SMSI-87 La torture s’invite au SMSI

Bonjour,

La troisième réunion préparatoire du "Sommet mondial sur la Société de l’Information", sommet organisé par l’ONU, débute ce lundi 15 septembre. Durant quinze jours, les délégués des Etats, les lobbyistes du secteur privé et les activistes de la société civile vont essayer d’avancer sur la rédaction d’une "Déclaration" et d’un "Plan d’action" qui seront ensuite validés officiellement par le Sommet lui-même en décembre.

Le SMSI se déroule en deux étapes. Les 10 et 11 décembre 2003, à Genève, sera signée la "Déclaration". Viendront deux années de suivi. Puis une nouvlle séance plenière en 2005 à Tunis.

Le choix de Tunis a longtemps été mis en cause, notamment parce qu’il s’agit d’un des pays qui pratique le plus la censure de l’internet. Actuellement le journaliste Zouhair Yahyaoui, responsable du site TUNeZINE croupit dans les prisons pour avoir essayé de faire vivre un site critique et satirique (interdit en Tunisie). Il y est accompagné de nombreux journalistes et des militants de la Ligue des Droits de l’Homme de Tunisie.

Certes, la diplomatie est faite de petits pas et de grandes concessions. Et puis une Europe présidée par un défenseur public de Mussolini a certainement du mal à dire quelque chose sur la dictature par étouffement de Ben Ali. De surcroit, on pouvait penser que l’opposition à l’organisation du SMSI en Tunisie en 2005 pourrait tourner court, tant on peut aussi être fier de ce qu’un Sommet de l’ONU se tienne en Afrique. Histoire de montrer que la "Société de l’Information" ne devrait pas être un outil pour les seuls pays riches.

Mais un pas nouveau vient d’être franchi, une forme de pied de nez aux tentatives internationales de mettre en place un ordre juridique mondial. La Tunisie vient de nommer à la tête du Comité d’organisation de la session de Tunis en 2005 le Général Habib Ammar. Lire l’article

Provocation consciente, à la veille de l’ouverture de la session préparatoire de septembre, cette nomination ne peut pas laisser indifférents tous les participants au SMSI.

Le Général Habib Ammar est considéré comme le principal responsable, au titre d’ancien Commandant de la Garde nationale et ancien Ministre de l’Intérieur, de l’organisation de la torture en Tunisie dans les années quatre-vingts. Je vous joins plus loin le texte de la lettre de l’OMCT (Organisation Mondiale Contre la Torture) décrivant les exactions qui lui sont reprochées. L’OMCT constitue aujourd’hui la principale coalition internationale d’ONG luttant contre la torture, les exécutions sommaires, les disparitions forcées et tout autre traitement cruel, inhumain ou dégradant. Elle dispose d’un réseau -SOS-Torture- composé de quelque 240 organisations non gouvernementales, qui agissent comme sources d’informations.

Le SMSI est placé sous le chapeau de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, notamment de son Article 19 sur la liberté d’expression. Quand l’organisation même du Sommet s’assoie sur ce principe, on peut douter de la capacité des Etats signataires de faire appliquer les belles paroles qu’ils vont déclammer la main sur le coeur.

La nomination d’une personne responsable de l’organisation de la torture dans son pays rend encore plus sensible cette mascarade.

La Cours Pénale Internationale est une des meilleures nouvelles qui soit apparue sur la scène internationale ces dernières années. Elle marque la volonté de créer une justice mondiale et de poursuivre les dictateurs, les tortionnaires, les responsables de génocides, partout et sur toute leur vie. La CPI est un de ces nouveaux outils qui permettent d’élargir la démocratie. La justice, la capacité à retrouver et condamner les responsables de crimes contre l’humanité est un des nouveaux "biens publics globaux" qui sont la colonne vertébrale de l’avenir. La CPI offre une capacité d’action pour appliquer les règles de droit contenues dans les divers textes définissant les Droits de l’Homme.

Si un Sommet mondial dépendant de l’ONU commence par oublier ce nouveau cadre du droit international, on peut penser que ses décisions resteront en permanence lettre morte. Notamment quand il s’agira d’appliquer les belles phrases de la Déclaration concernant l’application dans la Société de l’Information des Droits de l’Homme et de la Déclaration du Millénaire.

Restent quelques questions en suspens :

- le Général Ammar viendra-t-il à Genève sans qu’aucun juge ne lui adresse un mandat d’arrêt pour ses activités passées ? Il est des juges courageux à Genève.

- Les diplomates des pays démocratiques pourront-ils accepter le camouflet que constitue cette nomination au Comité d’Organisation de Tunis 2005 ? Quand le même général Ammar a été nommé au Comité d’Organisation des Jeux méditerranéens de 2001, de nombreuses voix s’étaient élevés, y compris parmi les diplomates et les officiels du Comité Olympique International. C’était avant la mise en place de la Cour Pénale Internationale en juillet 2002.

- la société civile, qui a choisi de mener son combat principal pour que le SMSI se place dans le cadre essentiel des "Droits de l’Homme" pourra-t-elle rester sans rien dire ?

Ce ne sont pas des situations évidentes. La diplomatie oblige souvent à acheter des pince-nez. Mais toute acceptation de cette nomination-provocation serait en réalité une remise en cause des efforts difficiles, lents et courageux pour imposer une justice mondiale capable de s’opposer au crimes contre l’humanité et à la torture. C’est la crédibilité de la Cour Pénale Internationale qui serait bafouée si un silence assourdissant devait se faire entendre parmi les délégués.

Et c’est bien évidemment la capacité à construire une Société de l’information visant à défendre les Droits de l’Homme qui serait rendue illusoire.

Cette provocation ne peut pas rester sans réponse.

Hervé Le Crosnier

Posté le 14 septembre 2003

©© Vecam, article sous licence creative common

2 commentaire(s)
> SMSI-87 La torture s’invite au SMSI - 19 février 2005 - Les droits de l’Homme

Je viens de lire les différents articles. J’ai lancé une petite recherche sur le web et j’ai trouvé cela http://www.atm.org.tn/fr/ba_med.html . Je me dis qu’avec de tel organisation en Tunisie. Il doit faire bon y vire :-(

> SMSI-87 monsieur j.CHIRAC - 23 septembre 2003, par TAIEB SMATI CANDIDAT ELECTION PRESIDENTIELLE 2004

JE SUIS CANDIDAT A L’ELECTION PRESIDENTIELLE 2004
JE BANNIS LA VILENCE
TAIEB SMATI
PARTI DES TRAVAILLEURS TUNISIENS
taibsmati@yahoo.fr

LETTR OUVERTE A MONSIEUR LE PRESIDENT FRANÇAIS

A MONSIEUR J.CHIRAC HONORABLE PRESIDENT DE LA FRANCE

Je viens d’apprendre par les médias votre projet de visite en Tunisie , le peuple tunisien et moi même vous souhaitons la bienvenue , la France toute entière nous honore.
Seulement , votre excellence, notre régime politique et son président ne méritent pas la visite de l’illustre président que vous êtes.
Nos prisons se remplissent de plus en plus de prisonniers politiques , le derniers prisonnier politique en date est l’honorable opposant monsieur ABDULAH ZOUARI, homme de plume et illustre journaliste indépendant .cet homme n’a jamais incité à la haine ni au mépris. après dix ans de prison ferme sans réduction de peine, le voilà écoper de neuf mois de prison et pour trois fois rien !
Votre excellence monsieur le président , visiter BEN ALI, et son gouvernement c’est tout bonnement cautionner sa politique totalitaire inhumaine et tortionnaire.
Vous ne pouvez pas ignorer que le Président BEN ALI ordonnait personnellement le passage à tabac de ses opposants politiques et dans certains cas leur suppression physique.
Au moment même où je demande à la justice internationale d’ouvrir une information contre le Président BEN ALI pour crimes contre l’humanité ,vous annoncez votre projet de visite à ce dictateur ancien général de l’armé ?
Le président BEN ALI interdit au partis politiques de présenter le candidat de leur choix à la prochaine élection présidentielle 2004 , n’est-ce pas contraire aux principes démocratiques ? la police de l’Internet sévit sur tous les sites qui déplaisent à BEN ALI et brouillent nos courriers électroniques n’est-ce pas privation des libertés ?
50 policiers en civil suivent au pas chaque opposant politique de jour comme de nuit et nous opposants, nous n’avons pas droit au travail. tous les employeurs nous rejettent.
Cet homme qui fait des droits de l’homme et de la démocratie son dernier souci et des valeurs humaines et morales une passoire , n’est pas digne de recevoir l’illustre président que vous êtes .
Je paris que le président tunisien vous interdira de rencontrer , l’espace de quelques minutes l’opposant politique que je suis, je vous prie ,honorable président de bien vouloir m’accorder
Une brève entrevue, vous auriez ainsi vraiment visité la Tunisie.
J’aurais souhaité que vous renonciez à cette visite, ainsi les tunisiens qui vous aiment déjà bien, vous aimeront davantage.
Veuillez agréer, honorable président , l’expression de mon profond respect et celui de tous les tunisiens .

TAIEB SMATI

VIVE LA FRANCE , VIVE LA REPUBLQUE
VIVE LA TUNISIE , VIVE LES PRISONNIERS POLITIQUES