SMSI-73 Télécommunications pilotées par ordinateur

Bonjour,

La National Science Foundation encourage le développement de petites entreprises innovantes. Dans une dépêche du 7 octobre, reprise par "Science daily", elle met en avant une entreprise spin-off du MIT qui propose d’utiliser Linux et des ordinateurs généralistes pour contrôler des antennes radio et GSM. Une telle technologie permettra d’apporter le téléphone portable ou l’internet rapide dans les zones rurales. Lire l’article

Une excellente idée... Les systèmes actuels d’émission sont basés sur des matériels spécifiques. Cela se traduit par deux inconvénients :

- des émissions énergétiques, car la couverture du territoire est onéreuse. Or l’énergie des micro-ondes pourrait développer des problèmes de santé publique. Les dangers potentiels sont mal connus, mais déjà des enquêtes épidémiologiques sur les personnes habitant auprès des antennes révèlent que les émissions hors-norme, trop énergétiques, sont vraisemblablement dangereuses.

- une difficulté à faire suivre aux antennes et à l’infrastructure globale des télécommunications sans fil les évolutions des normes. Or justement ces évolutions vont dans le sens d’une meilleure sécurité, et d’une plus grande fiabilité, même à faible énergie.

En reliant l’antenne à un système logiciel, on peut remettre à jour en permanence les systèmes pour suivre l’innovation. Et en utilisant des matériels peu onéreux, dont le développement a déjà été rentabilisé sur les marchés grand-public, on peut baisser les coûts d’installation d’une antenne, les multiplier pour assurer une couverture complète à faible rayonnement énergétique.

Pas étonnant que Linux soit mélé à de telles applications : pour les inventer, expérimenter, réaliser, faire évoluer, il convient de disposer d’un système d’exploitation ouvert et modifiable pour lui adjoindre des modules spécifiques (pour le pilotage des convertisseurs analogiques-numériques nécessaires). Il convient aussi de disposer d’un système d’exploitation léger, modulaire, pour permettre la multiplication de systèmes embarqués.

C’est parce que Linux est un logiciel libre que ce genre de développement est possible : on peut ajouter, modifier, sélectionner les morceaux de code qui sont nécessaires à l’application, disposer d’une liberté d’expérimentation et d’installation.

C’est cela la liberté du logiciel. C’est aussi cela le bénéfice pour toute la société.... et ça va bien au-delà de la question du "prix" des logiciels qui fait pourtant la une du SMSI.

L’entreprise Vanu inc qui a obtenu le soutien de la NSF est issue des travaux de Vanu Bose, développé au MIT. Côté sympa : les textes des travaux, universitaires comme entrepreuneuriaux, sont présentés directement au public sur leur site web : http://vanu.com

Et si, contrairement au discours idéologique général, il n’y avait pas de frontière étanche entre l’entreprise et la recherche universitaire... au sens où les formes de valorisation de la recherche (la "logique du don") pourraient aussi marcher pour l’entreprise. Et rendre service à la société.

Oui, il existe une autre voie de développement que l’installation de nouveaux péages, de nouvelles "propriétés" sur le bien public mondial que peut devenir le logiciel et la connaissance numérique.

Au fait, cette idée de radio-logiciel est très certainement une "idée dans l’air", une idée qui court toute seule, et que les innovateurs, les décisionnaires, les ingénieurs vont maintenant transformer en applications opérationnelles... ce qui va très vite changer la donne dans les questions d’infrastructure pour la société de l’information

Avant de tomber sur cette dépêche de la NSF, j’avais déjà eu écho de ce processus et des applications pas plus loin que dans ma région. C’est Philippe Duchein, un de mes anciens étudiants, qui m’a présenté son entreprise il y a moins d’un mois. Il fournit des réseaux sans-fil haut débit pour les communes rurales, réseaux basés sur des antennes peu énergétiques, contrôlées par une carte sous Linux, et susceptibles d’évoluer avec les normes, par pilotage à distance et remplacement des logiciels. Il revenait juste d’une expérimentation en grandeur nature à l’Ile de Ré. Et il vient de décrocher un contrat opérationnel avec des communes rurales du sud de la Manche.

Une idée qui avance donc à grand pas, aussi bien en Basse-Normandie que dans le Texas. Que celles et ceux qui parlent à tort et à travers du "retard français" viennent en province... y’a pas que les transnationales dans la vie....

C’est d’ailleurs parce qu’il y a autre chose qu’une économie de main-mise sur le monde que je peux à la fois mener une bataille incessante contre les monopoles et leurs pratiques opposées au bien commun et encourager mes étudiants à créer des entreprises. Le marché contre la marchandisation.

Surtout quand on touche à une modification en profondeur de toute la notion d’infrastructure de télécommunication. Avec de tels enjeux, y’a sacrément intérêt à utiliser les logiciels libres et assurer un réseau de petites entreprises. Pour garantir que celles-ci pourront exister partout, et être maîtrisées par leurs acteurs, au Texas, dans la Manche ou dans les pays du Sud.

Hervé Le Crosnier

Posté le 16 octobre 2003

©© Vecam, article sous licence creative common

1 commentaire(s)
> SMSI-73 Télécommunications pilotées par ordinateur - 30 octobre 2003, par olivier zablocki - Philippe Duchein et l’équipe de NomoTech en expédition

petit témoignage à l’appui et en image du côté de l’Ile-de-Ré donc...