="tag">Recherche</a> <div class='rss_chapo'><p>MANCHESTER, UK – Le système de propriété intellectuelle vise davantage à « fermer l'accès à la connaissance » qu'à permettre sa diffusion, a indiqué le Professeur Joseph Stiglitz lors d'une conférence intitulée “Who Owns Science ?” (« À qui appartient la science » ?) qui a eu lieu le 5 juillet. Joseph Stiglitz, lauréat du Prix Nobel d'économie en 2001 et John Sulston, lauréat du prix Nobel de physiologie et médecine en 2002, ont ouvert à l'Université de Manchester un nouvel institut pour la science, l'éthique et l'innovation.</p></div> <div class='rss_texte'><p>Ils sont tous les deux très critiques à l'égard du système actuel de propriété intellectuelle, estimant qu'il freine le développement de la science et les innovations.</p> <p>Les droits de propriété intellectuelle sont souvent comparés aux droits détenus sur un bien physique. Or, la connaissance n'a rien à voir avec un bien physique, a estimé Joseph Stiglitz. C'est un bien public qui présente deux caractéristiques : le fait qu'un individu y accède n'en prive pas les autres et nul ne peut en être exclu, autrement dit, il est difficile d'empêcher les autres d'en profiter. Le système de propriété intellectuelle se situe à l'inverse de cette définition. Il va même plus loin dans l'exclusion en donnant un pouvoir monopolistique à ceux qui détiennent la connaissance, ce qui conduit souvent à des abus, a-t-il fait remarqué.</p> <p>La détention d'un monopole sur une innovation est considérée par certains comme un moteur pour l'innovation alors qu'en fait elle constitue une entrave à son développement, a déclaré Joseph Stiglitz. Le système actuel qui veut que celui qui conçoit un programme informatique performant peut être poursuivi en justice pour violation présumée d'un brevet montre l'incapacité du système à encourager l'innovation, a-t-il ajouté.</p> <p>Selon Joseph Stiglitz, un autre problème réside dans le fait qu'il existe une incompatibilité entre les bénéfices sociaux qui peuvent résulter des innovations technologiques et les bénéfices économiques liés au système de brevets. Les innovations technologiques permettent qu'une invention devienne disponible plus rapidement pour l'ensemble de la collectivité mais il suffit qu'une personne dépose un brevet sur cette invention pour que s'établisse à son profit un monopole à long terme, favorisant la divergence entre intérêt public et intérêts privés.</p> <p>Le projet de Génome humain a permis d'identifier un gène capable de prédire quelle femme peuvent être atteinte par un cancer du sein. Cette découverte a été brevetée par une entreprise américaine, a expliqué Joseph Stiglitz. Le test représente un coût très faible, mais les frais de santé sont si élevés pour les patients aux Etats-Unis que les personnes pauvres ne peuvent se permettre de le faire, a-t-il précisé. Des questions se posent, selon lui, quant au caractère équitable et juste du système de brevets.</p> <p>Joseph Stiglitz a fait part de deux préoccupations. La première concerne les disparités qui existent entre les pays développés et les pays en développement concernant l'accès à la connaissance, disparités que la propriété intellectuelle ne permet pas de combler, a-t-il dit, ce qui explique pourquoi l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) a appelé à (et obtenu) l'adoption d'un plan d'action pour le développement. La deuxième tient au fait que le système de propriété intellectuelle rend l'accès aux soins plus difficile. Les médicaments génériques coûtent 30 pour cent moins chers que les médicaments originaux. En rendant leur accès plus difficile, l'accord de l'OMC sur la propriété intellectuelle conclu dans le cadre des négociations du Cycle d'Uruguay a signé l'arrêt de mort de millions de personnes, a-t-il indiqué.</p> <p>Joseph Stiglitz a proposé que le régime applicable aux droits de propriété intellectuelle soit adapté en fonction des pays et des secteurs. Personne n'est d'avis que le système de brevet doit être entièrement abandonné, mais la question est de savoir si d'autres outils, des bourses de lauréat ou des financements gouvernementaux par exemple, pourraient être utilisés pour faciliter l'accès à la connaissance et encourager l'innovation dans des domaines dans lesquels des objectifs ont été clairement définis tels que la découverte d'un médicament contre le paludisme. Joseph Stiglitz se dit plein d'espoir quant à une éventuelle réforme du système car nombreux sont ceux aux Etats-Unis qui souhaitent une modification du régime applicable aux droits de propriété intellectuelle.</p> <p>Selon John Sulston, le développement de la science peut être lié à une nécessité ou une simple curiosité, laquelle suppose un certain degré d'ouverture et de confiance entre les acteurs concernés. Pourtant, de plus en plus, le paysage qui se dessine est celui de la privatisation de la science et de l'innovation, une situation que les gouvernements et les investisseurs qui contrôlent les orientations de la recherche voient d'un bon oeil, a-t-il dit. Cela a pour effet, selon lui, que la recherche scientifique se limite aux domaines qui rapportent au détriment de ceux qui ne sont pas considérés comme rentables.</p> <p>Cette tendance a pour conséquence notamment de favoriser l'abandon des recherches sur les maladies liées à la pauvreté et la production de médicaments non nécessaires qui sont vendus à grand renfort de campagnes marketing, a déploré John Sulston. Les produits issus de la recherche n'ont pas bénéficié à tous de manière équitable. Pour autant, vouloir l'égalité à tout prix n'est pas la solution, a-t-il insisté.</p> <p>Dans certaines sphères, notamment à l'OMPI, la propriété intellectuelle relève d'un enjeu idéologique selon lui. Toute modification apportée au système est perçue par les entreprises pharmaceutiques comme un moyen de l'affaiblir. Pourtant, personne ne leur demande de tout abandonner, a-t-il indiqué. Il a ajouté que le système devait être considéré comme un « bon serviteur » et non comme un Dieu.</p> <p>Selon lui, le problème de la contrefaçon a pris une ampleur considérable. La tendance actuelle consiste à lier la contrefaçon à la propriété intellectuelle alors qu'il n'existe pas de lien entre eux, a-t-il précisé. Si les médicaments étaient vendus à leur coût de production ou juste au-dessus, ceux qui se rendent coupables de contrefaçont n'auraient que très peu de marge de manœuvre. De fait, le système actuel de propriété intellectuelle favorise la production de faux, a-t-il dit.</p> <p>Le professeur Sulston a recommandé le retour à une vieille pratique qui consiste à séparer les activités de recherche et développement des activités de production, le mélange des deux favorisant, selon lui, le lobbying et la merchandisation des activités de recherche et développement. Les séparer permet de produire des biens de manière plus équitable et de rendre la recherche et le développement plus accessible à condition toutefois que ceux qui détiennent les connaissances scientifiques partagent les bénéfices qui en sont issus, a-t-il précisé.</p> <p>Cette séparation semble se produire dans la mesure où certaines structures privées telles que la Fondation Bill et Melinda Gates commencent à investir dans la santé publique, a indiqué John Sulston tout en mettant en garde contre un retour à l'ère victorienne où la santé était financée par des philanthropes. Il a appelé à ce que les questions de santé soient coordonnées à l'échelle mondiale par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), reconnaissant néanmoins que l'Organisation était sous-financée et soumise à une forte pression de la part des gouvernements et des groupes d'intérêts commerciaux.</p> <p>Le lauréat du prix Nobel de physiologie et médecine a également plaidé pour qu'une réflexion plus cohérente soit menée concernant le traité biomédical en cours d'examen à l'OMS et que les organisations non gouvernementales transnationales participent davantage aux discussions.</p> <p>Il est impératif de renverser la tendance et d'empêcher la privatisation de la science, a-t-il indiqué. Nous devons nous concentrer sur la survie et le développement de l'humanité, ainsi que sur l'exploration de l'univers. Pour savoir si nous réussirons ou pas, nous devons résoudre la question de savoir à qui appartient la science.</p></div> <div class='rss_ps'><p>This work is licensed under a <a href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/2.5/" class='spip_out' rel='external'>Creative Commons License</a>.</p></div> Appel à Communications. Séminaire M@rsouin 2007. http://vecam.org/article983.html http://vecam.org/article983.html 2007-01-25T23:09:48Z text/html fr France Recherche Le GIS Marsouin, fédération des équipes bretonnes de sciences humaines et sociales travaillant sur la Société de l'Information organise son traditionnel séminaire les 5 et 6 juin à Guidel (Morbihan). Les projets de communication (article intégral ou résumé long) sont à envoyer à seminaire@marsouin.infini.fr avant le 31 mars 2007. Les chercheurs, membres ou non de M@rsouin, désirant participer à ce séminaire peuvent soumettre des propositions de communication sur un ou à plusieurs des axes suivants : (...) - <a href="http://vecam.org/rubrique93.html" rel="directory">Rencontres et Rendez-vous</a> / <a href="http://vecam.org/mot60.html" rel="tag">France</a>, <a href="http://vecam.org/mot66.html" rel="tag">Recherche</a> <div class='rss_chapo'><p>Le GIS Marsouin, fédération des équipes bretonnes de sciences humaines et sociales travaillant sur la Société de l'Information organise son traditionnel séminaire les 5 et 6 juin à Guidel (Morbihan).</p></div> <div class='rss_texte'><p>Les projets de communication (article intégral ou résumé long) sont à envoyer à seminaire@marsouin.infini.fr avant le 31 mars 2007.</p> <p>Les chercheurs, membres ou non de M@rsouin, désirant participer à ce séminaire peuvent soumettre des propositions de communication sur un ou à plusieurs des axes suivants :</p> <p><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> <strong>apprentissage</strong> : comment les TIC contribuent à l'apprentissage, mais aussi comment se réalise l'apprentissage des TIC ;</p> <p><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> <strong> interactions sociales/sociabilité</strong> : dans quelle mesure les TIC permettent de nouvelles sociabilités, font-elles émerger de nouvelles formes d'échange, de production de savoir et d'information, mais aussi les TICs portent elles vraiment de nouveaux messages sociaux qui contraignent leur propre usage ?</p> <p><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> <strong>espaces publics & TIC</strong> : les TIC sont-elles un outil servant le débat public, et en même temps font-elles l'objet d'un débat sur leur usage qui dépasse la question un peu vaine de la "fracture numérique" ?</p> <p><img src="http://vecam.org/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-1d287.gif" width='8' height='11' class='puce' alt="-" style='height:11px;width:8px;' /> <strong>marchés</strong> : quel est l'impact économique des TIC aujourd'hui, quel développement pour les marchés électroniques, quels impacts sur les filières issues du commerce électronique ?</p> <p>Seront privilégiées des communications sur des travaux de recherche originaux, de nature théorique ou empirique (expérimentation, enquêtes qualitatives ou quantitatives,...) Les projets de communication (article intégral ou résumé long) sont à envoyer à seminaire@marsouin.infini.fr avant le 31 mars 2007.</p> <p>Une session poster est également prévue pour présenter des recherches en cours.</p> <p>Ce séminaire se déroule sur deux jours, les 5 et 6 juin 2007 à <a href="http://www.vvf-vacances.fr/vvf.publicweb/DesktopDefault.aspx ?loadControl=Catalog/Village&fullPage=true&product=FicheProduit/FCD803C0-0F27-4654-923E-E37825BFFC71.xml" class='spip_out' rel='external'>Guidel (56)</a>.</p> <p>N'hésitez pas à diffuser, afficher le texte de l'<a href="http://www.marsouin.org/article.php3?id_article=127" class='spip_out' rel='external'>appel publié sur le site de Marsouin</a></p></div> <div class='rss_ps'><p>L'adresse originale de cet article est <a href="http://www.a-brest.net/article3070.html" class='spip_out' rel='external'>http://www.a-brest.net/article3070.html</a></p></div>