Patrimoine, Musées et biens communs

Aujourd’hui, le Musée d’Orsay vous propose de constituer
le patrimoine comme un bien commun.

En effet, il demande, via le système de financement
participatif Ulele, une participation pour la restauration
du tableau de Gustave Courbet "L’atelier du peintre"
http://fr.ulule.com/courbet/

J’adore Courbet, sa peinture, comme son engagement politique
lors de la Commune de Paris. Je n’aurais aucun problème à
verser quelque chose pour restaurer le magnifique tableau.

Mais,... si les gens participent, il convient de rendre
au public les usages secondaires de cette œuvre, qui
rappelons le appartient au domaine public.

De ceci, il n’est pas question dans la page de présentation
de l’appel au financement participatif. Au contraire, il
est bien précisé que :


Crédits Photographiques :

Gustave Courbet (1819-1877), L’Atelier du peintre, allégorie réelle déterminant une phase de sept années de ma vie artistique et morale, Entre 1854 et 1855, Huile sur toile, H. 3,61m x L. 5,98m , © RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski


C’est déjà fort de copyfraud de considérer que la RMN (Réunion
des Musées Nationaux) aurait un copyright sur Courbet... mais
en plus demander une participation publique pour renforcer cet
abus me semble inacceptable.

Ajoutons que l’État va participer aux deux tiers de cette
restauration de 600 000 euros au travers des réductions
d’impôts. Au total, on cherche donc 200 000 euros, puisque
l’État est déjà prêt à abonder du reste.

Les réductions d’impôts sont une bonne manière de
permettre aux citoyens d’orienter les dépenses publiques vers
des œuvres d’intérêt général qu’ils soutiennent... en
l’occurence, c’est compréhensible ici comme service de choix
de la dépense publique par les citoyens. C’est justement une
des bonnes méthodes pour passer du service public (qui
choisi la répartition de l’impôt) vers un bien commun
dans lequel les acteurs ont voix au chapitre.

Mais la moindre des choses serait de rendre au public autre
chose que des "cartes pass" à bon prix (une fois déduite la
participation de 2/3 de l’État au travers des réductions
d’impôts) et l’affichage du nom des donateurs sur Facebook.

Comme ce genre d’opération va se multiplier, ne devrions-nous
pas exiger que l’ensemble des droits sur les reproductions
de ces œuvres aidées soient directement posées dans
le domaine public ?

Le Musée ferait mieux d’offrir des reproductions à tous les
niveaux de qualité, des analyses de l’œuvre et des moyens
de faire connaître ce chef-d’œuvre le plus largement possible ?
On verrait certainement des soutiens découler de cette
véritable "valorisation du patrimoine" qu’est l’usage
collectif.

Hervé Le Crosnier

Caen, le 2 octobre 2014

Licence Creative Commons by